Opération Epervier: 12 ans d’emprisonnement pour Roger Ntongo Onguené

DOUALA - 01 FEV. 2013
© Florette MANEDONG | Le Messager

Le verdict de l’affaire Etat du Cameroun représenté par l’autorité aéronautique (Ccaa) contre l’ex-directeur général de cette entité, a été rendu hier, jeudi 31 janvier 2013. Roger Ntongo Onguené a été condamné à 12 ans d’emprisonnement ferme et des amendes à hauteur de 363 millions Fcfa.

On s’en souvient encore, il y a 03 mois, plus précisément le 12 novembre 2012, les médias présentaient alors Roger Ntongo Onguené, ex-Dg de la Ccaa et Yves Michel Fotso, ex-Dg de la Camair, comme étant les premiers clients du Tribunal criminel spécial (Tcs). Rendu au 3ème mois de ce procès, le verdict est tombé. Alors qu’Yves Michel Fotso, coaccusé de l’ex Dg de la Ccaa a bénéficié d’un arrêt de poursuite à son encontre, son coaccusé lui, s’en tire avec une peine d’emprisonnement de 12 ans, plus le corps du délit à restituer, soit 316 570 508Fcfa et 30 millions à payer en réparation des préjudices et pour finir, 17 millions à payer comme dépens à la Justice.

A la reprise de l’audience d’hier au Tcs, le président Yap Abdou, a annoncé l’accusé Ntongo Onguené coupable. Il a donc été question pour les différentes parties impliquées dans cette affaire de proposer les sentences. Pour le ministère public et la partie civile, la Ccaa, représentant également l’Etat du Cameroun, il était inutile de davantage s’attarder, puisque l’accusé a été reconnu coupable par le Tribunal. Il faut tout simplement appliquer la loi. Et selon cette loi, précisément l’article 184 du Code de procédure pénale,« quiconque par quelques moyens que ce soit obtient ou retient frauduleusement quelque bien que ce soit, mobilier ou immobilier, appartenant, destiné ou confié à l’Etat, à une coopérative, collectivité ou établissement ou soumis à la tutelle administrative de l’Etat, ou dont l’Etat détient directement ou indirectement la moitié du capital, au cas où la valeur de ces biens excède 500 000Fcfa, d’un emprisonnement à vie… ». La somme querellée, soit 316 millions Fcfa, s’avère être bien supérieure aux 500 000Fcfa. De plus, il n’y a pas lieu de plaider ici les circonstances atténuantes, ou même d’en tenir compte, car « tout au long de ce procès, l’accusé ne s’est en aucun cas repenti, et nous avons été, tout au long de ces années, privés de beaucoup de choses… on aurait pu construire des routes, des écoles, des hôpitaux. Ainsi, M. Ntongo doit être condamné à vie, à payer à la justice des dépens et qu’il soit également prononcé à son endroit, de même qu’à l’endroit d’Yves Michel Fotso, des déchéances au regard du Code pénal pendant une période de 10 ans ».


Rejet des exceptions de la défense

Me Eba quant à lui, conseil de Ntongo Onguené, a estimé de ce fait que la partie civile a « replaidé » le dossier au fonds, toutes choses qui n’auraient pas du être acceptées par le tribunal. Qu’à cela ne tienne, en dernier ressort, il a tenu à défendre jusqu’au bout les droits de son client, mais toujours, en mettant en avant le coaccusé de ce dernier : « le Tcs a été mis sur pied pour la vérité et la réconciliation. Mais, où se trouve-t-elle dans cette affaire, si tant est que dans cette affaire de coaction, un coaccusé bénéficie d’un arrêt de poursuite tandis que mon client est déjà reconnu coupable ? C’est trop facile de prendre, utiliser et rembourser après. Ceux qui le font doivent reconnaitre leur culpabilité et expliquer comment ils ont fait pour voler. De 2001 à 2012, combien peuvent produire 230 millions dans une banque ? Personne n’a pensé au préjudice financier ! ». De plus, Me Eba fustige l’attitude du juge d’instruction qui a séparé les charges et les sommes que doivent rembourser chacun depuis l’instruction, soit 230 millions pour le milliardaire Fotso et 316 millions pour Ntongo Onguené. De plus, sur quelle base a été remboursé le corps du délit ? Autant de questions qui n’ont pas réussi à attirer la clémence, au souhait de cet avocat, du Tribunal.

Revenu en salle 02h de temps plus tard, le tribunal a prononcé la sentence : sur les faits de détournement en coaction, « le tribunal ne peut fonder sa disposition sur un coauteur seul ». Sur l’arrêt des poursuites, Roger Ntongo Onguené aurait pu lui aussi bénéficier de cette mesure s’il avait eu la volonté et les moyens de rembourser. Au sujet enfin de la culpabilité de ce dernier, les exceptions soulevées par la défense ont été rejetées. Compte tenu du fait que la restitution est intervenue après la saisine de la juridiction de jugement, l’accusé Yves Michel Fotso écope des déchéances de l’article 30 du Code pénal pendant une durée de 10 ans, avec mention au casier judicaire, de même que son coaccusé. Ntongo Onguené lui, ayant été reconnu coupable, doit restituer le corps du délit, soit 316 millions, payer une amende de 30 millions, des dépens s’élevant à 17 millions et écoper de 12 ans d’emprisonnement ferme. Dans l’impossibilité de payer des amendes, il effectuera une contrainte par corps de 5 autres années. C’est dans la tristesse et la désolation que famille, amis et conseil ont quitté la salle d’audience…



Focal: A propos des déchéances de l’article 30 du code pénal…
Par la notion de « déchéances de l’article 30 » le législateur entend une peine complémentaire pour toutes personnes à l’encontre desquelles elle est prononcée. Celui qui écope des déchéances de l’article 30 du code pénal pendant un certain nombre d’années, est privé de ses droits civiques, déchu de ses droits pendant cette période. Il ne peut plus exercer ses droits civiques et politiques… ne peut ni voter, ni être éligible, encore moins occuper un poste de responsabilité dans quelques entreprises que ce soit, pour le compte de l’Etat ou non. Entre autres choses. Yves Michel Fotso et Roger Ntongo Onguené seront donc, pendant 10 années, des citoyens déchus de tous leurs droits.

F. M.


01/02/2013
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