Paul Biya manoeuvre pour gagner la présidentielle

Le Messager

Le rabais du coût de confection de la carte d'identité nationale fait partie d'un plan que le président de la République et les siens ont élaboré pour acquérir une victoire électorale sans la moindre contestation!


C'est depuis pratiquement 2006 que le processus a été bâti. Deux ans après la réélection de Paul Biya pour un mandat de 7 ans, les hiérarques du système ont immédiatement commencé à scruter la meilleure façon possible pour le faire rempiler. Il faut dire que le verrou que constituait l'article 6 de la constitution qui limitait le mandat présidentiel à deux, gênait énormément les tenants du pouvoir, en commençant par l'entourage immédiat du président Biya.

Son épouse Chantal, pratiquement au panthéon de sa popularité, construite et développée par les inconditionnels et les thuriféraires du régime était elle, prête à laisser son époux quitter le Palais de l'Unité alors qu'il n'y avait que dix ans qu'elle venait de s'y installer ? Beaucoup de ceux qui fréquentent ce milieu croient savoir que cette hypothèse était difficilement envisageable. La première dame est une passionnée de l'action sociale. Récemment, ses adeptes ont dit d'elle qu' « elle a un cœur d'or, tellement elle aime aider les pauvres, les souffrants et tous les exclus de la société », commente une dame proche de Chantal Biya. Conséquence, pour aider, les pauvres et les exclus sociaux, il faut naturellement des moyens. Parfois, les moyens d'Etat. Et ce n'est pas en étant ex-Première dame qu'elle les aurait vraiment et de manière considérable. D'où la pression que, selon des sources bien introduites, Chantal Biya aurait commencé par mettre au lendemain de la reconquête du pouvoir en 2004 sur son époux de président.

Mais, s'arrêter à dire simplement que c'est seulement son épouse qui a influencé Paul Biya à conquérir un nouveau mandat à la tête de l'Etat n'est pas entièrement juste. Au sein du sérail politique, il y en a qui n'envisagent, mieux qui ne croient pas à leur avenir politique dans le landerneau politique sans Paul Biya. Au début de ce septennat, c'était le cas des hommes comme Joseph Charles Doumba (alors sg du comité central du Rdpc), feu Léopold Ferdinand Oyono, René Emmanuel Sadi, Laurent Esso, Amadou Ali, Marafa Hamidou, Jacques Fame Ndongo, et tous les autres caciques du système pour qui Biya devrait vivre encore cent ans.

Face à eux, il y avait une nouvelle génération de ministres et autres directeurs généraux et hauts responsables au niveau de la présidence de la République, à qui Paul Biya venait de faire confiance et mis à l'œuvre pour la modernisation du fonctionnement de l'Etat. Comme tête de fil de cette génération, on avance, le nom de l'ex-ministre d'Etat, Jean-Marie Atangana Mebara, alors ministre d'Etat secrétaire général de la présidence de la République. C'est finalement ce groupe que leurs adversaires, dont on dit qu'ils sont les caciques, vont baptiser «G11 ». Il fallait donc absolument éviter que ce groupe arrive au pouvoir. Car si on les laissaient faire, les intérêts des caciques serraient compromis. Premièrement, déverrouiller l'article 6 de la Constitution en ouvrant la compétition électorale à nouveau à Paul Biya. Ce sera fait avec aisance. René Emmanuel Sadi qui est nommé entre temps secrétaire général du comité central du parti au pouvoir s'est attelé à  la tâche de convaincre les députés du Rdpc de voter la modification de la Constitution.

Le verrou de la Constitution l'autre bataille se situe au niveau de la consolidation d'Elections Cameroon (Elecam) mis en route entre temps, pour qu'elle devienne un organe crédible et accepté par les partenaires au développement. Mais ni Elecam, ni le processus de la nouvelle candidature de Paul Biya ne semble vraiment passer dans l'opinion. En février 2008, le prétexte légitime de la vie chère amène l'opinion qui se sent désabusée à organiser des émeutes mémorables un peu partout sur l'étendue du territoire national. Paul Biya et les siens répriment violemment. Mais quelques mois après, le chef de l'Etat se montre rassurant, d'une part en donnant raison aux manifestants face à l'inertie du gouvernement, et d'autre part, en élargissant la plupart des jeunes émeutiers. C'est alors que les personnalités qualifiées de parrains de la nébuleuse « G11 », à qui  les caciques attribuent à tort ou à raison le parrainage des émeutes de fin février 2008,  sont neutralisés par l'Opération Epervier. La situation se normalise et tous les acteurs du système vont s'atteler à penser à la manière dont  le camarade président sera reélu.

Va-t-il anticiper l'élection présidentielle ?

René Emmanuel Sadi(Photo) en tant que secrétaire général du comité central du Rdpc se retrouve au centre de la réflexion pour la reélection. Les motions de soutien appelant à sa candidature vont alors se multiplier. On la qualifiera après de « L'appel du peuple ». Jusque-là Paul Biya est resté silencieux. Mais au début du dernier trimestre de l'année 2010, il sort de sa réserve et convoque le secrétaire général du comité à qui il demande de penser à un processus qui l'amènera à gagner les élections dans la transparence et sans la moindre contestation possible. Au sortir de cette audience, René Emmanuel Sadi réunit son équipe.

Après de longues heures de concertation, le secrétariat général du comité central sort le concept « d'intensification des inscription sur les listes électorales ». Il s'agit de faire accompagner Elecam dans le processus d'inscription sur les listes électorales à travers les organes du parti. Au même moment, il fallait résoudre « l'équation Sdf ». Le parti de Ni John Fru Ndi qui réclame l'amélioration d'Elecam, est contre le processus des inscriptions sur les listes électorales des populations en âge de voter tant qu'il n'est pas écouté. Et il le fait savoir de manière tonitruante, au point d'attirer l'attention des partenaires au développement qui lui donnent silencieusement raison. Paul Biya veut et doit gagner les élections proprement. Les stratèges du régime conseillent de se faire les yeux doux à Fru Ndi et son parti. Le cinquantenaire des armées qui se déroule à Bamenda sera une occasion idoine. Biya rencontre Fru Ndi et creé une nouvelle idylle politique.

Mais au final, il reste que les populations ne se pressent pas beaucoup sur le terrain pour s'inscrire. Les prévisions ne sont pas atteintes. Le motif selon les rapports qui reviennent à Paul Biya serait lié au coût de l'acquisition de la carte d'identité. Le chef de l'Etat prend alors la mesure qui baisse à 2500 Fcfa au lieu de 6500 Fcfa le prix de l'établissement de la carte d'identité ceci jusqu'au 31 avril 2011.

 Il se trouve que le délai du 31 avril 2011 laisse libre court aux spéculations sur la date des élections. On se souvient que dans son discours de fin d'année, le chef de l'Etat a fait entendre qu'il y aura des élections. Le sens commun a pensé à l'élection présidentielle et aux élections sénatoriales. Le délai du 31 avril 2011 pour la confection des cartes d'identité à 2500 Fcfa marque t-il la date de convocation du corps électoral ? Difficile à dire pour l'instant. Ce qu'on sait est que du point de vue de la loi, le processus d'inscription sur les listes électorales commence chaque année le 1er janvier et s'arrête le 31 décembre de chaque année. Le processus est interrompu le jour de la convocation du corps électoral.





14/01/2011
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