Pas d’amalgame

Pas d’amalgame 

Cameroun,Cameroon : Pas d’amalgame« Dans la vie d’une nation, il y a des moments difficiles. A ces moments-là, il faut faire preuve de courage, de solidarité et de patriotisme. […] Ce n’est pas Boko Haram qui va dépasser le Cameroun. Nous continuons le combat et nous les vaincrons ». Cette déclaration forte, le chef de l’Etat l’a faite dans l’interview qu’il a accordée à la presse, peu avant son départ de l’aéroport de Yaoundé-Nsimalen, le 2 août 2014, pour le sommet Etats-Unis – Afrique qui s’est achevé mercredi dernier. Il s’agissait ni plus ni moins là, d’un appel à tous les Camerounais afin qu’ils gardent confiance, et restent mobilisés autour du gouvernement et de nos forces de défense et de sécurité, dans la lutte longue engagée face à la menace asymétrique que constitue les menées de la nébuleuse Boko Haram.

L’évocation, par le président de la République, des autres épreuves que le Cameroun a eu à surmonter dans son histoire, a tôt fait de déclencher, dans le landerneau politico-médiatique national, une polémique inattendue. Chez de nombreux confrères de la presse écrite et audiovisuelle tout comme chez certains acteurs politiques, on a observé une levée des boucliers contre une prétendue insulte à la mémoire des nationalistes camerounais dont le chef de l’Etat, dans sa déclaration à l’aéroport Yaoundé-Nsimalen, aurait pour ainsi dire logé les mouvements révolutionnaires à la même enseigne que les exactions de la secte islamiste dans le septentrion. A travers les colonnes des journaux et au fil des talk-shows des médias audiovisuels, la semaine dernière, des débats enfiévrés ont eu cours, avec comme dénominateur commun la défense de la mémoire des nationalistes camerounais.

Le moins qu’on puisse c’est que tout ce beau monde, sciemment ou non, semble avoir délaissé la proie pour l’ombre. Que l’amalgame ait été voulu ou non, la mauvaise interprétation des propos du chef de l’Etat risque, en définitive, d’avoir distrait l’opinion nationale de la vraie préoccupation de l’heure. D’abord, c’est d’une bien mauvaise querelle qu’il s’agit, que celle autour de la mémoire des nationalistes camerounais qui aurait été bafouée. Ruben Oum Nyobé, Félix Moumié, Ernest Ouandié ont bien été proclamés héros nationaux le 27 juin 1991 par l’Assemblée nationale.

Ensuite, on peut difficilement occulter le fait que les situations d’insécurité vécues avant et l’indépendance et durant les premières années du Cameroun indépendant ont été autant d’épreuves sur son parcours.

Un fait demeure constant : le Cameroun amorce résolument le chemin de la croissance retrouvée, avec en perspective un statut de pays émergent à l’horizon 2035. Après les affres de la longue crise économique et des douloureux ajustements structurels, les Camerounais pouvaient légitimement aspirer à un mieux vivre, dans un pays épargné d’épreuves comme celle qui, insidieusement, vient instiller doutes et inquiétudes dans les esprits.

Ce sont eux les destinataires du message rassurant que le chef de l’Etat a tenu à délivrer le 2 août dernier. Un message d’autant plus attendu et bien accueilli que face aux exactions répétées de la secte Boko Haram dans plusieurs localités de l’Extrême-Nord, les efforts d’organisation de la riposte et de défense du territoire camerounais ne sont pas forcément avec tambours et trompettes.

S’agissant de mobiliser tout en rassurant les Camerounais autour d’une juste lutte contre un ennemi pervers, la déclaration du chef de l’Etat ne pouvait intervenir plus opportunément. Aussi, l’amalgame fait dans certaines interprétations des propos présidentiels tend à nous éloigner de l’essentiel.

© Cameroon Tribune : Augustin FOGANG


13/08/2014
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