Le soutien à Marafa – Reflet de la lassitude et du désespoir d’un peuple

Genève (Suisse), le 19 Octobre 2012
© Simon-Pierre TEGANG | Correspondance

Dans son communiqué du 06 Juin 2004, le Secrétaire Général de la Présidence de la République Jean-Marie Atangana Mebara démentait les rumeurs relatives au décès du Chef de l’Etat, Président de la République, son Excellence Paul Biya. Il achevait ce démenti par ces mots « le Chef de l’Etat est actuellement en Europe où il effectue un bref séjour Privé. Il regagnera le Cameroun dans les prochains jours ».

Le soutien à Marafa – Reflet de la lassitude et du désespoir d’un peuple

Dans son communiqué du 06 Juin 2004, le Secrétaire Général de la Présidence de la République Jean-Marie Atangana Mebara démentait les rumeurs relatives au décès du Chef de l’Etat, Président de la République, son Excellence Paul Biya. Il achevait ce démenti par ces mots « le Chef de l’Etat est actuellement en Europe où il effectue un bref séjour Privé. Il regagnera le Cameroun dans les prochains jours ».

Effectivement, le 09 Juin 2004, Paul Biya fut accueilli par une foule immense à l'aéroport de Yaoundé où, il lança, semble-t-il le défi « je vous donne encore 20 ans ». Par ces quelques mots défiants, il passait aussi le message non seulement qu’il vivrait encore au moins 20 ans, mais qu’il resterait au pouvoir encore au moins 20 ans. Mathématiquement, il aurait donc encore au moins 12 ans de règne à venir.

Au cours des huit années qui se sont écoulées de 2004 à ce jour, bon nombre de collaborateurs de choix du Prince ont été jetés en prison pour diverses raisons de mal gouvernance. Je m’abstiens de poser un jugement personnel, mais il serait de bon sens de se poser singulièrement la question de savoir si ceux-là qui depuis des décennies sont au pouvoir et le sont encore aujourd’hui, ont bel et bien adhérés aux principes de bonne gouvernance, ou alors conscients de leur forfaiture, ont juste su se taire et obéir obstinément aux élucubrations de Paul pour conserver leur place au soleil. Ainsi, si nous sommes leurs esclaves, eux, sont ceux du Prince qui les manie à sa guise et leur bravoure et ostentation dans la communauté se transforment en frilosité dès lors qu’ils sont en présence de leur Dieu humain et vivant. On se souvient bien des tremblements des joues de feu Fochivé, retransmis en direct à la CRTV quelques temps avant sa mort. On aurait dit une feuille de bananier subissant la dérive d’une tornade. Jean Fochivé, « dans l’imaginaire collectif camerounais, évoquera certainement à jamais les épisodes les plus tragiques de l’histoire politique du Cameroun indépendant ». Cet homme connu puissant et redouté, imaginez-vous, tremblait devant le Prince. Pour ceux qui ont connu cet homme, les hommes du pouvoir aujourd’hui ne seraient que des « gonzesses ». Si lui il tremblait, ceux d’aujourd’hui se coucheraient donc et se laisseraient marcher dessus. Y-a-t-il un seul d’entre eux qui me dirait le contraire ? Qu’il lève le doigt et rejoindra Marafa au gnouf. D’ailleurs, certains d’entre eux ne disent-il pas tout haut aujourd’hui que le « changement est déjà en cours sous Biya », ignorant par là le fait même que cette affirmation tardive indique implicitement l’absence de tout changement ou évolution positive de gouvernance durant au moins deux décennies car Il ne suffit pas de parler de « grandes ambitions » pour les avoir, comme il ne suffirait pas de rêver « des grandes réalisations » pour les réaliser. Il faut de la détermination, du courage et de la lucidité. Cette lucidité qui manque tant à nos borgnes dirigeants d’aujourd’hui qui de par leur forfaiture, ont choisi le silence et la soumission.

Et c’est là que Marafa Hamidou Yaya trouve toute sa place. De tous ses « illustres » collègues qui l’ont précédé dans ce nouveau gouvernement Camerounais d’un autre genre, il est sans doute le plus « balanceur ». Il se refuse de « mourir seul ». Il balance ses anciens complices, il dit ses combats positifs au gouvernement et tente de montrer son côté lucide, et même, fait croire à la gallérie qu’il allait souvent dans le sens contraire du vent. Mais remarquons qu’il ne nous dit point ses torts, là où il a agi dans le sens du vent pour nous piétiner. Il nous appelle à le porter au pouvoir, même par le biais de l’insurrection au travers d’un langage Orwellien « le soutien que je vous demande de m'apporter est un soutien moral. En aucun cas il ne doit favoriser, ni la violence, ni le trouble à l'ordre public» bien rodé, mais qui ne trompe que ceux qui ne peuvent lire entre les mots.

Les appels de Marafa à travers ses différentes lettres trouvent peu à peu l’assentiment d’un certain nombre de mes compatriotes, de toutes les couches sociales. La question fondamentale qui se pose à moi, est celle de savoir quel est le dénominateur commun de ces citoyens qui verraient en cet allié du diable, subitement reconverti, une possibilité de sortie, ou mieux une possibilité d’éviter au Prince de régner encore pendant au moins 12 années.

J’affirme que ce dénominateur commun n’est point, et en aucun cas, la vertu intrinsèque de Marafa. Voleur présumé ou pas, l’admiration que le peuple lui voue, et serait ‘prêt’ à le porter prématurément au pouvoir, n’est de mon point de vue, ni « paradoxal » ni « désespérant ». C’est tout simplement l’expression de la grande lassitude et désespoir de cette marmaille orpheline à la recherche d’un « Père de la nation », ce père qui de facto en congé permanent a néanmoins décidé un 09 Juin 2004, de régner encore pendant au moins 20 ans. Cette marmaille qui n’a plus de larmes pour pleurer ; cette marmaille dont les cris se sont bien souvent transformés en aboiements du chien près d’une caravane qui passe. Cette marmaille désespérée et attendant avec opportunisme le « Père » providentiel. Et tout dissident, quel qu’il soit du régime Biya serait admis à bras le corps, même si au demeurant, il deviendrait pire que le Prince dans un proche avenir.

En quoi sont-ils différents, ceux-là qui aujourd’hui sont prêt à porter Marafa au pouvoir du fait « qu’il parle au moins même s’il ne révèle pas grand-chose » de ceux-là qui étaient prêt à porter la Piro de Mbanga à la tête de l’Etat vers la fin des années quatre-vingt-dix, du fait qu’il chantait la misère du peuple et la trahison du pouvoir en place ? La Piro chantait et chantait bien, le peuple dansait et dansait bien. Mais en quoi la Piro était-il en même de diriger ce pays ? Corrélativement, Marafa, de par son exposition prolongée au pouvoir en place, nous parle avec véhémence et nous parle bien de ses tares. Il parle dans le sens de nos attentes, c’est-à-dire vilipender le régime. Mais en quoi ce Marafa serait-il mieux pour nous aujourd’hui qu’hier ? Cette question, il me semble, mérite que chacun de nous se la pose car si chacun des illustres prisonniers se mettaient à parler, nous aurons l’embarras du choix par ce qu’ils auront tous la même marchandise à nous vendre. Et le phénomène Marafa n’aura plus d’exclusivité.

Simon-Pierre TEGANG
Email : sptegang@outlook.com
Genève - Suisse





21/10/2012
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