PERFORMANCES: CES CLASSEMENTS QUI EMBARRASSENT LE RÉGIME DE PAUL BIYA

Biya Paul:Camer.beLe pouvoir se montre très peu disposé à recevoir les critiques que lui adressent systématiquement les rapports des organismes internationaux. La raison ? Ils sont presque tous négatifs.La dernière poussée de boutons du gouvernement remonte à très peu. Issa Tchiroma Bakary, le cabinet civil de la présidence de la République et tous les réseaux de prise de parole proches d’Etoudi sont montés au créneau pour critiquer la presse nationale accusée de légèreté dans le traitement d’une énième accusation contre Paul Biya. Certains journaux s’appuyant alors sur une information vite attribuée au magazine américain Forbes écrivent que le chef de l’Etat camerounais est le 5e dirigeant le plus fortuné du monde. 

Seulement dans ce cas, la source est erronée puisque ledit classement a été réalisé et publié – sur la base des informations de Forbes par endroit, confesse Michel Lobe le directeur Afrique du magazine – par richestlifestyle.com, un autre média américain. Le manque de rigueur des journalistes sur la nature de la source de cette information sera exploité à l’extrême par les porte-voix du régime. Plateaux de télévision, de radios, conférences de presse et même le site officiel de la présidence de la République ont été mobilisés pour les besoins de la cause. L’objectif sous-jacent à l’ensemble de l’argumentation est le suivant : si les journalistes camerounais se sont trompés sur les auteurs du classement, il est certain que l’ensemble du constat est un brouillon. La démonstration est légère, mais qui s’en préoccupe ? Le principal est de balayer toute critique qui pourrait défraîchir la perception narcissique et forcément idyllique que le régime a de lui-même et de sa gestion de l’Etat.

La méthode est simple et rodée au fil des ans. Les mauvaises performances sont systématiquement balayées et cachées sous le tapis. Le président Paul Biya serait détesté, harcelé par une horde d’activistes dont la principale caractéristique serait la mauvaise foi. Il faudrait peut-être aussi expliquer la récurrence des mauvaises places dans la plupart des listes établies par les organisations internationales qu’elles soient gouvernementales ou non. La dernière étude sur l’indice de perception de la corruption de Transparency International continue à souligner les difficultés du système politique à endiguer le fléau dans tous les secteurs de la vie nationale. Peut-être moins aujourd’hui qu’en 1997 lorsque le Cameroun a été désigné pays le plus corrompu par ce classement, le gouvernement et ses soutiens convoquent volontiers des thèses complotistes pour discréditer ses détracteurs.  L’habitude a réussi à faire tolérer les études de Transparency.

C’est bien plus difficile pour des organisations qui ne travaillent pas régulièrement sur le Cameroun. 

Protéger le prince


International Crisis Group est de celles-là. La dernière réflexion de cette organisation non gouvernementale remonte au 04 août 2014 et elle critiquent vertement les options politiques et sécuritaires du régime notamment vis-à-vis de la secte Boko Haram et demande à Paul Biya de quitter le pouvoir après 2018. Ce point de vue a été froidement accueilli comme il fallait s’y attendre. Emilia Monjowa Lifaka, députée Rdpc et vice-présidente de l’Assemblée nationale a rappeler à l’ONG que les Camerounais restent les seuls interlocuteurs capables de prendre une décision d’une telle gravité. Dans le même temps Hans de Marie Heungoup (interviewé dans le cadre de ce dossier), un jeune chercheur travaillant pour ICG a été interpellé dans la région de l’Extrême Nord et gardé à vue pendant 48 heures. 

L’actualité immédiate est le prétexte de ce dossier que propose La Nouvelle Expression. Mais au-delà de la succession des événements qui se déroule sous nos yeux ici et maintenant, il est question de saisir des constantes ; de montrer comment au fil des années le pouvoir se découvre effarouché par ces classements sans jamais essayer de se remettre en question. En 1993 par exemple, on se rappelle des tractations engagées par les proches de Biya pour enterrer le rapport sur la probité réalisé par la Banque mondiale….

Cela dit, il faudrait souligner que les classements qui embarrassent le plus Yaoundé sont ne sont pas forcément ceux qui mettent le doigt sur des questions fondamentales comme l’accès à l’éducation, aux infrastructures de santé ou à la bonne gouvernance d’un point de vue général et abstrait. Les rapports pessimistes mais impersonnels passent souvent inaperçus. Ce n’est pas le cas de des études telles que celle publiée par le Comité catholique contre la faim en 2009. L’ONG française s’était penchée sur  ce qui a été a appelé à l’époque l’«affaire des biens mal acquis». L’ensemble de l’appareil de l’Etat s’est chargé de faire le ménage et de peindre un visage immaculé à Paul Biya accusé d’être à la tête d’un important patrimoine immobilier en France.

© La Nouvelle Expression : William Bayiha


26/10/2014
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