Les aéroports du Cameroun pas toujours compétitifs

 

Cameroun : Les aéroports du Cameroun pas toujours compétitifs::cameroonLa 3è édition du Bulletin Statistique de la Cameroon Civil Aviation Authority dévoile les statistiques sur le transport aérien au Cameroun. Intéressant lorsqu’on sait que le dernier classement établi par le Conseil international des aéroports sur lequel s’était appuyé le magazine panafricain, Jeune Afrique pour publier un article dans son édition du 5 octobre 2013, sur l’avenir des infrastructures aéroportuaires, est évocateur du retard qu’accuse le Cameroun en la matière. 

 

I- La Ccaa joue la carte de la transparence

LE CLASSEMENT 2013 des aéroports internationaux publié par le Conseil international des aéroports (Airport Council International – ACI) n’avait classé aucun aéroport du Cameroun parmi les 50 meilleurs  d’Afrique au regard des données de 2012. Ce qui dénotait soit du manque de transparence des autorités en charge de l’aéronautique, soit du retard criard que le Cameroun observe dans l’amélioration de la qualité de ses infrastructures aéroportuaires, aéronautiques et dans la qualité du service. Puisque le classement ACI s’appuie des données fournies par les autorités nationales en charge de la gestion des infrastructures aéroportuaires. 

Notamment les éléments chiffrés sur une trentaine d’aspects soigneusement et rigoureusement recueillis. On peut citer entre autres : 

  • les mouvements d’aviation,
  • les passagers commerciaux, 
  • les passagers en transit direct, 
  • Fret et poste, - le trafic domestique,
  • le trafic international, 
  • le ou les événements ayant affecté le trafic durant la période du rapport…

Comment ne pas y voir une volonté des autorités en charge de l’aviation civile nationale répondre de manière efficiente à cette exigence de transparence de l’ACI afin de voir enfin les aéroports du Cameroun figurer dans ce classement. Surtout au moment où le ministre des Transports vient de faire passer l’aéroport de Maroua au statut d’aéroport international. Augmentant ainsi le nombre d’aéroports internationaux de 3 à 4. Ainsi, la 3è édition du Bulletin Statistique de l’Autorité de l’aéronautique civile nationale (Ccaa) révèle que les mouvements d’aéronefs effectuant les vols réguliers commerciaux sur les trois aéroports internationaux (Douala, Yaoundé et Garoua) ont enregistré une croissance soutenue entre 2012 et 2013. En 2013. La croissance desdits mouvements en valeur relative est de 16% sur la plateforme de Douala, 12,2% sur Garoua et 20,8% sur l’aéroport de Yaoundé-Nsimalen. Pour la Ccaa, «Ces résultats trouvent leur explication dans l’augmentation générale du taux de croissance enregistré ces dernières années par les économies des pays africains.» 

«Cette embellie économique s’est donc traduite mécaniquement en 2013 sur les platesformes aéroportuaires par l’augmentation des fréquences de vols (mouvements) de certaines compagnies aériennes telles (Camairco, Kenya Airways, Brussels Airlines et Turkish Airlines)», affirme la Ccaa. Cette embellie est également perceptible à travers les mouvements des vols commerciaux, lesquels ont enregistré en 2013 une progression de 33,9% au niveau national à l’aéroport international de Douala, par rapport à la même période en 2012. Cette augmentation est de 0,2% pour les vols Cemac et de 24% pour les vols Internationaux sur la même plate-forme. La même tendance haussière est observée à l’aéroport international de Yaoundé-Nsimalen indique ledit Bulletin statistique. Seulement on peut constater que ces résultats sont incomplets lorsqu’il s’agit des données des aéroports de Garoua, Maroua- Salak et Ngaoundéré. «Ils traduisent le caractère incomplet des données transmises par lesdites plates-formes aéroportuaires», soulignent les autorités de la Ccaa. 

 

Tout comme les données fret publiées qui sont incomplètes, pourtant déterminantes dans les indicateurs qui entrent en compte dans le classement des aéroports internationaux. Pour ce qui est des résultats du survol, les chiffres publiés par la Ccaa indiquent que le trafic aérien passager est demeuré très favorablement. Ainsi la fréquentation des aéroports camerounais est en 2013 supérieure de 10% à celle de 2012. Par exemple à l’aéroport de Douala, la croissance est portée par l’essor du trafic international (9%) et surtout par l’évolution du marché national (29%). Cette configuration est tout autre à l’aéroport de Yaoundé-Nsimalen, où la croissance est uniquement portée par l’essor du trafic international. Le trafic des passagers en transit obéit à la même dynamique, (18%) de croissance en 2013 par rapport à l’année 2012 à l’aéroport de Douala, et avec une amplitude renforcée à Yaoundé-Nsimalen (117%) en raison de la meilleure prise en compte des données sur le transit en 2013. Ce journal révèle alors que la tendance du marché Cemac est affectée en 2013 par l’interruption de la desserte de Ndjamena, Malabo et Bangui par la compagnie Camair-Co, (- 8%) de/vers l’aéroport de Douala et (2%) de/vers Yaoundé-Nsimalen.  

 

II- Impacts des compagnies aériennes nationales et internationales

De manière plus spécifique, la progression du trafic continue de profiter très inégalement aux quatre aéroports fonctionnels. Ainsi 43% du trafic passager domestique et 72% du trafic international sont assurés par l’aéroport de Douala. A l’inverse, Yaoundé-Nsimalen a traité 37% du trafic domestique en 2013 et 27% du trafic international. L’aéroport de Garoua pour sa part a 11% du trafic domestique et 01% du trafic international et l’aéroport de Maroua-Salak 09%) du trafic domestique et 00% du trafic international. Ces deux se partagent la portion congrue du trafic aérien au Cameroun. 

 

Ce qui n’a pas empêché le ministère des Transports de l’ériger en aéroport international. Cependant ces données montrent que la part du trafic international réalisée par l’aéroport de Yaoundé–Nsimalen est en progression, de (24%) en 2012, elle se situe à (27%) en 2013. Il en résulte que l’aéroport de Douala qui abritait (75%) du trafic international en 2012, a cédé du terrain sur ce segment en 2013, avec (72%) de part de trafic, au profit de l’aéroport de Yaoundé-Nsimalen qui au fil des années, consolide sa position de deuxième plateforme aéroportuaire du Cameroun. 

 

«Cette progression s’explique par l’attractivité montante de la desserte de l’aéroport de Yaoundé-Nsi auprès des compagnies arrivant sur le marché», soulignes les dirigeants de la Ccaa. Ce qui confirme que comme les années précédentes, les plates-formes de Douala et Yaoundé-Nsimalen animent le marché aérien du transport. Il faut mettre cela sur le compte de l’effet des périodes de vacances (juillet, août et septembre) et des fêtes de fin d’années (décembre) ont été une fois encore favorables au trafic international. A l’analyse, les résultats du trafic régulier commercial sus reportés traduisent la reprise de la desserte de l’aéroport de Ngaoundéré par la compagnie Camair-Co, dix ans après la cessation de la déserte dudit aéroport par la défunte Cameroon Airllines. Ces résultats en croissance expriment l’existence d’une demande réelle de transport aérien de/vers la région de l’Adamaoua. Il en est de même à l’aéroport de Douala, entre 2012 et 2013, où la hausse du trafic passager de Camair-co se vérifie au niveau interafricain et de/vers CDG (17%). Mais aussi et surtout au niveau national avec un taux de 25%. Cette tendance est nettement observée dans le même segment à l’aéroport de Yaoundé-Nsimalen qui affiche un différentiel de croissance de 58% pour les mouvements d’aéronefs et de 52% pour les passagers entre 2012 et 2013. 

 

En revanche, celle des autres compagnies aériennes a été tout aussi déterminante dans cette embellie. Puisqu’elles en ont tiré profit. La preuve, le Bulletin statistique de la Ccaa indique «la progression du trafic continue de profiter très inégalement aux transporteurs européens (Air France, Brussels Airlines) qui renforcent leur capacité (fréquence de vols) au fil des ans.» Cependant, on note un différentiel de croissance en défaveur du pavillon français (-3%), à la différence du pavillon belge dont le différentiel de croissance est de (18%). Pour les compagnies africaines, exception faite de Asky Airlines dont le trafic passager connait une progression de +10% et de Ceiba International de +47%, qui se distinguent tant par la croissance de leurs mouvements que celle de leur trafic passager, la quasitotalité des pavillons africains a enregistré une progression régressive de ces indicateurs entre 2012 et 2013 : Kenya Airways (-17%), Royal Air Maroc (-24%), Sénégal Airlines (-25), South Africa Airways (-9%). 

 

En somme, il ressort que le transport aérien au Cameroun a connu une embellie entre 2012 et 2013. Une embellie qui pourrait se poursuivre, lorsqu’on sait les prévisions des instituts financières de Breton Wood sont favorables pour l’économie africaine dans les prochaines années avec un taux de croissance pouvant aller chercher dans les deux, il ne fait aucun doute que le secteur du transport aérien va compter dans cette bonne santé. D’ailleurs, la Fond Monétaire International (FMI) annonce un rythme d’une croissance 5,5% à moyen terme (au cours des cinq prochaines années). Selon la Banque Africaine de développement (BAD), vingt six (26) pays africains sont déjà des pays à revenu intermédiaire, avec un revenu par habitant supérieur à 1000 dollars (environ 550 000 Fcfa). 

 

III- Les aéroports camerounais toujours en déça du million de passagers de trafic

ON ESPÈRE AINSI que dans le classement ACI de 2014 qui portera sur les données de 2013, au moins l’un des trois aéroports internationaux camerounais déclaré en cette année va figurer en bonne place. Car le classement mondial de 2012 fait remarquer que les 10 premiers aéroports du continent sont ceux qui ont enregistré un trafic moyen de 5 millions de passagers. L’Afrique du Sud avait rempilé à la première place et y avait classé deux aéroports, il s’agit de l’aéroport OR Tambo de Johannesburg (Afrique du Sud) avec 18,8 millions de passagers qui vient en première position et celui de Cap Town International avec 8,5 millions qui occupe la 3è position. Le Maghreb y aligne 7 aéroports.

L’Egypte qui sortait difficilement du printemps arabe s’en était tiré avec la part du lion en alignant trois de ses aéroports : - l’aéroport International du Caire (Egypte) avec 14,8 millions de passagers qui vient en 2è position ; ceux aussi internationaux d’Hurghada avec 7,1 millions passagers, et de Sharm El Sheikh avec 6,6 millions de passagers, qui occupaient respectivement les 6è et 7è positions. Le Maroc occupe la 5è position avec l’aéroport international Mohammed V de Casablanca avec 7,2 millions de passagers ; - en 9è position l’aéroport international Houari Boumédiène à Alger (Algérie) avec 5,4 millions passagers ; - et en 10è position l’aéroport de Carthage à Tunis (Tunisie) avec 5,3 millions de passagers. 

Les pays d’Afrique subsaharien excepté l’Afrique du Sud se contentent toujours du menu fretin avec deux aéroports, celui de Murtala Muhammed à Lagos (Nigeria) avec 7,2 millions passagers qui occupait la 4è position et celui de Jomo Kenyatta à Nairobi (Kenya) avec 6,3 millions de passagers qui occupait la 8è position. En Afrique centrale, l’aéroport international de Brazzaville (Congo) avec 957 472 passagers occupait le 30ème rang ; juste derrière celui de Felix Houphouët Boigny d’Abidjan (Cote d’ivoire). Tandis que celui de Léon Mba à Libreville (Gabon) avec 839.571 passagers occupe le 33ème rang ; derrière celui d’Antanarivo (Madagascar). Celui de Bamako au Mali occupe le 45è rang et celui de Cotonou au Bénin occupe le 50è rang. 

 

Le Cameroun, nous le disions plus haut n’avait pas pu aligner un seul de ses aéroports internationaux dans ce Top 50 les deux dernières années (2011 et 2012). Et on se demandait qu’en serait-il en 2013 ? On peut de manière plausible répondre au regard des chiffres contenus dans ce 3è bulletin statistique de la Ccaa. En disant de manière péremptoire qu’une fois de plus le Cameroun ne pourra pas entrer dans le Top 50. Car l’aéroport de Douala qui fait le meilleur trafic au Cameroun n’a enregistré qu’un trafic global de 745 286. Faisant partie des 84% aéroports africains qui drainent un trafic inférieur à un million de passagers, alors que cette proportion est de 58,7% en moyenne dans le reste du monde. 

 

Toutefois, loin des chiffres effectués par l’aéroport Léon Mba de Libreville, mais proche de des aéroports de Bamako au mali et Cotonou au Benin. Or lorsqu’on sait que ces pays ont développé une certaine attractivité de la destination de leur pays aussi bien sur le plan touristique qu’économique, il est évident qu’ils vont tirer le meilleur partie de cette embellie de l’économie africaine. Surtout que les enlèvements répétitifs des européens dans le nord du Cameroun qui regorge les meilleurs sites touristiques ne sont plus fréquentables au regard de l’insécurité qui y prévaut. Surtout que les missions diplomatiques européennes ont placé le Grand Nord comme étant une zone rouge pour toute présence de leurs ressortissants depuis 2012. C’est dire que le gouvernement a du pain sur la planche. Et les différents départements ministériels concernés par ce faible trafic passagers et fret devront déployer des stratégies et des opérations efficaces et efficientes pour tirer vers faire croitre les données camerounaises. 

Mais tout porte à croire que le miracle ne va pas se produire de sitôt au regard de la qualité des infrastructures aéroportuaires du Cameroun. L’entretien de ceux existant est lamentable. Le tarmac de l’aéroport de Douala est jonché de nids de poules et dos d’ânes. Démontrant la mauvaise qualité des travaux effectués. Pour y faire face les aménagements aéroportuaires devraient suivre auquel cas cette légère embellie risque d’être plombée en plein vol. Parmi les facteurs rétrogrades on cite la confiscation de la gestion des aéroports africains dans le giron du secteur public parce qu’ils sont plus considérés comme une vache à lait qu’un vecteur de croissance. 

© Aurore Plus : Mathieu Nathanaël Njog 


28/04/2014
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