Pas d'élections, Zéro Marafa Président !

Mercredi, 08 Août 2012 22:20 Écrit par Patrice Nganang - Ecrivain - Activiste politique

La beauté de l'affaire Marafa est qu'elle rend des élections inévitables. À moins évidemment que dans un geste ultime de chaos politique, le tyran ou ses gens, n'en venaient à imposer à notre pays son fils – ou d'ailleurs Sadi. Or prendre le pouvoir, c'est d'abord le refuser à d'autres qui longtemps s'y préparaient. Franck Biya ou alors Sadi, président du Cameroun, cela voudrait en effet dire sevrer le Grand Nord du pouvoir présidentiel que celui-ci a sécurisé à Biya dans les faits par la mise hors-jeu de 40% de citoyens de notre pays, les Nordistes, en ne présentant toutes les fois depuis 2004 aucun candidat du Nord autre que Garga Haman Adji aux élections présidentielles.

Cela voudrait dire sevrer un tigre affamé et qui déjà se lèche les babines, de la viande qui lui a été promise de commun accord. Cela voudrait donc dire rendre nécessairement violente la rupture du jeûne politique dans lequel le Grand Nord s'est volontairement mis. Que le violent retour du refoulé qui en découlerait prenne la forme d'un coup d'Etat, ou d'ailleurs d'une guerre civile, n'est que pensable. Mais alors ce serait la revendication de la mise en application d'un deal politique foulé aux pieds. Personne n'aime être un mboutoukou, et le Grand Nord sans doute. Le parcours politique de la Cote d'ivoire depuis 2002 est là pour nous montrer à quel prix l'axe Nord/Sud remis en question peut-être restauré.

Marafa va donc passer par où pour être président ? Même si sa libération était acquise en octobre, il n'y aurait toujours aucun mécanisme institutionnel qui rende une présidence Marafa Hamidou Yaya effective. Le successeur constitutionnel chez nous, c'est bien Cavaye Yeguie Djibril. Or il n'y a aucune honte à prendre le pouvoir par des élections ! Sans doute c'est après Biya qu'il faudra dire que même Mandela, sorti de 27 ans de prison, auréolé par la clameur mondiale, a eu besoin d'une élection pour devenir président de la république. Et cette élection devait évidemment être planifiée, préparée et organisée. Qui plus est, elle devait être gagnée. Si le présent carcéral de Marafa s'ouvre ainsi sur un destin électif, pour le matérialiser, ce dernier a un certain nombre de préalables auxquels il ne pourra pas échapper : par exemple appartenir à un parti politique, les personnalités indépendantes n'ayant véritablement pas voie au chapitre dans notre pays. Quel parti politique l'investirait-il ? Est-ce le RDPC ? Est-ce le SDF ? Est-ce l'UNDP ? Est-ce le SCNC interdit ? Ou alors : ses ambitions formulées publiquement seront-elles, comme celles de Maurice Kamto, éteintes dans la réalité de l'inexistence d'un parti volontairement réceptacle de ses rêves ?

jeanmichelnintcheu1Pourtant il suffit que Paul Biya qui est déjà l'un des présidents les plus âgés en Afrique meure de manière soudaine, pour que la succession au sommet de l'Etat devienne un problème effectif chez nous.

Il demeure que Marafa a besoin d'élections comme un nageur a besoin d'oxygène, et ce besoin deviendrait encore plus accru en cas de mort de Biya. Ainsi, lui qui fut ministre de l'Administration territoriale et de la décentralisation, est devenu celui qui a le plus interêt qu'il y ait des élections, que l'opposition ait pu trouver à l'intérieur du RDPC. Etrange destin que celui de cet homme ! Cette réalité claire de son destin politique, si par-delà sa libération il le veut présidentiel, et les 5000 personnes qui l'acclamaient le 24 juillet au tribunal y croient, nous ramène devant le fait que les élections ont été suspendues dans notre pays – les députés et les maires siègent dorénavant par décret. Le Cameroun, sorti d'un coup d'Etat électoral le 4 septembre 2011, est devenu une république dans laquelle le peuple n'est plus représenté par des élus à qui il a confié un mandat.

Source : Emergence (9 août 2012)

Seulement, la restauration des élections dans notre pays ne peut pas se passer d'un Code électoral juste. Et c'est-à-dire d'un Code qui implique des élections présidentielles à deux tours, ainsi qu'un nombre de mandats limité. Parce qu'il est peu probable que John Fru Ndi pour courir à la défense de Marafa ait posé ces évidences comme préalables politiques non négociables, l'opposition gagnerait dès aujourd'hui à se trouver un candidat qui en cas d'élection, à cause de son parcours et de sa carrure d'homme d'Etat de toute évidence battrait Marafa.

Ce candidat, c'est Jean-Michel Nintcheu !




07/09/2012
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