Escroquerie présumée: L’ancien gouverneur de la BEAC sauve le Cameroun des griffes de Mebe Ngo’

Source: Camerounlink 13 03 2019

 


Pour faire main basse sur 9 milliards de FCFA dans une vente d’armes, l’ancien ministre de la Défense (Mindef) avait présenté une lettre de garantie de l’Etat du Cameroun à une société croate. Vérification faite à la BEAC, c’est un faux.

« Merci de bien vouloir nous indiquer si la garantie que nous vous envoyons ci-jointe était réellement émise par BEAC, car nous avons reçu cette garantie de Mebe sur la base du contrat conclu pour la fourniture de casques ». C’est en ces mots que, le 28 septembre 2010, la société de vente d’armes croate dénommée Sestan-Busch écrit au gouverneur de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC). Dans cette correspondance dont Repères a pu obtenir copie, l’entreprise croate justifie sa saisine de la BEAC : « Selon ce contrat que nous avons conclu avec le ministère de la Défense du Cameroun, notre société a dépensé plus de 450 000 euros et à cause de cela nous leur avons demandé de nous fournir la garantie bancaire qui garantira que nous payons à nouveau 2,5% que nous allons recevoir notre paiement du contrat pour un montant total de 14 224 000 euros (un peu plus de 9 milliards de FCFA) ».

Après avoir « répondu négativement par téléphone » à l’entreprise croate Sestan-Busch, le gouverneur de la BEAC d’alors saisit le Mindef pour « […] vous transmettre, à toutes fins utiles, des documents que la BEAC a reçu d’une société croate, la Compagnie Sestan-Busch, en rapport avec une prétendue garantie financière de la BEAC concernant un contrat de vente d’armes ». Et Lucas Abaga Nchama est formel : « En ce qui concerne la garantie financière, elle est manifestement fausse ». Pour le gouverneur de la BEAC, « cette opération est inconnue des services de la BEAC. La banque centrale n’a jamais donné une telle garantie ou tout au moins été en situation de l’octroyer ». Le patron de la BEAC argumente : « Le papier en-tête n’est pas celui de la BEAC. Les signataires apposées sur le document ne sont pas celles des responsables de la BEAC mentionnés comme signataires ».



Pour que l’Etat du Cameroun soit au courant de ce qui se trame dans son dos, et se prémunir d’une quelconque accusation antérieure de complicité, M. Abaga Nchama informe le ministre des Finances d’alors, Essimi Menye : « J’ai l’honneur de vous transmettre, à toutes fins utiles, une copie de la lettre et des documents que j’ai adressée au ministre délégué à la présidence de la République chargé de la Défense en rapport avec une prétendue garantie financière de la BEAC concernant un contrat de vente d’armes ».

« PETIT RÉSEAU COIFFÉ PAR LE MINDEF »
Le fin mot de cette affaire, il faut le retrouver dans une note de renseignements adressée au chef de l’Etat quelques années après. « Honneur de porter à votre haute attention que, depuis deux ans, un petit réseau coiffé par le Mindef, à l’international, a escroqué la société Company Sestan Busch, spécialisée dans la vente des armes lourdes et des munitions », peut-on lire dans cette note. Dont les auteurs relatent qu’ « en 2010, au cours d’un séjour en Europe, le Mindef, Edgard Alain Mebe Ngo’o, négocie avec cette société l’éventualité et la possibilité de la signature d’un contrat pour la livraison d’armes au Cameroun ».

Au passage, informe le courrier à l’adresse de Paul Biya, le Mindef obtient de ses interlocuteurs la somme de 450 000 euros, environ 315 millions de FCFA. Pour ce dossier, la note explique que le Mindef place « ses trois hommes de confiance sur le coup. Il s’agit de Benjamin Atéba, commissaire de police et secrétaire particulier du Mindef, Léonard Maxime Mbangué, chargé d’études au Mindef, et Patrick Eyeffa, homme d’affaires du Mindef. Ils vont confectionner de fausses garanties bancaires de la BEAC pour faire croire à Sestan-Busch que l’Etat camerounais a donné son onction [à cette transaction] à travers la BEAC ». C’est muni de cette garantie financière que le « petit réseau » relance Sestan-Busch en lui demandant une avance de 2,5% du montant global de la transaction. C’est cette « boulimie financière » avant la fin d’une opération de vente qui met en éveil les responsables de l’entreprise croate. Qui saisit le gouverneur de la BEAC pour se rassurer de l’authenticité des documents mis à sa disposition par Edgar Alain Mebe Ngo’o et compagnie. La réponse de Lucas Abaga Nchama est sentencieuse :

« Cette garantie financière est fausse ». Fin de la partie. Le réseau constitué entre en hibernation. En attendant que la justice s’intéresse à ce dossier, l’on note que, parmi les hommes lige d’Edgar Alain Mebe Ngo’o dans ce dossier, Léonard Maxime Mbangue est aujourd’hui placé sous mandat de dépôt avec son « suzerain » à la prison centrale de Kondengui à Yaoundé. Jusqu’alors, et à l’état actuel de nos informations, Benjamin Ateba n’intéresse pas encore la justice. L’homme est monté en grade depuis les faits de 2010 et est aujourd’hui commissaire principal. Cet ex-chef de service des caisses à la délégation générale de la Sûreté nationale (DGSN) à l’époque de M. Mebe Ngo’o. L’ancien secrétaire particulier ce dernier à la Défense et aux Transports est aujourd’hui en service à la DGSN.


Source : Repères



13/03/2019
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