Marafa Hamidou Yaya " Monsieur le Président de la République,les Camerounais ont bien conscience que le funeste événement d'Eséka n'est pas un pur accident"

Source: Camer.be 27 10 2016

Cameroun: Marafa Hamidou Yaya " Monsieur le Pr?sident de la R?publique,les Camerounais ont bien conscience que le funeste ?v?nement d'Es?ka n'est pas un pur accident" :: CAMEROON
Du fond de sa prison, l'ancien secrétaire général à la présidence du Cameroun et ancien ministre d’État chargé de l’administration territoriale et de la décentralisation du Cameroun aujourd'hui en rupture de ban avec le chef de l'Etat camerounais, interpelle ce dernier et exige de lui une enquête plus indépendante sur les causes du drame ferroviaire du 21 octobre. L'intégralité de la lettre.

Yaoundé, le 27 octobre 2016 

 

Lettre ouverte à Monsieur le President de la République 

Monsieur le Président de la République, 

C'est au cœur de l'une des périodes les plus tragiques et les plus sombres de l'histoire récente de noire pays que je m'adresse à vous. Les images insoutenables de l'accident terrovialre survenu la 21 octobre à Eseka sur la ligne Yaoundé-Douala desservie par Camrail, ont profondément bouleversé tous les Camerounais. Elles continueront longtemps de les hanter. Ces 79 morts, innocents privés de leurs destin et arrachés à leurs proches -mais n'y a-t-il pas eu davantage de victimes qu'on ne veut bien nous le dire? -, ces centaines de blessés qui tentent aujourd'hui de s'accrocher à la vie dans les conditions sanitaires les plus précaires, sont d'autant plus insupportables à nos compatriotes que ce drame aurait pu être évite. Si l'émotion da la nation est aujourd'hui si forta, c'est parce qu'elle méle la douleur et la colère. 

Lorsque ce tragique événement s'est produit, Monsieur le Président de la République, vous ne vous trouviez pas au Cameroun. C'est donc plus de 48 heures après les faits que vous vous étes enfin exprimé, à votre arrivée é l'aéroport de Yaoundé. Vous ne vous êtes depuis toujours pas rendu sur les lieux de l'accident. Dans de telles circonstances, qu'on peut sans crainte qualifier de drame national, le Chef de l'Etat ne se doit-il pourtant pas d'endosser la douleur de la nation, s'adresser à ses compatriotes des paroles de compassion et d'apaisement, et se recueillir au nom du peuple tout entier sur les lieux de la catastrophe. C'est ce que les Camerounais attendent de vous. Faites donc ce geste simple, Monsieur le Président de la République, pour répondre il leurs souhaits. Allez enfin à Eséka. La dignité, l'émotion de tout un pays l'exigent. 

Les Camerounais attendent aussi de vous la vérité. Par décret du 25 octobre, vous avez créé une commission d'enquête sur les circonstances de l'accident. Mais vous avez décidé qu'y siègeraient uniquement des membres de votre gouvernement. Comment, dès lors, cette commission pourrait-elle faire preuve de l'impartialité et de l'indépendance requises en de telles circonstances ? Comment vos ministres pourraient-ils établir en toute transparence les possibles responsabilités de l'Etat? Comment pourraient-ils même établir les responsabilités probables du concessionnaire, la société Camrail, à laquelle l'Etat est lié par des Intérêts communs ? Et cela en seulement 30 jours, soit le délai dérisoire qui lui a été accordé pour mener ses investigations?

Les Camerounais ne s'y trompent pas, Monsieur le Président de la République: ils savent bien que de celle commission d'enquête ne pourra pas sortir la vérité pleine et entière sur l'accident d'Eseka. Or cette vérité, ils veulent la connaitre. Ils veulent savoir selon quels mécanismes un enchainement de déficiences et de dysfonctionnements multiples a pu conduire à cette horreur. Vous leur devez donc d'assurer l'indépendance de cette commission d'enquête en l'élargissant à des membres de le société civile, ingénieurs de haut rang, scientifiques éminents, juristes, anciens officiers supérieurs, anciens ministres, médecins. Seuls des enquêteurs aux intérêts non alignés seront à même de tirer des conclusions crédibles. Notre pays n'en manque pas. Donnez-leur l'occasion de faire preuve de leurs compétences el de leur expérience. Donnez ainsi aux Camerounais la possibilité de connaître toute ta vérité sur ce drame. Alors, seulement, ils pourront commencer à faire leur deuil.

 

 
Sachez enfin, Monsieur le Président de la République, que les Camerounais ont bien conscience que le funeste événement d'Eséka n'est pas un pur accident. Le hasard, ou plutôt la malchance, a bien sûr joué son rôle. Mais elle s'est engouffrée dans une série de brèches complaisamment ouvertes par l'incurie de votre administration. C'est parce que la route reliant les deux principales villes de notre pays s'est brutalement trouvée coupée, en raison d'un entretien insuffisant, qu'on a dans la précipitation entassé des voyageurs dans un train, au mepris des règles de sécurité les plus élémentaires. C'est parce que l'hôpital d'Eséka manquait cruellement de médicaments et de lits que les blessés ont du être acheminés, dans les conditions les plus éprouvantes et les plus critiques pour leur survie, vers les hôpitaux de Douala et Yaoundé. Si les infrastructures routières et ferroviaires de notre pays n'étaient pas aussi vétustes et défaillantes, Monsieur le Président de la République, ce drame aurait pu ètre évité. Si nos infrastructures de santé n'étaient pas aussi précaires, les blessés auraient pu être pris en charge plus efficacement et plus dignement. 

Parmi les leçons que nous enseigne, au prix de telles souffrances, ce terrible accident, figure donc en premier lieu l'urgence à engager un programme massif d'investissement dans les infrastructures de noire pays, Lorsque j'étais secrétaire général à la Présidence, et après cela ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, j'ai sans relâche tenté de vous en convaincre. En vain: vous n'avez engagé dans ce domaine qu'une série de plans d'urgence qui furent autant de cautères sur une jambe de Dois. Le drame d'Eséka, dont le souvenir ne devra jamais s'éteindre, interdit désormais aux responsables de ce pays de tergiverser davantage. L'heure est venue pour la Cameroun de se transformer enfin en un Etat aux infrastructures modernes et à l’administration efficace et responsable, l’heure est venue pour des dirigeants qui se mettent vraiment à l'écoute du peuple camerounais, et eu service du Cameroun, Le drame d'Eséka a déclenché une onde de choc chez nos concitoyens. Ceux qui restent sourds à cette déflagration ont perdu tout contact avec le peuple.

Marafa Hamidou Yaya

 


31/10/2016
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