Présidentielle - Ouest: Le RDPC et le SDF se disputent un corps à Bandjoun

Yaoundé - 11 Octobre 2011
© Michel Ferdinand | Mutations

Virginie Takoguem a été mortellement rouée de coups au sortir des opérations de dépouillement du vote dimanche dernier. Deux thèses s’affrontent actuellement à Bandjoun sur les circonstances de ce drame.

La résidence de Virginie Takoguem née Djemo, première épouse d’un polygame de deux femmes, porte le deuil depuis la nuit du 9 au 10 octobre derniers au quartier Keng à Bandjoun, à l’Ouest du Cameroun. A 57 ans, la défunte venait, comme tous les autres électeurs, d’assister au dépouillement du scrutin lié à la présidentielle du 9 octobre dernier, avant de quitter le monde des vivants suite à des coups de poing administrés par un voisin de quartier, le présumé Nestor Waffo, actuellement en fuite. Deux thèses s’affrontent actuellement à Bandjoun sur les circonstances de ce drame. A défaut d’avoir des témoins de la scène, qui s’enferment dans un mutisme obstiné, nous avons rencontré la fille aînée de la défunte, à Dschang. Cette dernière indique qu’elle a reçu un premier coup de fil dimanche soir lui annonçant que sa mère se trouvait dans un état critique. Puis un second lui annonçant le décès de sa génitrice.

«Il m’a été rapporté que ma mère jubilait quand on a annoncé que Paul Biya a remporté les élections dans le bureau de l’Ecole publique (Ep) de Keng où elle a voté. Et que cela n’a pas plu à l’un de ses voisins qui l’a tabassé à mort», dit-elle. Dans le bureau de vote en question, les chiffres affichent: 224 inscrits, 164 votants, 158 suffrages valablement exprimées, 4 bulletins nuls, une enveloppe sans bulletin, un bulletin sans enveloppe, 106 voix pour Paul Biya et 30 voix pour John Fru Ndi. Les 22 autres voix étant réparties entre quelques candidats. Le bureau de vote de l’Ep de Keng est situé à près de 300 mètres de la résidence de la défunte. Mais, l’altercation avec son bourreau, selon des recoupements, aurait eu lieu au carrefour de ladite école. La scène se serait déroulée vers 21h30, sous les yeux d’une foule nombreuse. La défunte aurait reçu un coup de poing dans la poitrine, avant d’encaisser deux autres coups de pied dans le bas-ventre. Et se serait effondrée sur le champ. En attendant l’arrivée d’un véhicule pour la transporter dans un centre de santé, Virginie Takoguem a rendu l’âme. Sa fille aînée estime que la main criminelle serait venue du camp d’en face [Social Democratic Front (Sdf)].


Milice

Elle s’appuie sur le fait que la défunte a quitté les rangs du Sdf depuis 2004 pour rejoindre le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), à la demande de sa mère, présidente d’une sous-section Rdpc à Yom par Bandjoun. Cette thèse est d’ailleurs soutenue, sous cape, par des responsables du parti au pouvoir à Bandjoun. A côté, les responsables du Sdf dénoncent une manipulation pour des raisons politiques. D’après le secrétaire à l’organisation de la Circonscription électorale (Ce) du Sdf de Poumougne à Bandjoun, Godefroy Fogué, la défunte était une militante de la première heure au Sdf, toute comme son mari, aujourd’hui alité: «Elle n’a jamais démissionné de notre parti, puisque je n’ai pas encore reçu un document dans ce sens d’elle». La version donnée par quelques cadres du Sdf tranche toutefois avec la première. A en croire des indiscrétions, Virginie Takoguem, bayam-sellam, faisait son petit commerce non loin dudit bureau de vote.

La défunte aurait appuyé une contestation formulée par un représentant du Sdf dans ce bureau de vote, en adressant des propos peu courtois à l’endroit du président du bureau de vote, dans le sens de décourager la fraude organisée pour faire gagner le candidat du Rdpc. Les mêmes indiscrétions font état de ce que, dans l’après-midi de dimanche, lorsque Virginie Takoguem est venue voter, ce président s’y serait opposé. Et qu’il aurait fallu l’intervention de quelques autres membres de ce bureau pour qu’elle exprime son choix.

Au Sdf, on pense qu’en plus d’être un repris de justice, le présumé assassin entretiendrait une milice favorable au Rdpc. Reste que Virginie Takoguem n’est plus de ce monde. Son bourreau, la quarantaine dépassée, a traîné dans le village toute la nuit. Puis, il a fondu dans la Nature, peu avant l’arrivée des gendarmes. En attendant les conclusions de l’enquête ouverte à la compagnie de gendarmerie à Bandjoun, le corps de Virginie Takoguem a été placé à la morgue de Dja, près de Bandjoun. A ce sujet, une dizaine de personnes devaient y être entendues hier. Il s’agit de quelques témoins de la triste scène et des cadres des partis qui se disputent l’appartenance politique de la regrettée.


11/10/2011
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