Europe- Cameroun: Le STRESS et encore le STRESS, mot de l´année chez les Camerounais de l´Europe?

Europe- Cameroun: Le STRESS et encore le STRESS, mot de l´année chez les Camerounais de l´Europe?

Femme Misere:Camer.beNous avons consulté le médecin Dr. Solange Nzimegne-Goelz. Le stress, les nerfs et la dépression: tels sont les mots qui reflètent de plus en plus nos systèmes intégrés dans les processus de la mondialisation et exposés à des pressions et contraintes des temps modernes avec des effets néfastes sur la santé psychosomatique de l´homme. Avant l´arrivée en Europe, le mot stress faisait à peine partie du vocabulaire de beaucoup de nos compatriotes. Quelques années après, il devient un véritable mot passe-partout au point qu´on se demande si la signification et la perception sont dans certaines situations justifiées.

Le nouveau venu en Allemagne est accueilli par une connaissance dont l’attitude pressée étonne et surprend. Les bagages sont rapidement récupérés à l´aéroport, la gare traversée en vitesse pour rattraper le bus qui a déjà démarré. A peine arrivé à la maison, la connaissance dépose les bagages, présente hâtivement la maison ou la maisonnée tout en regardant incessamment sa montre. Elle doit honorer un rendez-vous dans quelques dizaines de minutes et sa ponctualité dépend du trafic et de deux bus qu’il ne doit pas rater. Courtes explications et la voilà partie!

Comment se porte la famille? Comment était le voyage? Comment les escales ont-elles été gérées? Pourquoi notre connaissance ne pouvait-elle pas être intéressée par ces informations? Pourquoi le jour de mon voyage ne pourrait-il pas être férié? Ces questions reviendront pendant quelques jours d’observations attentives dans une solitude indescriptible. Au plus tard une semaine après, on maudit le visa qu’on avait fêté même à l’insu des parents un peu trop superstitieux et on pense à un retour possible même étant conscient de la mission qui repose sur nos épaules et des attentes de notre famille.

Quel est ce monde si pressé? Ici, les parents à pas pressés tirent la main de l’enfant pour rattraper le métro. Là-bas, l’employé de bureau avec son sac à dos fait du marathon pour commencer le travail à l´heure. Plus loin, l’employé de la poste qui doit livrer les paquets ponctuellement dévore la route avec son vélo. Encore plus étrange nous paraît l´attitude d´un frère qui s´arrête à peine pour répondre à notre question portant sur quel métro nous devons prendre pour arriver à l´université. Au fil des mois, l’on entre graduellement dans un système où la ponctualité est la condition sine qua non de la réussite et de l´intégration. On apprend aussi que se pointer à un rendez-vous en retard est non seulement un indicateur de l’irresponsabilité mais aussi un manque de respect notoire qui bouscule tout le calendrier des impliqués et engendre des répercussions négatives sur le projet en question. C´est aussi la violation du contrat verbal qu´on signe en donnant son accord au rendez-vous fixé.

«Faits quoi faits quoi, un nouveau deviendra ancien», cet adage est bien connu dans le milieu estudiantin à Yaoundé. Les semaines, mois et années s´égrainent et l’ex-nouveau entre lentement dans la danse: lui aussi n’attend pas; lui aussi traverse la gare avec la vitesse d´un rat en danger; lui aussi, il doit laisser seuls ses visiteurs venus de près ou de loin en leur indiquant les vivres dans le réfrigérateur, pour aller “jobber”. C´est ainsi qu´il comprend que les rendez-vous n’attendent pas. Désormais, il comprend mieux le stress de ceux qui l´ont accueilli et justifie tout “manquement” par le même stress.

En Allemagne, il n’est pas exagéré de dire que l’on déjeune le matin avec le stress, passe la journée dans le stress et va se coucher le soir avec le même stress. La famille au pays doit désormais composer avec ce nouveau mot. Au téléphone, le “ça va maman/papa” a laissé place à «il n’y a que le stress maman/papa». Un stress qui justifie d’ailleurs les appels devenus irréguliers. Un Camerounais d’Allemagne est-il sollicité pour un projet de la vie associative, la réponse tombe claire et limpide: «dis donc je suis stressé». Un parent au pays veut-il un renseignement utile: «dis donc, tu ne connais pas le stress du pays des blancs ci.» c´est la réponse que le parent commente en ces termes: «Je wanda comment les gens changent, une fois arrivés en Mbeng éh!»

Le mot stress qui nous paraissait au départ saugrenu devient au fil des ans un pain quotidien, un mot passe-partout. Qu’est ce que c’est que le stress et en quoi consiste-t-il? Y´a-t-il des différences culturelles sur la perception et le ressentiment du stress? Quels conseils peut-on donner aux compatriotes en Europe?

Nous avons donné la parole à notre compatriote, experte de la santé, socialement engagée entre autre pour la santé des migrants, médecin généraliste et propriétaire d´un cabinet médical à Berlin-Neukölln: Dr. Solange Nzimegne-Goelz. Pour la bonne gouverne des lecteurs de Camer.be qui s'interressent de plus à notre rubrique diaspora, elle nous explique: «Selon l´encyclopédie numérique Wikipedia, le mot stress est défini comme étant “l'ensemble des réponses d'un organisme soumis à des pressions ou contraintes de la part de son environnement, le tout dépendant toujours de la perception des dites pressions de la part de l'individu les vivant”. Partant de cette définition, nous pouvons constater que le mot stress s´avère relatif et est quotidiennement employé à tord et à travers, dans la mesure où les gens l´associent aux facteurs externes et moins aux facteurs internes de l´individu en question. Des personnes soumises aux mêmes pressions peuvent afficher de réactions et de degrés de stress différents. Les circonstances pouvant engendrer chez le sujet/objet de réponses néfastes à la santé psychosomatique. Si on prend en considération la dimension médicale des réponses physiologiques ou psychologiques à des situations causant le stress, il en ressort que ce mot ne trouve application qu´en cas de manifestation desdites réponses. Ces réactions peuvent se traduire par la fatigue physique ou psychique, l´insomnie, les migraines, les douleurs musculaires inexplicables, l´hypertension artérielle (actuellement très fréquemment observée chez des jeunes africains/africaines), la dépression etc. Être soumis au quotidien aux pressions n´implique pas coûte que coûte le stress et encore moins une raison de faillir à ses obligations. Bien sûr que le compatriote qui au pays a toujours vécu dans un environnement marqué soit par le calme ou par une flexibilité avec le temps, les rendez-vous et d´autres attentes de la performance et de la productivité se retrouve très vite confronté à un autre rythme relativement rapide et contraignant en Europe. Ceci dit, le tout dépend de la perception et de la gestion des pressions et du temps par chaque individu concerné.

Le conseil que je peux donner à chacun, c´est de savoir définir les priorités. Après avoir quitté nos pays dans le but de trouver d´autres possibilités d´épanouissement et les conditions meilleures de vie ici, il nous faut exploiter toutes nos chances de réussite afin de nous positionner et de contribuer positivement tant au développement de notre pays d´origine qu´à celui de notre pays d´accueil. Les pressions et les contraintes que nous impose l´environnement européen sont les mêmes qui ont conduit les sociétés européennes à ce stade où ils sont, lequel constitue un facteur pull pour notre immigration. De ce fait, qui veut vivre et réussir dans un tel environnement doit pouvoir apprendre à gérer de façon optimale son temps et fixer les priorités. Qui doit se réveiller à 4 heures du matin pour commencer un boulot à 6 heures, ne peut pas passer des heures devant la télévision tard la nuit ou bavarder jusqu´à 2 heures du matin. Ce serait une attitude contra-productive qui prépare le terrain au stress. C´est en définissant ses priorités qu´on répartit mieux son temps et les activités utiles, discerne l´important des futilités et c´est ainsi que le stress aura une influence plutôt minime sur l´organisme. Il ne faut pas oublier que le stress peut aussi avoir un impact positif sur l´individu.»

Merci au Dr. Solange Nzimegne-Goelz

© Camer.be : Florence TSAGUÉ A.


23/03/2012
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