POUR BRILLER COMME LE SENEGAL, LE CAMEROUN NE PEUT PLUS ETRE PRIVE DU SCRUTIN A DEUX TOURS

POUR BRILLER COMME LE SENEGAL, LE CAMEROUN NE PEUT PLUS ETRE PRIVE DU SCRUTIN A DEUX TOURS

POUR BRILLER COMME LE SENEGAL, LE CAMEROUN NE PEUT PLUS ETRE PRIVE DU SCRUTIN A DEUX TOURSL’élection présidentielle sénégalaise du 25 mars 2012, vient une fois de plus de nous administrer la preuve, sauf mauvaise foi, que le scrutin à deux tours est un puissant promoteur de la manifestation de la vérité démocratique. En effet, le plébiscite de Macky Sall, qui a davantage tiré sa cause de l’impopularité d’Abdoulaye Wade plutôt que d’une adhésion enthousiaste pour son adversaire, n’aurait pas eu de traduction dans les faits si le Sénégal n’avait, auparavant, bénéficié de dirigeants éclairés pour doter leur pays de ce mécanisme électoral.

Bien adapté à nos Etats africains structurellement caractérisés par un multipartisme débridé, ce mode de scrutin présente l’avantage lors de l’affrontement des deux finalistes du deuxième tour, de favoriser des rapprochements selon les tendances idéologiques et programmatiques, mais aussi en fonction de la sympathie de l’opinion pour l’un ou l’autre candidat en compétition. Le scrutin à deux tours semble aussi plus pertinent pour des contextes  de multiples candidatures tels que le notre, car de nombreux exemples de l’histoire politique contemporaine présentent des candidats en tête au premier tour mais battus au second, qui au final, permet de manifester véritablement la vérité démocratique en octroyant la majorité absolue des suffrages à l’un ou l’autre compétiteur selon sa capacité à fédérer les autres forces politiques et à faire valoir sa légitimité populaire. Cette modalité électorale, présente aussi l’avantage de pouvoir apporter une solution au redoutable mais non moins légitime problème d’égo de notre pléthore de leaders politiques, problème dont l’expérience a montré qu’il est tout simplement amplifié par le scrutin à un seul tour.

Son autre intérêt est de favoriser l’instauration d’une démocratie bipartite, sur le modèle des vieilles démocraties bien établies de Grande Bretagne où travaillistes et conservateurs s’affrontent ; des Etats-Unis d’Amérique où démocrates et républicains se donnent le change ; de France où la gauche socialiste et la droite libérale et conservatrice se font face, etc. Le bipartisme devrait être entendu ici, non comme l’imposition au forceps de deux partis mais plutôt comme un environnement politique animé par deux principales familles politiques dont les partis respectifs - qui, au demeurant se réduiraient beaucoup -, mettraient en scène une compétition électorale plus équilibrée et plus saine, au bénéfice de la dignité et de la réputation du pays tout entier.

Progessistes ou conservateurs, libéraux ou socialistes, panafricanistes ou souverainistes, foyistes ou laïcistes, acteurs de droite ou de gauche, tels pourraient être entre autres, les critères de différentiation possibles pour cette nouvelle organisation de notre paysage politique. Il tombe sous le sens que l’architecture ou plutôt la conte-architecture actuelle, avec un RDPC en surobésité face à une myriade de partis d’opposition souvent plus soucieux de survie, n’est absolument plus ni supportable ni acceptable pour un pays du niveau du nôtre.

Cela est d’autant plus vrai que la surdimension du RDPC au pouvoir n’est qu’artificielle, fondée qu’elle est sur des adhésions et un militantisme opportunistes et de façade entretenus par des individus qui le célèbrent en public et le vilipendent sans réserve en privé. Quel intérêt y a t-il donc à entretenir une organisation aussi factice, qui a érigé l’hypocrisie, la manipulation, la sournoiserie et le « jeu » en mode de fonctionnement ?
L’argument souvent invoqué par les malicieux tenants du vote à un tour selon lequel les partis de l’opposition n’ont qu’à s’unir afin d’affronter, avec plus de chances le vote à un seul tour,  manifeste très clairement l’intention de faire prévaloir un ordre politique déséquilibré, injuste et profondément inéquitable.

Il est de notoriété publique que les promoteurs de ce mode de scrutin au Cameroun, qui nourrissaient à l’époque et probablement encore aujourd’hui, une indescriptible phobie à l’égard de l’éventualité de perdre le pouvoir, savaient exactement ce qu’ils faisaient. L’intention confiscatoire, l’esprit de ruse, de tricherie et de dribble, qui ont présidé à l’instauration du scrutin à un seul tour au Cameroun doivent être déconstruits. Cela servirait la justice, l’équité, la promotion de bonnes mœurs électorales et la manifestation de la vérité démocratique, la vraie, au Cameroun.

Lors des crises électorales ivoiriennes et guinéennes, d’autres commentateurs tout aussi malicieux et gorgés de mauvaise de foi, ont tenté d’imputer ces crises au mode de scrutin à deux tours. Ces impostures intellectuelles et ces argumentaires spécieux qui n’ont échappé à personne, étaient la négation des véritables causes à l’origine desdites crises. Des crises politiques liées à des irrégularités du processus, à la fraude et aux tripatouillages des résultats électoraux, ne sauraient être imputées au mode de scrutin en vigueur.

Au reste, si par extraordinaire, après avoir pressenti sa très prévisible défaite, Abdoulaye Wade avait changé de mode de scrutin - comme il a modifié la constitution afin de se présenter à nouveau et illégalement - et gagné la présidentielle au premier tour, le Sénégal qui est un pays d’engagement et de grande conscience politiques, aurait sans doute basculé dans les désordres et le chaos. Le scrutin à deux tours s’est  alors imposé à l’autocrate que Wade est devenu, comme un rempart contre ses funestes desseins et en faveur du triomphe de la démocratie au Sénégal. On peut alors le féliciter de s’être plié au verdict des urnes, ce qui représente de bonnes raisons d’espérer pour l’Afrique et pourquoi pas, pour le Cameroun. 

Le cas  sénégalais peut et doit servir d’exemple à notre pays ainsi qu’à ces nombreux Etats africains qui tardent encore à comprendre que les questions liées au processus électoral doivent être réglées le plus vite possible, entendu que le véritable débat ainsi que les véritables confrontations politiques doivent se faire sur le terrain des politiques publiques à travers les programmes économiques, sociaux, politiques et culturels tels que préconisés par les différents protagonistes politiques.

Au moment où il est question chez nous de discussion, je l’espère vivement, avant le vote prochain d’un code électoral unique, le pouvoir – qui semble dans de meilleures dispositions sur la problématique électorale ces derniers temps - serait bien inspiré de méditer et de mettre à profit l’exemple sénégalais. En particulier pour l’élection présidentielle, le mode de scrutin à deux tours devrait être adopté dans notre pays.  Du reste, donnant lieu à un débat d’entre deux tours par les deux finalistes, ce mode de scrutin est susceptible d’enchanter nos concitoyens – si abondamment dépolitisés -  par rapport à l’activité politique tout en redonnant de l’attrait  aux élections à travers un tel outil d’animation. Notre pays ne peut plus être  privé du scrutin à deux tours !

© Correspondance de : Olivier BILE



03/04/2012
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