La chronique du refus : Honni soit ce vénérable!

Cameroun - La chronique du refus : Honni soit ce vénérable!Ainsi donc, 70 personnalités sont entrées dans l’histoire de notre pays lundi dernier en devenant les tout premiers sénateurs du Cameroun, après la proclamation officielle par la Cour suprême des résultats des sénatoriales du 14 avril 2013. Les heureux élus, c’est le cas de l’écrire, ont alors vu leurs domiciles envahis par toutes sortes de supporters, parents, connaissances et autres amis venus partager leur joie, avec bien sûr une prise en bières et une levée du coude comme il se doit. Mais aussi, avec un zèle bien camerounais dans l’appellation des nouveaux élus!

Nos compatriotes ont en effet vite trouvé la formule pour désigner les futurs locataires de la chambre haute du parlement camerounais: «vénérable»! Qui a eu cette inspiration? D’où est-elle venue? Nous n’en savons rien. Toujours est-il que, comme s’ils s’étaient passé le mot ou comme si on le leur avait appris, les Camerounais se sont mis subitement à appeler les nouveaux sénateurs «vénérable, vénérable! ». Beaucoup, sans doute, ne savent même pas à quoi sert un sénateur, mais ils répètent comme des perroquets: «vénérable!». C’est une vieille et mauvaise habitude, bien camerounaise, qui consiste à appeler une personnalité par un autre nom que celui de sa fonction officielle.

Les ministres se font ainsi appeler «excellence», sans pour autant exceller dans quoi que ce soit, si ce n’est dans le pillage des ressources publiques et la médiocrité dans la gouvernance; les députés sont «honorables» et s’empressent de faire précéder leur nom sur tout document par l’indispensable «Hon.» mais, pour bon nombre, ils n’honorent même pas à minima leur mission de parlementaire. Et voici que les sénateurs, sans avoir encore rien fait du tout, sont bombardés du titre réservé aux Dieux: «vénérables»… Faut-il rappeler à nos compatriotes que l’usage des titres de personnalités obéit à des conventions langagières mondiales.

«Excellence» s’applique aux ambassadeurs ou aux ministres en relation avec les diplomates comme le ministre des Affaires étrangères. Le député est monsieur ou madame le député, tout simplement. Nous n’avons jamais entendu «honorable», «très honorable» ou «Premier ministre chef du gouvernement», même chez «nos ancêtres les Gaulois» que nous aimons souvent imiter. Ni ce «docteur» dont on abuse sur les cartes de visite et autres courriers officiels, et que certains collent carrément sur le front, comme s’ils disputaient ces titres ronflants avec le public  qui, lui, n’en a vraiment rien à cirer!

© L'Actu : Hervé Charles Malkal


04/05/2013
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