Les confidences de G. R. Belinga

Cameroun : Les confidences de G. R. BelingaGilles-Roger Belinga séjourne depuis lundi 5 novembre à l’infirmerie du camp deYeyap. Il en a pour une semaine. C’est dans une salle située à 100 m de l’entrée principale que nous le rencontrons ce 08 novembre. Il est 16h. Allongé sur un lit, l’ex-Dg de la Sic reçoit une perfusion. Il arbore un short de couleur bleu, usé par le temps. Ses cheveux et sa moustache ébouriffés montrent qu’il y a un moment qu’il ne s’est pas rasé.

L’une de ses filles, qui l’assiste, hésite à laisser un journaliste parler au malade. « Vous venez tout simplement le saluer ? », demande-t-elle. L'ancien directeur général, lui, esquisse un sourire, signe d’espoir. « Je souffre depuis plusieurs semaines d’un accès palustre. Ma peau était devenue jaune. Je dois remercier Mme le colonel qui a permis que je sois interné dans cette infirmerie.

Sans elle, je serais déjà mort. Je commence à peine à me remettre », indique-t-il. Il parlera ensuite de ses onze années passées à la tête de la Sic et invite à relire Cameroon Tribune du 18 mars 1991 qui titrait « l’habitat social dans les faits ». On a été obligé de baisser les prix des logements pour s’adapter au Camerounais moyen, affirme- t-il. Mais de nos jours, lâche-t-il, « il y a une confusion générale avec ceux qui gèrent les biens publics». Malgré sa santé dégradante, il essaye de prendre son lap-top. Il est aidé par l’un de ses proches. Il ouvre les dossiers relatifs à sa défense. Il les revisite d’un bout à l’autre avec le reporter du Jour et les commente simultanément.

Le statut de la Sic

On apprend qu’il a été condamné le 17 mars 2012. « Cependant, on ne sait pas où se trouve le dossier jusqu’à ce jour. Nous avons été arrêtés sans le moindre acte juridictionnel, sans mandat d’arrêt, ni convocation du procureur de la République, ni plainte préalable.On s’est fait interroger par le ministère public en violation du principe contradictoire. Je suis prêt à tout moment, si on m’appelle au Tribunal criminel spécial», lance-t-il. Condamné à 20 ans d’emprisonnement, il pense qu’on doit absolument tenir compte des statuts particuliers de la Sic.

C’est une société d’économie mixte créée par l’administration coloniale, elle ne saurait de ce fait être assimilée à une entreprise publique. Ce n’est qu’à partir de 1976 à 1991 que l’Etat du Cameroun a commencé à s’intéresser aux logements, révèle- t-il. Une fois les colons partis en 1990, date du départ de l’ancien administrateur Lévy, il a dû entreprendre la modernisation de la Sic. La Sic n’a jamais eu de comptable matières, avoue-t-il, et ne saurait être soumise au régime financier de l’Etat. « Est-ce que la société est légalement constituée ? La Cour a-t-elle le droit d’appliquer les articles du patrimoine public au patrimoine privé ? L’Etat du Cameroun a-t-il payé ses souscripteurs ? », demande-t-il.

Pour Gilles-Roger Belinga, la Sic n’a jamais joui d’avantages particuliers. Elle compte, explique- t-il, parmi ses actionnaires, le Crédit foncier, la Bicec et la Méridien Biao. « C’est donc là la pierre d’achoppement », lâche-t-il. L’arrêt attaqué l’avait déclaré coupable de détournement de 13 millions de Fcfa. Il a regretté que le témoin de l’accusation, Mendouga Alima, ne lui ait jamais adressé une lettre d’information ni d’explication. Les différents agents de la Sic interpellés dans le cadre du même problème ont été libérés : « On peut me reprocher d’avoir duré à la Sic (16 ans) mais qu’on ne me dise pas que j’ai mal travaillé ou volé.

Magistrats mal formés

L’autre aspect regrettable de toutes les procédures en cours, c’est la formation des magistrats. Ils ne sont pas formés pour la gestion. Toutes les sessions budgétaires laissant apparaître la régularité des opérations entreprises à la Sic ont été validées par le conseil d’administration. On a toujours donné quitus au conseil de gestion et non au directeur général. Il faut aussi remarquer que les dates des bons de caisse du tableau de l’expert et du ministère public sont discordantes ».

Gilles-Roger Belinga a été condamné le 27 septembre 2007 à 35 ans de prison ferme et à payer 03 milliards de Fcfa à l'Etat du Cameroun. Après avoir interjeté appel, sa peine a été réduite à 20 ans de prison ferme et l'amende ramenée à 233 millions FCfa. L'ex-Dg de la Sic s’est à nouveau pourvu en cassation auprès de la Cour suprême, dont la décision n'a pas encore été rendue. Ce sera au Tcs de se prononcer. Interpellé le 26 février 2006, Gilles-Roger Belinga séjourne depuis lors dans les geôles du secrétariat d'Etat à la Défense (Sed) à Yaoundé. Il était poursuivi pour détournement de deniers publics chiffrés au départ à 1,9 milliard de FCfa.

© Le Jour : Jean-Philippe Nguemeta


18/11/2012
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