L'Afrique de l'Ouest tente de faire céder Gbagbo

  FOCUS SUR L'ACTUALITÉ
L'Afrique de l'Ouest tente de faire céder Gbagbo
(France2 29/12/2010)


Les présidents ouest-africains venus mardi à Abidjan discuter avec Laurent Gbagbo reviendront le 3 janvier
Les présidents béninois Boni Yayi, sierra-léonais Ernest Koroma et capverdien Pedro Pires se sont entretenus avec Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara pour convaincre le premier de céder sa place au second.

Les chefs d'états-major ouest-africains réunis eux à Abuja, la capitale nigériane, ont écarté pour le moment toute intervention militaire.

Des discussions en cours
Les trois chefs d'Etat ouest-africains venus à Abidjan demander à Laurent Gbagbo de céder le pouvoir, se rendront de nouveau en Côte d 'Ivoire "le 3 janvier", a annoncé mercredi le président nigérian Goodluck Jonathan, assurant que les discussions se poursuivaient.

"Nous discutons toujours", a affirmé M. Jonathan dont le pays exerce actuellement la présidence tournante de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest, la Cédéao, qui regroupe quinze pays).
"Quand il y a une dispute, c'est le dialogue qui résoud tous les différends, ce dialogue est en cours", a-t-il dit.

Venus au nom de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), les trois émissaires ont néanmoins menacé mardi le président sortant d'un recours à "la force légitime".

A l'issue de la rencontre le président cap-verdien Boni Yayi a simplement déclaré: "Tout s'est bien" passé.

Un rassemblement de jeunes supporters de Laurent Gbagbo a été reporté sine die a fait savoir mardi leur leader M. Goudé. Auparavant le porte-parole de Laurent Gbagbo avait prévenu: "Aucune institution internationale n'a le droit d'intervenir par la force pour imposer un président à un Etat souverain".

Après l'entrevue, les trois émissaires de la Cedeao ont rencontré Alassane Ouattara, président reconnu par la communauté internationale, pendant trois heures dans le grand hôtel qui lui sert de quartier général, soumis à un blocus des forces loyales à son rival.

Les trois émissaires ont eu ensuite un nouvel entretien d'une heure avec Laurent Gbagbo, que ce dernier leur avait demandé.


Le porte-parole du gouvernement Ouattara, Patrick Achi, a affirmé que "le statut de président de la République d'Alassane Ouattara (n'étant) pas négociable", "il s'agit maintenant de négocier les conditions de départ de l'ancien président Laurent Gbagbo".

Laurent Gbagbo a choisi de se maintenir au pouvoir malgré les pressions internationales et le résultat du suffrage électoral dans son pays. Son gouvernement a menacé hier de rompre les liens diplomatiques avec les Etats qui reconnaîtront les ambassadeurs ivoiriens nommés par Alassane Ouattara.






La grève prend forme

L'appel à la grève du camp d'Alassane Ouattara pour pousser Laurent Gbagbo à céder la présidence ivoirienne a été mieux suivi mardi que la veille. Le mouvement s'est traduit notamment à Abidjan par une forte réduction des transports collectifs, a constaté l'AFP.


Jusqu'en début de soirée, les mini-cars de transport collectif appelés "gbakas", très utilisés par les Abidjanais, étaient rarement visibles sur les principaux axes.

Les "gbakas" circulent essentiellement dans le nord d'Abidjan, très peuplé, et ce secteur d'activité est largement dominé par les ressortissants du nord du pays ("dioula"), soutiens fervents de M. Ouattara.

A Adjamé (nord), de nombreux commerces étaient fermés, de grands carrefours habituellement grouillants de taxis étaient vides.

A Yopougon (ouest), fief de M. Gbagbo, des taxis circulaient, mais certains magasins avaient fermé leurs portes. Des groupes de jeunes tentaient parfois d'empêcher des taxis de prendre des clients ou les contraignaient à rebrousser chemin, a-t-on constaté.

Les activités s'étaient déroulées à peu près normalement dans le quartier chic de Cocody (nord), mais le Plateau (centre, administration et affaires) n'a pas connu son affluence habituelle.



D'autre part, le gouvernement de Laurent Gbagbo rompra les liens diplomatiques avec tous les Etats qui reconnaîtront les ambassadeurs nommés par son rival Alassane Ouattara, a annoncé mardi un porte-parole à la télévision.

La France avait annoncé avoir été informée lundi de la désignation d'un nouvel ambassadeur à Paris par Alassane Ouattara et avoir engagé la procédure d'agrément.


Attaque d'un convoi de l'Onu
Un convoi de la mission de l'ONU en Côte d'Ivoire, l'Onuci, a été attaqué mardi à Abidjan par une "foule nombreuse", un Casque bleu a été blessé à la machette et un véhicule incendié lors de cet incident, a annoncé l'Onuci.


Le convoi de trois véhicules venait de l'intérieur du pays lorqu'il a été attaqué dans le quartier populaire de Yopougon (ouest).

Selon la mission, la situation est "revenue à la normale" grâce à l'intervention du général Philippe Mangou, chef d'état-major des forces fidèles au président sortant Laurent Gbagbo, dont le quartier de Yopougon est un bastion.

Gbagbo peut-il résister à la pression africaine ?
Si le président sortant a décidé de faire fi des annonces de Paris, Washington, Moscou et autres, l'Afrique aura-t-elle raison de sa résistance ?

Le président autoproclamé de Côte d'Ivoire n'a certes aucun intérêt financier ou immobilier en Europe, ni d'avion officiel toujours bloqué à Bâle (Suisse) à la demande de la France mais il est désormais confronté à la pression continentale.



La Cédéao, qui a menacé de faire usage de "la force légitime", estime que ces entretiens de mardi sont "le dernier geste" avant une intervention armée. "Je prends au sérieux les menaces mais je reste tranquille", a déclaré de son côté Laurent Gbagbo au Figaro.

Les mises en garde du clan Gbagbo
Dans un entretien au journal Le Monde, le camp Gbagbo avait mis en garde ses voisins ouest-africains de toute opération militaire.

"Il y aura peut-être un désordre intérieur, une guerre civile en Côte d'Ivoire, parce que nous n'allons pas nous laisser piétiner notre droit et nos institutions", a lancé le président en place qui a indiqué que toute intervention aurait des conséquences désastreuses pour les millions de ressortissants ouest-africains vivant en Côte d'Ivoire.

Ces propos inquiètent la population ivoirienne. Quelques 19.120 Ivoiriens ont fui vers le Libéria voisin pour échapper aux violences post-électorales dans leur pays. La majorité de ces réfugiés sont des femmes et enfants et environ 62% d'entre eux ont moins de 18 ans, selon le Haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR).



Des propos condamnés par Guillaume Soro, ex-Premier ministre de Gbagbo et désormais celui de son rival: "Je m'indigne devant tant de cynisme et un tel chantage. (Et je) condamne fermement cette attitude irresponsable de Laurent Gbagbo et de son clan".



La Côte d'Ivoire lâchée de toutes parts

Si l'ONU, La France et les Etats-Unis ont reconnu la victoire d'Alassane Ouattara et se sont dit prêts à accueillir ses représentants, l'Afrique commence à prendre des mesures drastiques. Jeudi dernier, sept ministres des finances de l'Union économique et monétaire ouest-africain (UEMOA) ont demandé que le seul représentant du président vainqueur des suffrages soit habilité à gérer les comptes ivoiriens.



Finances bloquées d'un côté, la Côte d'Ivoire se retrouve également isolée sur la scène africaine. L'Union africaine a suspendu le pays et a demandé au Premier ministre kényan, Raila Odinga, de coordonner les efforts de l'organisation pour régler la crise politique.



A l'intérieur du pays, Gbagbo tient bon avec le soutien de l'armée, de milices organisées et l'aide officieuse de mercenaires, selon certaines rumeurs. Son adversaire est toujours retranché à l'Hôtel du Golfe où il a néanmoins pu s'entretenir avec Alain Le Roy, responsable des opérations de maintien de la paix de l'ONU. Ce dernier a indiqué avoir demandé à rencontrer Gbagbo sans avoir eu la moindre réponse. L'appel à la grève générale de Ouattara a été peu suivie lundi, en raison notamment du manque de relais dans les médias et surtout la télévision.



A Paris, l'ambassade de Côte d'Ivoire a été occupée plusieurs heures par des partisans d'ADO, surnom donné à Ouattara. Ils entendaient protester contre le maintien du président sortant et de son entourage, et exigeaient de laisser la place au nouvel ambassadeur désigné par Ouattara et reconnu par Paris. Celui-ci devrait bientôt prendre ses fonctions. Mardi, l'ambassade à Paris était fermée "jusqu'à nouvel ordre".



La Côte d'Ivoire est en crise depuis un mois et le second tour de la présidentielle le 28 novembre qui avait donné vainqueur Alassane Ouattara avant que le Conseil constitutionnel n'invalide le résultat et ne proclame la victoire de Laurent Gbagbo. Les violences post-électorales ont fait au moins 173 morts à la mi-décembre, essentiellement des partisans de Ouattara, selon l'ONU. Le camp Gbagbo n'en a décompté que 53, dont 14 membres des Forces de défense et de sécurité.

Par FTV avec agences

© Copyright France2



29/12/2010
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 299 autres membres