La dernière pirouette d’Atangana Kouna: Quand mensonge et promesses sont érigés en mode de gouvernance

Publié le 21-03-2016  |  (Yaoundé - Cameroun). Auteur : Nestor DJIATOU - Sans Detour

 

La dernière pirouette d’Atangana Kouna: Quand mensonge et promesses sont érigés en mode de gouvernance

 

La derrnière pirouette d’Atangana Kouna: Quand mensonge et promesses sont érigés en mode de gouvernance.Au cœur de la psychose née des délestages récurrents qui secouent les villes du Cameroun, le ministre de l’Eau et de l’Energie s’en va relancer cette semaine un projet qui aurait dû démarrer en 2006. Objectif de la cérémonie de lancement des travaux de construction du barrage de Nachtigal, divertir l’opinion et la détourner d’une tension qui ne cesse d’enfler.C ’est un autre coup de génie que vient de trouver le Dr Basile Atangana Kouna comme solution à la crise énergétique qui agite le Cameroun depuis quelques années. En optant de lancer dès cette semaine les travaux de construction du barrage de Nachtigal, adossé sur le fleuve Sanaga au niveau de la ville de Ntui, le ministre de l’Eau et de l’Energie, n’a sans doute qu’une ambition dans l’esprit : tempérer le mécontentement général qui a gagné les Camerounais depuis que la récurrence des délestages perturbe gravement leurs activités, en ville comme en zone rurale.

En effet, depuis quelques semaines, particulièrement à Yaoundé, il ne se passe plus de jours sans rupture inattendue de l’énergie électrique dans les quartiers, malgré le retour des pluies. Idem à Douala et dans d’autres villes du pays. La situation est encore plus critique dans les régions où des villages entiers passent souvent 2 semaines, voire 1 mois, sans électricité. une situation au cœur de récriminations sur la capacité du gouvernement à satisfaire ce besoin primaire des populations, et qui a amené tout un député du Rdpc - Peter William Mandio, à écrire pour dénoncer le partenaire du gouvernement Enéo. Face à la poussée de grogne généralisée, le gouvernement a manifestement opté de jouer la carte de la séduction. Le directeur général de projet Lom Pangar - Dr Ismaël Nsangou, dans une récente sortie médiatique, a indiqué que le transport de l’énergie électrique sera bientôt résolu grâce à la mise en fonctionnement du barrage de retenue, pourtant les premières mises en eau ont déjà eu lieu. Son homologue du projet de Memvelé l’a suivi - lui qui est peu disert sur la marche de son chantier, pour annoncer que le projet est réalisé à hauteur de plus de 80 %, quand bien même la mise en eau était prévue pour l’année dernière. Comme si l’instruction leur était dictée d’en haut. une véritable offensive médiatique manifestement destinée à rassurer l’opinion sur les efforts déployés par le gouvernement, en dépit de la persistance du phénomène du délestage.

250 milliards de Fcfa de financement

L’annonce du lancement de la construction du barrage de Nachtigal à Ntui participe manifestement de cette campagne de bonification de l’image du régime face au mé- contentement ambiant, au moment où les affidés du président Paul Biya sollicitent encore un bail à Etoudi pour leur champion. Basile Atangana Kouna va, comme à son habitude, faire de grandes annonces. 330 mégawatts supplémentaires que devrait apporter la mise en route de ce projet, et qui devra étendre les activités d’Alucam. Avec une incidence incontestée sur l’amé- lioration de l’offre d’énergie dans les zones desservies par le bassin de la Sanaga. Mais pour de nombreux observateurs au faîte du dossier, on n’est pas loin de la poudre aux yeux, le projet étant déjà plombé par des appréhensions nourries qui sortent de son propre ministère. Les sceptiques rappellent que c’est depuis 2006, date initialement prévue pour son démarrage, que la construction du barrage de Nachtigal est dans le pipe des projets gouvernementaux.

Mais il n’a jamais été concrétisé. « En 2010, le plan de développement énergétique l’avait reprogrammé pour 2015, mais l’année s’est achevée sans le moindre début du chantier, faute de financement », susurre-t-on au Minee. De quoi amener certains de ses collaborateurs à se demander d’où le ministre prendra les 250 milliards de financement nécessaires pour la réalisation de ce projet qu’il veut engager en grande pompe. un financement qui doit être supporté conjointement par l’Etat du Cameroun, dont on connait la détresse financière, et la société Alucam qui ne serait pas mieux lotie. Surtout que l’entreprise chinoise, retenue pour la réalisation du marché, exige une avance de paiement avant de s’engager dans les travaux. Dans les coulisses, il se dit que les chinois sont devenus sages et rigoureux face à l’insolvabilité du gouvernement dans le règlement des factures liées à l’exécution de certains marchés publics. Suffisant pour corser les appréhensions chez les sceptiques, convaincus que même démarrés au forceps, les travaux pourraient connaître un arrêt, faute de financement, comme c’est le cas avec la réhabilitation du stade omnisports Ahmadou Ahidjo de Yaoundé où les Chinois, las d’attendre leur paiement, ont simplement abandonné le chantier. Autant le dire, on n’est pas loin d’un autre projet mort-né.

 

DR Basile ATangana Kouna Quand mensonge et promesses sont érigés en mode de gouvernance


L ’analyse ne peut surprendre que les esprits naïfs et peu éclairés. En optant pour cette campagne au cœur de la crise énergétique, le ministre de l’Eau et de l’Energie est dans sa logique, celui de la diversion de l’opinion à travers les annonces fortes sans lendemain, depuis qu’il tient les rênes de certaines structures étatiques. Alors directeur général de la Camwater, après son séjour d’Administrateur provisoire de l’ex-Snec, Basile Atangana Kouna déclarait après la mise en service du l’usine de production d’eau de Yato sur le Moungo, que « la guerre de l’eau n’aura plus lieu ». Comme pour justifier ses réformes ! Pourtant aujourd’hui, autant que dans le secteur de l’électricité, le rationnement est de règle dans l’approvisionnement en eau potable, obligeant des pans entiers des quartiers à être sevrés du précieux liquide, même dans les environs de Douala que Yato était censé soulager. Dans la foulée, l’ex-Dg de la Camwater annonçait en grande pompe : « le taux de desserte en eau potable passera de 35 à 60 % à l’horizon 2015 et à 75 % en 2020 ». Des annonces qui se révèlent être de simples slogans tels que « Santé pour tous en l’an 2 000 », au regard des difficultés d’approvisionnement dont souffrent les populations à l’égard de l’eau potable, une inquiétude qui gagne jusqu’aux milieux insoupçonnés.

Dans les cancans qui alimentent les commentaires dans le sérail, on évoque une qualité douteuse de l’eau qui aurait été retrouvée dans la piscine de la ré- sidence présidentielle de Mvomeka, ce qui montre la gravité des manquements qui n’épargnent pas jusqu’à la plus haute institution étatique. D’ailleurs, Paul Biya a fait personnellement les frais des coupures d’électricité lorsque son message à la nation le 10 févier 2016 n’était pas suivi dans une partie du pays du fait du délestage du courant électrique. Arrivé à la tête du ministère de l’Eau et de l’Energie, Atangana Kouna ne s’est pas départi des effets d’annonces. Dans une interview accordée à un magazine en 2013, il déclarait sans ambages : « d’ici un an, on n’entendra plus parler de délestage et de coupure de coupure d’eau ». Dans le même ordre d’idées, le Minee annonçait que l’offre énergétique nationale, évaluée à sensiblement 1 000 mégawatts en 2012, allait doubler en 2015, et tripler en 2020.

En dépit d’énormes potentialités

Aujourd’hui, il n’est pas tôt de faire le constat d’échec de cette politique de mise en œuvre du plan de développement énergétique à l’horizon 2030 adopté en 2010, et qui prévoit un financement de près de 4 000 milliards de Fcfa. Selon les experts, la capacité de production de l’énergie du Cameroun est de 1017 mégawatts, soit environ 720 mégawatts en capacité hydroélectrique, et près de 297 mégawatts en capacité thermique. Depuis 2012, le Cameroun développe un attrayant programme de développement énergétique avec la construction de nombreux barrages à travers le pays, sur fond d’endettement dé- mentiel exorbitant, que les générations futures sont appelées à rembourser. Exemples : Lom Pangar, 6 milliards de m3 d’eau, coûte un financement de 247 milliards de Fcfa dont près de 147 milliards de prêt ; Memvelé dont la mise en eau était prévue en 2015, devra produire 201 mégawatts d’électricité ; Mekim, 120 mégawatts.

A ceux-ci s’ajoutent la centrale à gaz de Kribi, 173,2 milliards de Fcfa, censée générer 216 mégawatts, sans compter de nombreuses centrales hydroélectriques qui pullulent dans le pipeline des projets gouvernementaux - Mentchoum, Nachtigal et autres. Parallèlement, on attend de voir ce que le gouvernement fait des solutions alternatives à l’instar du solaire, de l’éolien et du biogaz, dont scandait la mise en œuvre par Atangana kouna comme solutions palliatives, à son arrivée à la tête du Minee. Et dire qu’en dépit de toutes ces énormes potentialités, le Cameroun peine à fournir l’énergie à ses populations. Suffisant pour donner crédit à ceux qui parlent d’incompétence managériale dans un domaine où le Cameroun paraît avoir été béni de Dieu. En tout cas, il est temps de sonner l’alerte au moment où des signaux alarmistes font état de possibles intrusions des redoutables islamistes de Boko Haram jusqu’à Yaoundé, où ils pourraient trouver dans le délestage persistant un facteur d’infiltration et d’opération. Avis donc.


Copyright © Nestor DJIATOU - Sans Détour, Yaoundé - Cameroun  |  21-03-2016



22/03/2016
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