La vie et l’œuvre de Jean Bikoko Aladin

Le chanteur est décédé hier à Yaoundé

Sa dépouille a été transportée à la morgue de l’hôpital général.

Consternation, hier, jeudi, à l’hôpital central de Yaoundé, où Jean Bikoko Aladin a rendu l’âme. Admis dans la formation hospitalière un jour plus tôt,

le chanteur d’assiko est décédé après une opération chirurgicale. En attendant la levée, son corps repose actuellement à la morgue de l’hôpital général de Yaoundé. Dès l’annonce de la terrible nouvelle, parents, amis et hommes de médias se sont prostrés devant le service de réanimation où se trouvait la dépouille de Jean Bikoko Aladin. Sans quitter leurs perfusions et leurs pansements, certains malades sont également venus dire un ultime au revoir à l’artiste. « Mon époux se plaignait d’une douleur gastrique. A Eséka, où nous vivons, les médecins ont demandé de l’emmener à Yaoundé pour un meilleur suivi. Nous nous sommes rendus à l’hôpital central. A 4 h du matin, juste après l’intervention chirurgicale, l’administration de l’hôpital a exigé qu’on paye 80 000 Fcfa pour qu’il soit admis en réanimation. Nous ne les avions pas à l’instant, et ils l’ont laissé dans la salle d’hospitalisation où il a rendu l’âme », explique Jacqueline, l’épouse de Jean Bikoko Aladin. Son fils, homonyme du défunt, la soutient. Sa fille, Marcelline, une danseuse d’assiko très connue des milieux musicaux bassas, s’occupe du transport de la dépouille à la morgue. De temps en temps, elle répond au téléphone ou se retire pour pleurer. « Je ne sais pas où mettre la tête. Papa nous a laissé orphelins », dit-elle.  

Les démarches administratives terminées, le corps de Jean Bikoko Aladin est transporté à la morgue de l’hôpital général de Yaoundé. A l’intérieur du corbillard, on peut apercevoir le danseur Anaconda, un des fils spirituels du défunt.

Le véhicule qui s’avance est suivi par quelques artistes et promoteurs culturels. A l’annonce de la nouvelle, ils se sont aussi déportés à l’hôpital. La voie palpitante, le chanteur Kon Mbogol regrette que son père spirituel soit parti sans qu’il n’ait pu réaliser un duo avec lui. Il regrette aussi que celui-ci quitte ce monde sans avoir reçu une distinction du gouvernement camerounais. «A plusieurs occasions, de son vivant, Jean Bikoko Aladin a déploré d’être délaissé par les autorités de son pays», rapporte Kon Mbogol.

Cathy Yogo

Parcours : Sur les traces d’Albert Dikoumé

Aldin a commencé à gratter sur des guitares de fortune en ronce ou en bambou qu’il fabriquait lui-même.

Né à Eséka, une petite ville de la forêt équatoriale au Centre du Cameroun, Jean Bikoko Aladin tombe amoureux de la guitare en écoutant des artistes comme Henri Hiag, Massing et surtout Albert Dikoumé considéré comme l’un des précurseurs de l’assiko contemporain. Dès lors, il commence à gratter sur des guitares de fortune en ronce ou en bambou qu’il fabrique lui-même.

Installé plus tard à Song-Mbengue, Jean Bikoko Aladin travaille comme ouvrier le jour. La nuit, muni de sa guitare, il anime les cabarets et bars du village sans jamais percevoir son cachet perçu par son manager. Jean Bikoko Aladin rejoint Douala où il exercera de petits boulots de blanchisseur et de cuisinier… sans jamais perdre de vue la musique. Sa rencontre avec le virtuose de la guitare Alexandre Ekong, une grande vedette qui passe souvent à Radio Douala, va changer sa vie. Ce dernier lui explique les ficelles du showbiz et qu’il fallait être prêt à « remplir deux grands barils d’eau de puits » pour être invité à la radio. Aussitôt dit, l’ex cuisinier du forestier Bienes à Bonepoupa, se met à la tâche et va pour la première fois interpréter sur les ondes deux compositions aux lignes de guitare tournoyantes et chantées en bassa, sa langue: "Mbimba" (l’aura) et "Koo wada a man lolo"  (les petits pas du caneton). C’est le succès immédiat et le début d’une renommée nationale. Bientôt, le producteur Joseph Tamla du label Afrique Ambiance et l’ingénieur du son Samuel Mpoual le prennent sous leurs coupes. Quelques mois plus tard, ils produisent son premier 45 tours Mbimba / Koo wada a man lolo. Nous sommes à la fin des années 1950 et Jean Bikoko Aladin perçoit ses premiers droits d’auteur s’élevant à 300.000 Fcfa…Une fortune à l’époque.

Il partage la scène avec Manu Dibango
Encadré par ses producteurs qui voient en lui une future grande vedette, il commence à tourner dans les divers clubs du littoral, partageant même la scène avec Manu Dibango lors d’un mariage de la jet set camerounaise où il remporte un vif succès. A la suite de cette soirée mémorable, Jean Bikoko Aladin monte une formation orchestrale, Jean Bikoko & ses Hetlers, qu’il présentera au Wouri, l’unique salle de cinéma encore ouverte à Douala. Cet évènement lui rapportera 6.500.000 Fcfa et débouchera en 1962 sur un contrat avec le propriétaire du club Canne à Sucre à Edéa, Di Seppio, pour un cachet fixe mensuel de 35.000 Fcfa plus des primes sur les entrées. Son album, "Wanda ntet", paru en 1969 contribuera énormément à la diffusion de l’assiko sur la scène internationale.

Devenu la vedette de l’assiko, Jean Bikoko Aladin & ses Hetlers sont invités dans plusieurs pays d’Afrique et participent à nombre de manifestations officielles dont le Festival Culturel Panafricain d’Alger en 1969, l’année de la sortie de son 33T Wanda ntet, et le Festival des Arts Nègres de Lagos en 1977. Entre-temps, Jean Bikoko Aladin ouvre dans sa ville natale d’Eséka un bar restaurant auberge (1972), mais ce projet ne durera pas longtemps. Il assurera les premières parties des spectacles de  Tino Rossy et de Claude François en tournée au Cameroun et sera invité à dîner chez le couple Johnny Hallyday / Sylvie Vartan lors de sa venue en France.

Source : Afrisson
 

Musique : L’homme qui a modernisé l’assiko

Aladin y a introduit de la guitare électrique, la contrebasse et les tambours.

La dernière prestation télévisée de Jean Bikoko Aladin date de mai 2010.  Le chanteur  s’est produit sur le podium du palais des sports de Warda, à l’occasion du concert des Cinquantenaires. Aux côtés d’une pléiade d’autres artistes venus du Cameroun et de l’étranger : ceux de sa génération, comme Anne-Marie Nzié ; et des plus jeunes, comme X-Maleya. Malgré la fatigue perceptible sur son visage, le chanteur a soulevé la foule venue nombreuse.

Exceptionnellement, le père de l’assiko s’est fait accompagner à la guitare par un de ses poulains. Fatigué, il ne pouvait plus grincer cette guitare qu’il a tant aimée. Le chanteur, qui n’a pas pu tenir debout, était assis.
A Paris, les fans de Jean Bikoko Aladin ont également pu le voir pour la dernière fois, l’année dernière, il y a séjourné pendant quatre mois, pour une série de spectacles. «A l’occasion d’une réunion préparatoire du concert des Cinquantenaires, s’adressant à la ministre de la Culture, Ama Tutu Muna, il s’est plaint de mourir sans avoir une distinction. Il était mélancolique », explique un artiste.

Officiellement âgé de 76 ans, Jean Bikoko Aladin a donc dit au revoir à son public avant de partit pour l’au-delà. Il peut partir fier d’avoir modernisé l’assiko qui, il y a une trentaine d’années, se jouait en acoustique, avec des guitares sèches, des bouteilles et des fourchettes.  Aladin a innové en accélérant la rythmique avec l’introduction de la guitare électrique, la contrebasse et les tambours. Il y a aussi ajouté la danse. Aujourd’hui, il ne se passe plus une fête en pays bassa sans que l’on invite ses chanteurs dont les contorsions  sont appréciées du public.

Considéré par ses pairs comme un "sorcier de la guitare", ce monument de la musique a inspiré plusieurs artistes au Ca: Samson Chaud Gars, de regrettée mémoire,  Kon Mbogol, Asta Djimbé, Anny Gold, Défense,  Paul Balomog, Kilama, et bien d’autres encore…Certains de ses propres enfants font également de la musique. Aladine par exemple est très connue dans les milieux de la musique camerounaise.

A plus de 50 ans de carrière, Jean Bikoko Aladin laisse une immense discographie. Elle s’illustre nombreux titres dont les populaires plus populaire son "Di yanna", "Hiki djam ligwe nguen", "Makabo Maoo", "Saï mbog", "A yiga tjo me", "Wanda ntet", "Ndutu bakeke" ou encore "Jolie Yem". En 2003, il sort un album hommage au leader nationaliste camerounais, Jean Bikoko Aladin. Très peu médiatisé, "Assiko Story" est sorti en 2008.

Cathy Yogo

Yaoundé : Jeannine Club porte le deuil

Autour du cabaret où se produisait Jean Bikoko Aladin, c’est la consternation.

Ce jeudi 22 juillet, les voisins du cabaret Jeannine Club, au quartier Mvog-Ada, sont sous le choc. Ils ont appris le décès de celui-là qui a, pendant longtemps, bercé leurs nuits de sonorités traditionnelles bassa. Il est environ 16 h, Jeannine Club Assiko n’est pas encore ouvert. Quelques personnes qui ont connu Bikoko Aladin se sont rassemblées dans la Maison blanche pour parler de ses derniers instants. Elisabeth Bayoi, une sexagénaire, déclare : « Il y a environ huit mois qu’il a donné son dernier spectacle ici. Malgré son état de santé qui devenait de plus en plus inquiétant, il n’a pas hésité à offrir des spectacles aux amoureux d’assiko ». Selon elle, « nous avons perdu un homme qui a donné ses lettres de noblesse à cette musique qui a traversé les frontières ». A côté, dans un bar, l’on peut entendre quelques titres de ses albums. Ils rappellent des moments inoubliables à ses fans.

Dans le coin, tout le monde n’est  pas au courant du décès de Jean Bikoko Aladin. Hervé Owona, un voisin raconte : «  J’ai souvent entendu parler de lui mais je ne suis pas au courant de son décès ». A vingt mètres du cabaret Jeannine Club, c’est la gare routière pour se rendre à Makak et à Eséka. Ici, on le connaissait bien. « Aladin est mort, mais il a initié sa fille qui pourra le remplacer. C’est Aladine Bikoko », confie Paul Mayag, chauffeur de car. Les jours ouvrables comme les jours fériés, Jeannine Club réunit beaucoup de spectateurs qui viennent rythme se tremousser au rythme de l’assiko. Le lieu a été pendant longtemps,  celui des retrouvailles des chanteurs d’assiko. Certains ont gagné leur célébrité ici.
 

Prince Nguimbous (stagiaire)


Réactions

Kon Mbogol, chanteur : « Nous n’avons pas pu faire un duo »
Jean  Bikoko Aladin était un baobab de la musique. Non pas seulement pour le peuple bassa, mais pour le monde entier. Nous ne cesserons jamais de le pleurer. C’est le père de l’assiko moderne. L’homme qui a sorti l’assiko de l’ombre pour le rendre populaire. Il a inspiré plusieurs artistes. Nous travaillions beaucoup ensemble. Je déplore cependant une seule chose, Le projet que nous avions de faire un duo n’a pas vu le jour. Ces derniers temps, il me paraissait affaibli. Il se plaignait régulièrement de douleur au ventre.

Roméo Dicka, musicien : « Il décède sans avoir reçu la reconnaissance de la nation »
Ma dernière rencontre avec notre père Bikoko Jean Aladin remonte au mois de mai 2010, à l'occasion de la célébration des cinquantenaires du Cameroun. Comme toujours, dans nos échanges, il me prodiguait des conseils sur la vie. Mais, ce qui m'aura le plus marqué, c'est de le voir personnellement solliciter l'organisation de manifestations officielles pour la reconnaissance de sa contribution à l'évolution de notre patrimoine musical et culturel. Malheureusement, il décède sans avoir reçu cette reconnaissance de la nation. Nous ne pouvons rien face au destin. Je retiens de lui la simplicité, la jovialité, l'humilité, la modestie et la capacité d'écoute malgré l'âge avancé. Il aura combattu le vrai combat. Je prie pour que le Père Tout-Puissant, lui permette d'entrer dans sa gloire. Il ne sera pas solitaire dans ce long voyage, Pius Njawe sera à ses côtés. Paix à son âme.  

Benoît Bitton, chanteur : « Il tire sa révérence avec une fleur aux dents »
L'oeuvre de Jean Bikoko Aladin est immense et innommable. Il a initié un  pouvoir dans le coeur et dans la raison de ceux qui l'aimaient ou le détestaient. Des années 50 aux années 2000, tous les sillons musicaux se sont dessinés à travers lui. Bikoko à lui tout seul incarne l'âme de la musique de l'aire géographique Bassa Batti Mpo'o, ainsi que les vestiges de son histoire à travers ses chants. Son héritage ne se résume pas aux notes de musique, ni à sa musicalité personnelle (l'assiko), mais à une source d'inspiration que son génie a creusée dans le temps et l'espace où de nombreuses espèces musicales africaines se sont abreuvés, s'abreuvent et s'abreuveront toujours. Il tire sa révérence avec une fleur aux dents: quel grand homme !

Ottou Marcellin, chanteur : « Il n’a pas pu vivre décemment de son art »
L’art musical a pris un grand coup avec la mort de Jean Bikoko Aladin. C’était un grand homme. Nous nous sommes vus la dernière fois il y a un mois. Il est venu d’Eséka pour qu’on discute des questions de droits d’auteur. Nous avons d’ailleurs rencontré certaines autorités à ce sujet. Sans suite. C’est dommage qu’un homme de cette trame n’ait pas pu vivre décemment de son art, de ce qu’il savait si bien faire. Je suis triste.

Propos recueillis
par C.Y.

Augustin Bitjocka : «C’est lui le fondateur de l’assiko»

Je sais que Jean Bikoko Aladin est né en 1934. Il avait donc 76 ans. Il est originaire de Biyouha, c’est un district du département du Nyong Ekélé qui est devenu arrondissement avec la dernière mesure présidentielle. Je l’ai connu en 1991 et nous avions réalisés beaucoup d’interview lorsque j’animais les émissions en langue Bassa à Crtv Centre.

C’est lui le fondateur de l’assiko au Cameroun. C’est un rythme venu d’Espagne.  Il a vu un jour dans un bar à Douala, un Espagnol qui jouait, et il s’est approché de l’artiste en disant que le rythme l’intéressait. On a estimé qu’il était très jeune pour jouer.  Il est revenu, a insisté une semaine de suite et ils ont senti son amour pour ce rythme qui n’associait que la guitare et la bouteille.
Un jour, Jean Bikoko a été soutenu par l’un des artistes du groupe espagnol et il a pris la guitare. Il m’a dit que dès la première fois il a joué textuellement ce qu’il avait déjà suivi plusieurs fois, et c’est de là qu’il devient membre de ce groupe. Comme il n’était pas allé à l’école, il ne se rappelait pas les dates. Il se souvenait seulement qu’il était encore tout gamin, et que c’était bien avant l’indépendance. 

Quand l’Espagnol est reparti, il a continué à jouer et s’est mis à composer son premier 45 tours sous le règne de la Sacem. C’est  Samuel Mpouan de Radio Cameroun qui l’avait enregistré et ils l’ont envoyé en France pour les arrangements et le reste. C’est maître Philippe Moungo Mbock un, notaire, qui lui a offert sa première guitare, parce qu’il était un Locpaga comme lui. Avant cela, il n’utilisait que les guitares traditionnelles. Il est ensuite allé à Edéa. Il y avait à cette époque un bar situé juste derrière l’ancienne gare routière, à côté du petit marché qui appartient à un monsieur Bassa.

C’est sur l’invitation du propriétaire qu’il débarque et se met à jouer. Entre temps, il continue à composer des 45 et des 33 tours. Son répertoire est très riche. Il a composé au total plus d’une centaine de chansons. Le dernier album date de 2005. Je ne sais pas s’il en a publié d’autres entre temps. Il était sans cesse sollicité par les producteurs, mais comme il ne savait ni lire ni écrire, il disait que ces derniers s’enrichissaient sur son dos. En écoutant ses chansons passer en boucle sur les ondes des radios, être jouées partout, il avait la frustration de se dire qu’il travaillait sans recevoir le fruit de son boulot.  
L’autre frustration qu’il a eue toute sa vie, c’est lorsqu’il a à Edéa construit un bar où il espérait enfin jouer sans cesse sans se déplacer. Il a gardé un mauvais souvenir du maire qui est venu par la suite détruire ce bar. Eséka est la ville où il s’est par la suite installé et où il a joué sans cesse.  

Comme bon souvenir pour lui, il a épousé 7 femmes d’un coup le même jour sous le régime de la polygamie. C’est le maire Mayila qui a célébré tous ces mariages d’un coup. Il n’avait plus qu’une femme ces dernières années, après avoir épousé plus d’une trentaine.
Il était aussi père de plusieurs enfants. Ses enfants se trouvent un peu partout. Ce sont même certains de ses enfants qui constituent les membres de son orchestre. Il a commencé à perdre espoir lorsque Precier (son fils qu’il voulait ainsi appeler Précieux) qui selon lui, jouait uniquement de l’index et du pouce comme lui, est mort. L’une de ses déceptions, a été de constater qu’il n’y a personne qui joue aussi bien de l’assiko.  

Il vivait de ses voyages, parce qu’il était sans cesse invité tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays pour aller jouer.  C’est lui qui a formé tous les autres artistes de l’assiko. Mais il déplorait le fait que ces derniers chantaient faux. Personne ne prenait le temps de bien apprendre comme lui avant d’aller jouer.  Ils venaient, apprenaient quelques gammes, et allaient chanter des obscénités, selon lui, en plagiant faussement ce qu’il a fait. Parce que lui, il se présentait comme un artiste engagé.

Ses thèmes concernaient le nationalisme, la guerre, contre la colonisation, il condamnait les Blancs qui ont anéanti le Cameroun et surtout le Nyong et Kélé. Dans ses chansons, il invitait les upécistes à taire les querelles de leadership pour œuvrer pour la nation. Il a aussi chanté pour le président Paul Biya et pour le développement de son département et du pays. Ce sont des élites comme Etienne Gerard Kack Kack, Emile Zepherin… qui l’aidaient en l’invitant aux grandes manifestations. »

Propos recueillis par Honoré Feukouo





27/07/2010
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