Le pouvoir veut exclure Paul Ayah de l’Assemblée

Le mandat impératif a été introduit dans les lois régissant l’organisation des législatives et municipales.

Entre le ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, les services du Premier ministre et la présidence de la République, l’avant-projet de loi portant code électoral fait la navette.

Ce document qui doit encore être enrichi des règles encadrant la biométrie doit logiquement être déposé dans les prochains jours pour examen et adoption sur la table des députés.

Selon des sources proches de l’inspection générale chargée des questions électorales, la notion de mandat impératif a été introduite dans les textes fixant les conditions d’élection des députés à l’Assemblée nationale et des conseillers municipaux. Au nom de ce principe « tout député ou conseiller municipal qui démissionne ou qui est exclu de son parti ne peut plus siéger à l’Assemblée nationale ou au sein d’un Conseil municipal ».

Autrement dit, «au nom de ce principe, on n’est plus député de la nation, mais député d’un parti politique», analyse une source proche du dossier. Derrière cette disposition, en contradiction avec l’article 15, alinéas 2 et 3 de la Constitution, qui stipule que «chaque député représente l’ensemble de la nation.

Tout mandat impératif est nul », se cacherait «une démarche punitive à l’encontre député Paul Ayah Abine qui a démissionné du Rdpc le 3 janvier (mais qui siège toujours à l’Assemblée nationale, ndlr) avant de se porter candidat à la dernière élection présidentielle ». Une démarche que l’on prête volontiers à un haut cadre de la présidence de la République et à quelques stratèges tapis dans les services du Premier ministre, pour la plupart originaires de la région du Sud-Ouest, fief du député démissionnaire.

Constitution En effet, classé 5e sur 23 candidats avec un pourcentage de 1,26% à la dernière élection présidentielle, Paul Ayah Abine, chairman du people’s action party (Pap), constitue un «élément gênant» pour le bloc Rdpc à l’Assemblée nationale et plus encore pour l’élite du Sud-Ouest, qui jubile déjà à l’idée de le voir sur la touche.

Magistrat à la retraite, chef traditionnel d’Akwaya, cet élu s’est distingué lors de la législature en cours par son refus de voter pour la révision constitutionnelle en 2008, qui consacrait l’instauration de la « présidence à vie » dans la Loi fondamentale, sa démission de la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale et ses dénonciations (relayées par la presse) au sujet de la «gabegie» entretenue par le gouvernement à travers les missions fictives et avantages de carburants indus attribués aux fonctionnaires. «La loi ne prime pas sur la Constitution.

Or, la Constitution interdit le mandat impératif. Le problème chez nous, c’est que le Conseil constitutionnel n’est pas encore mis en place. Mais je pense que la Cour suprême (qui siège en lieu et place du Conseil constitutionnel, ndlr) va déclarer cette loi anticonstitutionnelle si elle est introduite au Parlement. En tout cas, si la Constitution est modifiée sur la disposition concernant le mandat impératif, je me plierai», philosophe Paul Ayah Abine.

A travers la disposition sur le mandat impératif, qui pourrait entraîner une modification de la Constitution, le pouvoir Rdpc veut surtout envoyer un signal fort aux députés et conseillers municipaux qui pourraient être piqués par le virus de la dissidence au moment où des enjeux majeurs se profilent à l’horizon.

Au cas où elle venait à être adoptée, cette disposition ne déplaira pas nécessairement à la hiérarchie du Social Democratic Front (Sdf) et même à celles des autres formations politiques représentées au Parlement et dans les Conseils municipaux, qui ont souvent de la peine à imposer la discipline du parti aux élus. Mais d’ici, on imagine déjà que les débats seront houleux sur cette question à la Commission des lois constitutionnelles, qui doit examiner le projet sur le code électoral.

Georges Alain Boyomo



09/03/2012
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