Douala: la fête sans eau

Douala: la fête sans eau
(La Nouvelle Expression 27/12/2010)


L’arrivée de la fête de Noël a coïncidé avec une coupure d’eau dans certains quartiers de la capitale économique. Et jusqu’à hier, le précieux liquide n’était pas de retour.
C’est dans un calvaire que les populations du quartier Madagascar à Douala viennent de passer la fête de la nativité.

En effet, depuis le 23 décembre, ce quartier de la capitale économique connaît une coupure d’eau qui a rué toutes les populations vers des puits de fortune ou vers des robinets situés dans des zones basses où un filet d’eau pouvait continuer à couler. C’était le cas chez une femme habitant non loin du lieu di Pmi Soboum. Depuis, jeudi dernier, le domicile de cette dernière n’a pas désempli. Homme, femmes et enfants venant avec des bidons, des calebasses, des seaux de toutes sortes pour se ravitailler. « Pour remplir un seau de 10 litres , il te faut attendre même une heure ! » Se plaint un papa avec un peu d’emphase.

En effet, compte tenu de la pression qui est très faible, le plein d’un tel récipient prend environ 10mn. Ce qui se fait en temps normal en moins d’une minute. Mais, sans alternative, tout le monde attend. « Wèèh, mon Dieu ! Depuis 10h que je suis ici ? », S’inquiète une femme enceinte ce dimanche 26 décembre aux environs de midi alors qu’elle n’a pas encore puisé les deux seaux de 15 litres qu’elle a apportés. Fatiguée d’attendre, elle s’est finalement allongée sur la véranda… Le problème est qu’ici, on se sert par ordre d’arrivée.

Et juste avant elle, il y a un monsieur qui est venu du lieu dit « Pont Blanchisseur » avec son véhicule contenant 7 bidons de 20 litres chacun. Et depuis un long moment, ce sont ses bidons qui se succèdent au robinet pendant que les autres attendent et d’autres arrivent, allongeant la file. Face à ce long rang de bidons qui serpente dans la cour de cette femme, certains choisissent tout simplement de se rabattre vers les puits de fortune qui sont disséminés dans les quartiers et d’où l’on recueille une eau fort douteuse. « Il n’y a même rien aujourd’hui ! » constate cette femme qui se souvient que le « vendredi 24 et samedi 25 décembre, il y avait beaucoup plus de gens qu’aujourd’hui. »

Spectacle désolant

Cette situation n’est pas sans générer des tensions. D’aucuns pensant que chacun devrait remplir un seau et céder la place au suivant. Et d’autres soutenant que chacun à son tour doit puiser tous les récipients qu’il a apportés. Mais, par-dessus tout, la même question revient : « Comment ces gens peuvent attendre le moment des fêtes pour couper l’eau ? » Question d’autant plus préoccupante que des nouvelles font état de mêmes scènes dans de nombreux autres quartiers de la ville.

Et les coupables sont vite trouvés : l’on en veut sans distinction à la Camerounaise des Eaux et à Camwater, les deux sociétés impliquées dans la distribution de l’eau potable au Cameroun. Ces sociétés sont maudites et traitées de tous les noms. « Elles s’étaient pourtant vantés récemment d’avoir augmenté la capacité de production d’eau de 50 000 m3 . »

Lance quelqu’un. « Est-ce que c’est même d’abord vrai ? » Doute un monsieur adossé à un poteau. « Ça sert alors à quoi pour que pendant trois jours d’affilée on n’ait pas d’eau, en période de fête en plus ? » Questionne avec lassitude une maman assise sur un pagne étalé à même le sol. En plein week-end évidement, ni l’une ni l’autre des deux sociétés ne peuvent répondre à ces invectives. Mais, la réalité est triste et le spectacle désolant…


Écrit par Julien Chongwang

© Copyright La Nouvelle Expression



27/12/2010
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