Diplomatie : La police sénégalaise investit l’ambassade du Cameroun à Dakar

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Dimanche dernier, des manifestants camerounais occupaient  la chancellerie. Le récit du président de l’Association des Camerounais du Sénégal.

Ce matin vers 9h, une dizaine de Camerounais qui, depuis un certain temps, dormaient à même le sol à la devanture de l'ambassade du Cameroun au Sénégal sis 157,

Rue Joseph Gomis, ont été brutalement et sévèrement molestés par la police, à la demande expresse de notre Ambassadeur, Monsieur Jean KOE NTONGA. Trois d'entre eux qui ont cru devoir se réfugier à l'intérieur de la cour de l'ambassade en ont été extirpés à coups de gourdins et de crosses de fusil et traînés sur le sol comme des animaux. Toute l'assistance composée des voisins immédiats de l'ambassade a été médusée de voir une situation inédite au Sénégal, où c'est un ambassadeur  qui  commandite l'usage de la force de police contre ses compatriotes.

Le crime de ces jeunes compatriotes refoulés de l'Algérie et qui sont venus à Dakar pour y trouver des documents consulaires et certainement du travail, a été d'avoir demandé un soutien à leur ambassade, qui leur a opposé un refus catégorique en leur demandant d'aller se faire voir ailleurs, car il n'existe pas de fonds pour leur venir en aide. Une aide qu'ils ont demandée individuellement en apposant un timbre de 1000 Frs sur chacune de leur demande. En désespoir de cause, ils ont cherché du travail au port de Dakar comme manoeuvres et même comme ouvriers temporaires sur le chantier de réfection de l'ambassade. Le soir, n'ayant pas où dormir, ils ont demandé et obtenu que l'ambassadeur leur permette de dormir dans la cour de l'ambassade. Puis, comme celui-ci est revenu rapidement sur sa décision, ils se sont installés tous les soirs à la devanture de la chancellerie croyant y être en sécurité et espérant une aide qui ne viendra jamais. Ce dimanche matin, le réveil a été brutal et trois d'entre eux se sont retrouvés contusionnés et mis dans les grilles du commissariat central. En effet, c'est monsieur l'ambassadeur lui-même qui est allé à la police du Plateau pour requérir les forces de l'ordre et c'est suivant ses hautes instructions que des Camerounais ont vécu le calvaire. Plus tard, c'est grâce à mon intervention en compagnie du Trésorier de l'ASCAMS et à la bonne compréhension des autorités policières qu'ils ont retrouvé la liberté tout en promettant de ne plus s'installer devant l'ambassade et ses abords.
Voilà la situation qu'il m'a été donné de vivre péniblement aujourd'hui avec ces frères portant des vêtements en lambeaux, tachés de sang et les yeux rouges de colère et de haine. Ils ne comprennent

pas que ce soit celui qui est censé assurer leur protection en terre sénégalaise qui les livre ainsi en pâture aux autorités pour le délit d'avoir dormi devant leur ambassade. Pourtant, ils souhaitaient simplement un modeste soutien pour retourner au Cameroun par la route. C'était trop demander à Monsieur Jean KOE NTONGA et ils en ont faitl'amère expérience ce dimanche, Jour du Seigneur.

Trois d'entre eux ont eu plus de chance parce que parlant le patois de l'ambassadeur. Ils ont reçu discrètement une aide et se trouvent actuellement au Bénin, d'où ils ont appelé pour prendre des nouvelles de ceux qu'ils ont laissé derrière eux. Je vous laisse libre de faire le commentaire qui sied.

A la décharge de la police, il faut dire qu'elle n'a fait que son travail face à ceux qui on été présentés comme des voyous et des vagabonds qui troublent la quiétude de notre ambassade. Les autorités de police ont été promptes à nous rendre nos compatriotes car comprenant avec nos explications qu'ils n'avaient commis aucun délit. Ils détiennent tous leurs pièces d'identité camerounaises et leur carte consulaire.

Théodore Dikongue Ekwalla
 

Les contacts téléphoniques  de ces compatriotes en détresse:

1- TAFFO TAGNE Raymond / 76 832 13 29
2- ELAME Mbou / 77 105 96 41
3- EBONGUE WELLANESS EKWALA / 77 682 55 30
4- SOH Cyrille
5- FOKA Hubert
6- NSANGUE Léopold / 77 670 04 44
7- TECNA Bernard / 76 469 06 40
8- MBOUSSEI Germain
9- BAKO Moussa / 77 307 92 49
 

Jean Koe Ntonga : Nous faisons ce que nous pouvons

La réaction de l’ambassadeur du Cameroun au Sénégal

Les Camerounais peuvent sortir comme ils veulent parce que le Cameroun est un pays de libertés et d’ouverture. Certains vont en aventure espérant trouver une vie meilleure en Europe. Sur le chemin de l’Europe, ils se retrouvent au Maroc, en Mauritanie, en Tunisie ou au Mali. Quand ils sont refoulés de ces pays, ils se retrouvent à Dakar et courent à l’ambassade pour demander de l’aide.

Nous faisons ce que nous pouvons avec les moyens dont nous disposons ; j’ai eu à aider plusieurs d’entre eux, avec les moyens de l’ambassade ; nous les  « dépannons» quelquefois ; certains arrivent ici sans passeport et nous leur délivrons des sauf-conduits pour pouvoir rentrer au pays… Cette assistance consulaire est gratuite.

Mais ils doivent savoir que l’ambassade n’a pas les moyens pour s’occuper de ces cas. L’ambassade défend les intérêts des Camerounais avec les moyens dont elle dispose. Les moyens que nous recevons servent en priorité à renforcer les relations entre le Cameroun et le Sénégal. En ce moment, on peut dénombrer une cinquantaine de refoulés ; faites le compte, s’il fallait payer des billets d’avion à tout ce monde… Ce serait ouvrir la boite à Pandore.
Ce qui s’est passé est simple. Des refoulés camerounais ont été  recrutés par une entreprise en charge des travaux de réhabilitation de l’ambassade. Pour aider ces frères en difficultés, j’ai offert une chambre à l’ambassade à certains qui travaillaient comme ouvriers dans le chantier. A la fin du chantier, ils ont tous perçu leurs droits  et étaient censés partir. Mais curieusement, certains  sont  restés. Ils sont instrumentalisés par un certain Ekwalla. Ce monsieur se charge de ternir l’image du Cameroun pour des raisons que je n’évoquerais pas ici. Hier soir (dimanche, ndlr), ils sont venus s’installer devant l chancellerie. J’ai fait appel à la police pour les dégager, et  non pour les molester comme le dit M. Ekwalla.  

Je considère que, pour le moment, la sérénité règne au niveau de l’ambassade. Tout marche bien. Si les choses ne marchaient pas, j’en rendrais compte à ma hiérarchie (…) »

Propos recueillis au téléphone par Xavier Luc Deutchoua



04/08/2010
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