Législatives et municipales: Le Rdpc revient aux méthodes du parti unique

Douala, 05 Juillet 2013
© Aurore Plus

Le Secrétariat général du Rdpc a-t-il forcé la main au Président national du parti, Paul Biya, en imposant les investitures au lieu des primaires voulues par la base

I- L'exhumation de l'Unc?

Même si l’article 2 des dispositions générales du règlement intérieur du Rdpc dans son alinéa 2 précise que les investitures peuvent se faire «sur la base des critères de compétence, de militantisme, d'efficacité, d'abnégation, de moralité, de patriotisme, de loyalisme envers les institutions de la République et du parti», le parti aurait gagné en organisant des primaires dans ce scrutin, législatives/municipales. Mais au lieu de se moderniser, comme la plupart des partis dans le monde qui choisissent les primaires, le Rdpc rampe plutôt à contre-courant. Il pratique à outrance ou plutôt c’est un adepte de la danse Bafia «un pas en avant et deux pas en arrière» au grand dam des modernistes et des militants de base qui eux, veulent l'organisation des primaires pour le choix des candidats de ce parti aux législatives et aux municipales qui auront lieu le lundi 30 septembre 2013.

En procédant de la sorte le Secrétariat général du parti et d'autres cadres du Rdpc qui sont derrière ce plan, nous font revivre l'ère Ahmadou Ahidjo avec son parti unique l'Union nationale camerounaise (Unc) où l'investiture était de mise. Le Rdpc n'est-il donc pas ce parti de nostalgiques, des gens d'une autre époque révolue qui font semblant d'être avec le Président national du parti mais qui freinent des quatre fers pour que le parti ne s’engage pas dans la voie de la modernisation. En France par exemple, le parti socialiste avait procédé à des primaires opposant les candidats des différentes tendances, pour tirer finalement François Hollande qui est devenu Président des français. Aujourd'hui l'Ump est en train de lui emboiter pour l'élection présidentielle de 2017.

Le Rdpc n'est donc pas un parti de progrès même si son Chef Paul Biya a des velléités d'ouverture de temps en temps. N'avait-il pas déclaré au début des années 1990 à l'aube du multipartisme quand le climat politique était lourd, tendu cette phrase aux militants de son parti: «préparez-vous à la concurrence» c'était la concurrence au sein du parti, c'est-à-dire les primaires pour désigner les candidats du parti à diverses consultations populaires. Le chef n'a pas été compris ni suivi et le Rdpc est donc resté un parti fossilisé dans son essence même.


Absence de démocratie

Est-ce que les commissions qui vont descendre dans les communes, les arrondissements, les départements et les régions vont travailler en toute impartialité comme semble vouloir le démontrer l'article 2, alinéa que nous avons cité plus haut? Ça n'est pas évident. Il est vrai que ceux qui sont les adeptes des investitures ont un argument de poids, massue c'est qu’on ne peut pas en 15 jours organiser de vraies primaires, le temps imparti était court. La position du Ministre de l'Enseignement supérieur, Jacques Fame Ndongo et par ailleurs Secrétaire à la Communication du Secrétariat général du Rdpc est sincère, honnête quand il déclare dans l'Action journal de propagande du parti au pouvoir n°905 du mercredi 3 millet 2013, page 5 qui était introuvable ce même jour; «au plan régional, voire des élections plus réduits, des équipes du Rdpc sillonneront le terrain pour rassurer, convaincre, séduire. Elles présenteront aux électeurs les candidats investis par le Rdpc (des militants convaincus, convaincants, crédibles, patriotes et honnêtes).

Est-ce qu'on appelle «consolidation de la démocratie», comme il le déclare péremptoirement à la fin du premier paragraphe de son interview? Que nenni! La démocratie selon le bon sens aurait été d'organiser des primaires afin que des militants choisissent librement, sans pression ni contrainte aucune, ceux qui vont les représenter le 30 septembre 2013.


II- Paul Biya induit en erreur Jean Nkuété et Cie

Assurément, le Président Paul Biya est mal entouré et mal conseillé. Ceux qui l'entourent dans le cadre de son parti ne sont pas avec lui, ils sont là pour leurs propres intérêts non pour ses beaux yeux. Combien Jean Nkuété et Cie vont-ils récolter dans cette opération d'investiture, financièrement bien entendu. Du temps où Joseph Charles Doumba et René Sadi étaient Secrétaires du comité central du Rdpc et bien avant eux, les choses étaient bien huilées et à peine cachées. On connaissait les hommes et les femmes de ces Secrétaires généraux, chargés des descentes sur le terrain pour récolter la manne financière. Parfois ces missionnaires, d'un genre particulier n'avaient pas besoin de se déplacer, l'argent venait les trouver sur place, à leur bureau et domicile. Le poste de secrétaire général du Rdpc est un piège à argent pour qui le détient, c'est une vice-présidence de fait de l'Etat camerounais.

Au lieu de bien conseiller le Président du parti, de lui souffler à l'oreille à défaut de le faire bruyamment que le Rdpc sortirait grandi s'il organisait les primaires, il lui ont proposé la formule d'investiture qui les arrange bien car, ils vont mettre sans hésiter les noms de leurs amis, membres de familles, condisciples et autre membres de sectes étrangères qui pullulent dans notre pays. C'est ainsi qu'on verra des parfaits inconnus des militants les représenter dans ces législatives (surtout) et municipales.


Les conséquences

Elles ne seront pas très graves en ce sens que même si le Rdpc va perdre quelques plumes, quelques sièges, il restera le parti dominant Il n'aura plus 154 députés comme dans la législature qui est en train de s'achever. Ce qui est sûr, le Rdpc l'emporter avec plus des deux tiers de députés et pourrait même pousser son score à 40 députés sur les 180 que compte l'Assemblée nationale. La base du Rdpc va grogner certes, mais compte tenu des enjeux, elle va voter pour ses candidats. C'est ce qu'elle fait pratiquement ces dernières années à toutes les consultations électorales. Ne l'a-t-elle pas fait lors de la présidentielle d'octobre 2011. On disait qu'il y avait des mécontents contre Paul Biya, mais à la fin il l'a emporté haut la main. Les conséquences pour le Rdpc seront essentiellement politiques: la perte de l'aura du parti au profit d'autres formations politiques jusque-là peu connues comme le Mrc du Pr Maurice Kamto. Nous ne croyons pas à ceux des militants du Rdpc qui disent qu'ils vont voter pour certains partis dans le but de punir le leur pour cause d'investiture.


III- Les cas Marafa et Iya Mohammed

Mais seulement l'incarcération de l'ancien Ministre d'état en charge de l'administration territoriale et de la décentralisation et celle plus récente de Iya Mohammed, ancien Directeur Général de la Sodecoton et ex-Président de la Fécafoot, peuvent favoriser l'Undp du Ministre d'Etat Bello Bouba Maïgari dans le Nord (sauf le Mayo Rey acquis au Rdpc) en général et dans le département de la Bénoué en particulier d'où il est originaire tout comme Marafa. Dans l'actuelle législature, l'Undp a 3 députés dans la région du Nord dont I dans la Bénoué contre 3 pour le Rdpc et 2 dans le Mayo Louti contre 2 pour le Rdpc. Il est donc possible que l'Undp obtienne 2 pour 3 sièges dans la Bénoué. Les responsables locaux du Rdpc tout comme les membres de l'élite résidant à Yaoundé et Douala tel le Secrétaire d'Etat à la santé publique et lamido de Garoua et la famille Fadil auront fort à faire, du pain sur la planche au cours de ce double scrutin législatif et municipal.

Le Front national pour le salut du Cameroun (Fsnc) du Ministre de la communication Issa Tchiroma Bakary, un allié alimentaire ou de circonstance de Paul Biya n'a pas la capacité de contrer l'Undp si Marafa et Iya Mohammed demandent de ne pas voter pour le Rdpc. Le Mrc dont le coordonnateur n'est autre que Dakole Daïssala va présenter des candidats dans le Grand Nord en général et l’Extrême Nord en particulier.

Maintenant, qu'il est devenu sénateur nommé par Paul Biya, son parti va-t-il se présenter à ce double scrutin?


IV- Le duel Kontchou-Kamto?

Voilà deux agrégés de sciences politiques issus d'un même terroir: Baham. L'un, Kontchou est du Rdpc tandis que l'autre du Mrc. Ils vont s'affronter sur le terrain par populations interposées et on verra ce qui sortira des urnes au soir du 30 septembre 2013. Maurice Kamto, ancien Ministre délégué à la justice est sur le terrain depuis le début de cette année. On l'a vu à Douala, à Yaoundé et chez lui à Baham où la salle du foyer municipal qui lui avait été promise le samedi 23 février 2013 pour un meeting, n'était plus disponible à son arrivée sur les lieux parce que fermée à double tour. Pendant la même période à Douala, le Président du Mrc avait fait le tour de Douala le 20 février 2013: marché Ndogpassi, Cité Sic, Bonabéri, Bonamoussadi, Bépanda, etc. Qui va affronter l'ancien Ministre à Baham? L'actuel Député Benjamin Sonké, le Pr Augustin Kontchou Kouomegne, le Président de la section Rdpc Didier Kamdem ou le Conseiller spécial du Président de la République, Luc Sindjoun? Nous le saurons dans quelques jours.


V- Le Sdf et l'Udc donnent la leçon au Rdpc

Même si tout ne va pas pour le mieux dans le meilleur des mondes au Sdf de Ni John Fru Ndi et l'Udc de Adamou Ndam Njoya, ces deux leaders on fait semblant d'organiser des primaires dans leur parti. C'est une leçon de démocratie qu'ils donnent à Paul Biya et au Rdpc même si le chairman du Sdf veut parachuter son vice-président Oshi dans une des circonscriptions électorales du Wouri. A l'Udc, on croit dur comme fer que le parti qui détient quatre sièges de députés sur les cinq que compte le département du Noun, région de l'Ouest, va récupérer l'autre siège qui est entre les mains du Rdpc tout comme il veut également prendre toutes les mairies de ce département dont une lui échappe. Au Sdf, on rêve de prendre au moins 15 sièges de députés sur les 90 que compte le Nord-Ouest. Actuellement le Sdf en compte seulement 11 (loin des 19 qu'il comptait entre 2002 et 2007) contre 9 au Rdpc. De même le Sdf a des visées claires sur la région où il a sept sénateurs élus: Et ses chances ne sont pas négligées même si Paul Biya a nommé comme Président du Sénat, un fils de la région, Marcel Niat Njifenji.

L'Undp a son député dans le Grand Nord, pourra tenter d'améliorer ou maintenir ce nombre? Cela n'est pas sûr car, le parti est en perte de vitesse, ce qui pourrait faire l'affaire du Rdpc.


06/07/2013
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