Opération Epervier: Quand le gouvernement prend ses quartiers à Kondengui

YAOUNDÉ - 14 Mai 2012
© Charles Nwé | La Nouvelle

L'ancien Premier ministre qui séjourne depuis le 16 avril 2012 à la prison centrale de Yaoundé Kondengui y précède une bonne partie de son équipe gouvernementale. Confirmant par la même occasion les mauvais classements de Transparency international qui ont fait du Cameroun l'un des pays les plus corrompus de la planète.

L'indice de perception de la corruption (Ipc) que publie chaque année l'Ong allemande, Transparency International est toujours un sacré moment que les Camerounais attendent avec impatience. Et même une certaine crainte pour les gouvernants qui redoutent étrangement les classements annuels de Transparency International. Des classements qui du reste sont accompagnés au passage par des notes s'étalant sur une échelle de 0 (pays fortement corrompu) à 10 (pays peu corrompu). C'est ainsi que l'année dernière, le Cameroun a occupé le 134ème rang sur 183 pays en lice avec 2,5 sur 10. S'agissant des pays de l'Afrique subsaharienne, il occupe la 26ème place sur 48 pays classés. En 2010, le Cameroun était classé 146ème sur 178 avec un indice de 2,2 sur 10. Aussi bien en 2010 qu'en 2011, ce classement fait du Cameroun un «pays à haut niveau de corruption». Ce qui est d'ailleurs confirmé par le volumineux rapport de la Conac rendu public le 8 novembre 2011. Seulement, si avec la mise en place des structures comme la Conac ou l'Anif, la corruption a quelque peu reculé au Cameroun, l'on ne peut oublier qu'en 1998 et en 1999, le Cameroun avait réussi l'exploit de se classer respectivement 85ème sur 85 et 99ème sur 99, c'est-à-dire, pays le plus corrompu du monde.

Pour tout dire, ces mauvais classements n'ont laissé personne indifférent, notamment le président de la République qui, dans ses discours, n'a de cesse eu à fustiger ces comportements déviants, particulièrement la lutte contre les détournements de deniers publics. Cette détermination s'illustre chaque jour davantage avec la mise en place des structures chargées de lutter efficacement contre ce fléau. Après la phase pédagogique, l'heure est plus que jamais à la phase répressive. Avec la dernière incarcération de l'ancien Premier ministre, Thomas Ephraïm Inoni et l'ancien ministre d'Etat ministre de l'Administration territoriale et de la Décentralisation, Marafa Hamidou Yaya, certains observateurs, un brin moqueurs, estiment que le gouvernement de la corruption affiche presque complet. Ces mêmes observateurs remarquent d'ailleurs que ces grands commis de l'Etat étaient déjà en service dans les plus hautes sphères de l'Etat au moment où le Cameroun battait tous les records dans les classements de Transparency International. Le passage de Peter Mafany Mussongue à la Primature et sa volonté d'attaquer le mal par la racine n'aura pas prospéré, entouré qu'il était par une bande de prévaricateurs qui n'en faisait qu'à leur tête. Voici du reste une revue des troupes non exhaustive de ce gouvernement de la corruption aujour¬d'hui en délicatesse avec les juridictions du pays pour un motif constant: détournement de deniers publics.


Premier ministre: Thomas Ephraïm Inoni

C'est le 16 avril dernier que Chief Ephraïm Inoni, ancien Premier ministre a été incarcéré à la prison centrale de Yaoundé Kondengui. L'ancien Pca de Apm devra s'expliquer sur les fonds mis à disposition pour l'acquisition d'un aéronef pour les voyages présidentiels mais aussi sur la location des avions de la Camair. Secrétaire général adjoint de la présidence de la République au moment où l'acquisition de l'avion présidentiel est à l'ordre du jour, il sera plus tard promu Pm. De 2004 à 2009. Sans se montrer décidé à suivre son patron dans la lutte contre la corruption.



Secrétaire général de la présidence de la République: Jean-Marie Atangana Mebara

Récemment acquitté de 3 des 5 chefs d'accusations dans l'affaire Albatros, il ne reste pas moins vrai qu'il restera en prison. Ce d'autant plus qu'il est accusé de détournement de 3,3 milliards de FCFA en coaction avec Ephraïm Inoni. Une somme représentant la somme débloquée par la Snh pour le payement des arriérés de location des avions de la Camair.



Ministre de l'Administration territoriale et de la Décentralisation: Marafa Hamidou Yaya

Placé sous mandat de dépôt le 16 avril dernier à la prison centrale de Yaoundé, l'ex-Minatd est celui là même qui avait validé l'option du décaissement par la Snh de 31 millions de dollars Us à la Société (écran?) Gia International pour l'acquisition d'un Bb jet 2 pour les déplacements du président de la République. Seulement, l'avion n'a jamais été livré et l'argent n'a pas été récupéré. A quoi cet argent a-t-il donc servi? C'est à cette question que le Tribunal de grande instance de Yaoundé veut trouver une réponse.


Ministre de la Santé publique: Urbain Olanguena Awono

C'est le 31 mars 2008 que l'ex-Minsanté a été happé par les éléments du Gso. Il devait ainsi répondre, en compagnie de 14 de ses anciens collaborateurs des chefs d'accusation de détournement de deniers publics, tentative de détournement de deniers publics et complicité de détournement de deniers publics, le tout pour un montant de 14,8 milliards FCFA. Mais à la clôture de l'information judicaire, le juge d'instruction, David Donhou, abandonne les poursuites contre 7 des 14 accusés. Les sommes détournées s'élèvent désormais à 700 millions de FCFA dont 414 sont imputés à Urbain Olanguena Awono. Le verdict reste attendu.


Ministre de l'Education de base: Haman Adama

C'est le 5 janvier 2010 que cette originaire de Garoua a été arrêtée et incarcérée plus tard à la prison centrale de Kondengui. Il lui est reproché une gestion épicière des Fonds Ppte mis à sa disposition.


Ministre de l'Economie et des Finances: Polycarpe Abah Abah

Arrêté lui aussi dans le cadre de l'opération Epervier le 31 mars 2008, l'ancien grand argentier du Cameroun venait d'être rattrapé par des indélicatesses financières liées à des reversements d'importantes sommes d'argent par la direction des Impôts au Crédit foncier.


Ministre délégué en charge du Budget: Henri Engoulou

Le motif de son arrestation a trait au recouvrement d'une créance de 4 milliards de FCFA auprès de la Bicec dans le cadre de la liquidation de l'ex-Oncpb alors qu'il était encore secrétaire général du ministère des Finances et du Budget.


Ministre des Mines et de l'Energie: Alphonse Siyam Siwe

Ce natif de Bafang a été incarcéré pour des malversations opérées au Port autonome de Douala alors qu'il en était le directeur général.


Secrétaire d'Etat aux Travaux publics: Paulin Abono

Suite à une dénonciation, un rapport de l'Anif et des rapports du Contrôle supérieur de l'Etat que Paulin Abono a été incarcéré pour des détournements à la Commune de Yokadouma dont il était maire.

Cette équipe gouvernementale restreinte peut être appuyée par des ministres comme Pierre Désiré Engo du Plan ou Mounchipou Seidou des Postes et Télécommunications dont les condamnations sont antérieures au véritable début de l'opération Epervier. Mais aussi d'une bonne brochette de Pca et autres directeurs généraux d'entreprises publiques. L'on peut citer entre autres Edouard Etonde Ekotto, Yves Michel Fotso (Camair); Paul Ngamo Hamani (Camair); Joseph Edou (Crédit Foncier); Gilles Roger Belinga (Sic); Jean Baptiste Nguni Effa (Scdp); Emmanuel Gérard Ondo Ndong (Feicom). Toutes ces personnalités peuvent bénéficier de la disponibilité de nombreux collaborateurs qui n'ont pas échappé aux serres de l'Epervier. C'est tout dire qu'il y a de quoi composer un gouvernement avec les proies de l'Epervier.



14/05/2012
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