Frilosité - Nomination de Sg et réorganisations des ministères: Paul Biya prépare-t-il un tsunami ?

DOUALA - 18 SEPT. 2012
© Michel Michaut Moussala | Aurore Plus

Le remaniement ministériel est-il annoncé avec la foultitude de textes signés par le chef de l’Etat vendredi dernier ?

I- Signes avant-coureurs d’un réajustement

Bien malin qui pourrait le dire avec certitude et exactitude. Peut-être que Paul Biya va procéder à un remaniement de grande amplitude dans les jours à venir mais avec « cet homme, on n’est sûr de rien… » Comme l’a déclaré un membre du Rdpc ici à Douala quelques minutes après la lecture de la série de textes signés vendredi dernier par le chef de l’Etat relatif à la nomination de secrétaires généraux de certains ministères et la réorganisation d fond en comble de certains autres. Pour les secrétaires généraux de ministères il y avait urgence car certains ministères en étaient dépourvus depuis que leurs titulaires avaient été nommés ailleurs et n’avaient pas été remplacés. Tel est le cas de Jean-Paul Missi, ancien secrétaire général du ministère du Développement urbain et de l’Habitat aujourd’hui directeur général du Crédit foncier du Cameroun (Cfc). Tel est aussi le cas du ministère de la Fonction publique et de la Réforme administrative dont l’ancien titulaire, Ngwesse Philip Ngolle est depuis le remaniement du 9 décembre 2012 nommé Ministre des Forêts et de la Faune où il avait remplacé son cousin Elvis Ngolle Ngolle. C’est du moins la lecture que nous faisons de ce vaste mouvement dans les secrétariats des ministères : combler les places laissées vacantes.

Mais ce n’est pas tout, car Paul Biya a profité de cette opération pour faire le ménage. On peut constater le départ de certains anciens qui avaient déjà mis long à leurs postes, mais surtout l’arrivée de jeunes turcs qui piaffaient depuis d’impatience dans l’antichambre de l’attente. Ils sont bien servis eux dont certains sont peu connus du grand public. Un autre fait marquant est l’ampleur de la réorganisation de quelques ministères. En effet, on a été habitué à voir un seul ministère réorganisé, mais cette fois-ci c’est plusieurs ministères réorganisés d’un seul coup dont celui de la Communication dont le rôle et les prérogatives ont été accrus tout comme celui de la Défense. On se serait attendu à la fusion de certains ministères comme la Communication et de la Culture qu’on ne sent pas depuis qu’Ama Tutu Muna est aux manettes alors qu’en France par exemple, la culture est omniprésente dans le ministère de la Culture et de la Communication.

Derrière la série de textes de vendredi dernier qu’est-ce qui peut se profiler, à l’horizon ? Beaucoup d’hommes politiques que nous avons interrogés ce week-end parlent d’un remaniement ministériel de vaste ampleur avec un reéquilibrage régional car n’oublions pas qu’il y a beaucoup de grincements de dents dans certains départements et région depuis le remaniement ministériel du 9 décembre 2012. Certaines régions comme l’Adamaoua avec seulement trois ministres que sont : - Abba Sadolu, ministre délégué à la présidence chargé des marchés publics, département du Mayo Banyo ; - Nana Aboubakar Djalloh, ministre délégué auprès du ministre de l’Economie, de la planification et de l’Aménagement du territoire chargé de la planification, originaire du département de la Vina ; - Mme Koulsoumi Alhadji épouse Boukar, secrétaire d’Etat auprès du Minduh chargée de l’Habitat, originaire de la Vina.



II- Corriger les déséquilibres du dernier remaniement

Donc sur les cinq départements de l’Adamaoua seuls deux ont des ministres les trois autres que sont le Djerem, le Faro et Deo et le Mbéré n’ont rien. La région de l’Adamaoua vient donc de lancer un ultimatum à Paul Biya afin qu’il reconsidère cette situation. Et ceci se passe à quelques mois des législatives et des municipales ; C’est tout dire ! Et avec l’effet Marafa Hamidou Yaya, l’ancien ministre d’Etat de l’Administration territoriale, c’est un énorme moyen de pression sur le chef de l’Etat qui n’a pas intérêt à se boucher les oreilles ou à se voiler les yeux. La région de l’Est elle aussi hausse le ton. Elle n’a pas eu son université d’Etat après le récent séjour là-bas pour l’inauguration officielle de la retenue d’eau de Lom Pangar. L’Est a quatre ministres et estime qu’elle est lésée compte tenu de son futur poids économique (diamants de Mobilong, fer de Mbalam, etc.) et non démographique dans le pays. Sur les cinq départements de l’Est deux ont des ministres : le Haut Nyong, trois ministres sur les quatre que détient la région la plus vaste du pays avec 109.000 Km2 et la Kadeï, le Lom et Djerem et la Boumba et Ngoko n’ayant rien. Dans le Littoral, il y a une injustice a réparer : le Moungo n’a pas de ministre alors que son poids démographique n’est pas négligeable.

Ce département a un fils, Alexis Dipanda Mouelle qui est le premier président de la Cour suprême mais ses enfants dont les Bamilékés, allogènes mais qui se réclament autochtones, avaient écrit à Paul Biya pour lui dire qu’ils sont oubliés. Le Moungo qui a donné 73.412 voix à Paul Biya à la présidentielle du 9 octobre 2011 occupant ainsi le 14e rang national sur les 58 départements que compte le pays n’a donc aucun ministre alors que le poids plume qu’est le département du Nkam avec seulement 17.468 voix données au chef de l’Etat (54e rang) a deux ministres, Pierre Moukoko Mbonjo aux Relations extérieures et Pierre Titi ministre délégué aux Finances chargé du Budget. Il convient de signaler que le Littoral n’a que quatre ministères. Les régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest ont respectivement quatre ministres chacun, l’Ouest cinq, tandis que le Sud natal de Paul Biya en a six. Il convient donc de rééquilibrer les choses en ôtant à la région du Centre qui a à lui seul 19 ministres, excusez du peu !

Logiquement même si la logique politique n’est pas arithmétique, la région du Centre devrait se contenter tout au plus de dix ministres, ce d’autant plus qu’il n’est pas le plus grand pourvoyeur en voix de Paul Biya dont le plus grand gisement électoral se trouve du côté du Grand Nord en général et de la région de l’Extrême-Nord en particulier. Ce qui est sûr et certain est que le chef de l’Etat va essayer de réajuster les choses. Et en tenant compte de l’évaluation des (feuilles de route) des ministres qui est en cours, il va se débarrasser de beaucoup de ministres. Au cas où il y aurait remaniement dans les jours qui viennent, ce sont les ministres les plus anciens ou les plus incapables professionnellement qui pourraient en faire les frais. Au niveau de la longévité, il y a Zacharie Perevet, Amadou Ali, Bello Bouba Maïgari, Laurent Esso, Grégoire Owona, Pierre Hele, etc. Seulement en dépit de leur ancienneté au gouvernement certains ministres ne sont pas inquiétés. Tel est le cas du ministre d’Etat Bello Bouba Maïgari en charge du Tourisme et des loisirs qui a des accords avec le Rdpc au pouvoir.



III- Les « sénateurs » de l’administration publique sont-ils menacés ?

En effet, on ne voit pas comment le leader de l’Undp peut partir du gouvernement lui qui constitue un allié fidèle pour Paul Biya. Tout comme il serait difficile de voir partir Amadou Ali vice-Premier ministre en charge des Relations avec les Assemblées. S’agissant de l’incapacité, il y a la Ministre de la Culture Ama Tutu Muna, celui des Sports et de l’exercice physique, Adoum Garoua qui ne font vraiment pas l’affaire. Certains nouveaux venus, ceux qui sont entrés pour la première fois au gouvernement pourraient aussi faire les frais du remaniement. Ce ne sont là que supputations, Paul Biya étant maître du timing. Il peut attendre novembre et décembre pour recomposer l’équipe gouvernementale ou le faire dans une semaine. Il faut éviter de focaliser l’attention sur les seules nominations des secrétaires généraux de ministères ou la réorganisation de certains ministères. Paul Biya va également s’attaquer à la restructuration des sociétés d’Etat ou plutôt à la nomination de responsables à la tête de certaines sociétés dont certains dirigeants ont atteint un âge avancé. On trouve des septuagénaires mais surtout de nombreux sexagénaires dont certaines occupent leur poste depuis deux ou trois décennies.

C’est ainsi qu’à la Crtv par exemple, le Directeur général-adjoint Francis Nkemgne Wete a officiellement 69 ans mais en réalité il pourrait en avoir trois ou quatre ans de plus selon des sources crédibles. Il devrait normalement partir se reposer tout comme l’administrateur directeur général de la Société nationale des hydrocarbures (Snh) Adolphe Moudiki qui n’affiche pas moins de 75 ans. Il y a d’autres dinosaures tels Ernest Ela Evina, propriétaire de la Société publique le Ceenema qui s’occupe de la machine agricole dont Paul Biya attend la mort pour nommer son cadavre ailleurs, tout comme Abossolo Nna, Directeur de l’Imprimerie nationale que le chef de l’Etat a oublié à son poste. Ela Evina a déjà battu le record de Clément Obouh Fegué (lorsqu’il était à la tête de l’ancienne Société nationale d’eau du Cameroun) où ce dernier était directeur général adjoint de 1973 à 1975 et Directeur général de 1975 à 2000 et celui de Marcel Niat Njifenji à l’ex-Sonel (Société nationale d’électricité du Cameroun). Camille Mouthé à Bidias n’est arrivé qu’hier au Fonds national de l’emploi (Fne) où il est Directeur général depuis la création de cette société d’Etat en 1990, soit 22 ans. Un autre dinosaure est tapi à la Société nationale des investissements (Sni) où il est directeur général adjoint depuis des lustres en la personne d’Ambroise Ondoa.

Paul Biya va également s’attaquer à l’épineux problème d’harmonisation des âges de départ à la retraite, tellement il y a des disparités criardes entre les différents corps de la fonction publique. On laisse les médecins aller à la retraite à 55 ans alors que l’Etat du Cameroun a dépensé beaucoup d’argent pour leur formation, sans oublier qu’ils ont passé en moyenne sept ans dans le secondaire et sept dans le supérieur alors que l’instituteur qui a passé deux ans dans une école d’instituteurs avec son Bepc abandonne la craie à 60 ans pour jouir d’une retraite bien méritée. C’est donc des nouveaux chantiers qu’il est en train d’ouvrir pendant que ses grandes réalisations dans le domaine des infrastructures piétinent.


18/09/2012
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