Dilemme de fin de règne : Paul Biya, finir comme Eyadema ou Mobutu...

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Mourir au pouvoir ou en exil, voilà l’alternative qu’offrent les appels à candidature pour un nouveau bail de l’actuel président de la République du Cameroun à la tête de l’Etat. Le journal Intégration lance son appel pressant au président Biya, en lui proposant une troisième option.

Allégories contemporaines sur Eyadema et Mobutu

 

C'étaient des hommes de convictions qui, à des moments décisifs, savaient tenir bon. Mobutu Sésé Séko du Zaïre, actuel RDC et Gnassingbé Eyadema du Togo (respectivement 32 et 38 ans aux destinées de leurs pays) avant de «quitter» le pouvoir, étaient aussi des champions d'alliances changeantes dans la géométrie variable. Ils ont toujours su faire taire les rumeurs sur leur état de santé déclinant, pendant que leurs dauphins attendaient impatiemment leur tour. Malgré leurs âges canoniques, ils n’avaient pas songé à nommer de successeur potentiel et assuraient pouvoir gouverner jusqu’à 100 ans. Et le même plaisir prométhéen de jouer avec les humeurs de leurs peuples comme s’il s’agissait des grandes orgues de Notre-Dame étaient leur hobby. Ils étaient des présidents aux multiples surnoms : «Léopard du Zaïre», «Léopard de Kinshasa», « Aigle de Kawele », « Dinosaure du Togo », « Requin de Lomé »…

 

Ils célébraient les anniversaires de leurs arrivées au pouvoir par de multiples défilés populaires, et réjouissances civiles et militaires dans leurs capitales respectives. Ils clamaient même qu’il fallait des élections propres dans leur pays. Les ayant enfin obtenues, dans les conditions de régularité qu'ils avaient longtemps vainement revendiquées, Eyadéma et Mobutu n'allaient pour rien au monde se laisser voler «leur» victoire. Et même avant les « scrutins », ils se vantaient de ne pas avoir  besoin de sortir pour faire campagne. Ils clamaient que leurs compatriotes les connaissaient et savaient les juger.

 

«Malentendus»

Et si les Togolais et les Zairois ne comprenaient pas pourquoi Eyadema et Mobutu se portaient candidats à chaque fois, les malicieux hommes tournaient en argument à leur faveur les désordres ambiants. Et la réprobation du monde entier, les mises en garde de leurs pairs africains? Paris les battait froid, Washington les boycottait, la Banque mondiale suspendait ses crédits. Sous les masques présidentiels, perçait un tempérament coléreux.

Après,  l'armature du Togo et celle du Zaire, jadis sollicité par Mobutu et Eyadema pour porter leur candidature, a volé en éclats, entre «rénovateurs», «barons» et le plus grand nombre» de «mendiants» du pouvoir ou de l'opposition. Tardivement, les deux grands hommes commençaient de se rendre compte qu'ils risquaient de se faire doubler. Pas par quelque dauphin, mais par la mort. Et la mort a fini par les  enfoncer dans un coin. Et bonjour les désordres. Leurs décès semblaient avoir pris de court l’ensemble  des appareils d’Etat. Au Togo où la constitution prévoyait «qu’en cas de vacance de la présidence de la République par décès, la fonction présidentielle est exercée provisoirement par le président de l’Assemblée nationale...»

 

Avant qu’une élection présidentielle soit organisée «dans les soixante jours de l’ouverture de la vacance». Or, deux heures après l’annonce du décès d’Eyadéma, le général Zakari Nandja, chef d’Etat-major de l’armée togolaise, annonçait la nomination à la présidence du fils du président défunt, Faure Gnassingbé, en lieu et place du président de l’Assemblée nationale, Fambaré Natchaba Ouattara, présenté comme « absent du territoire national ». A Kinshasa, le scénario était différent.

 

Mobutu avait quitté le pouvoir dans des conditions de fuites. Les Américains de la CIA lui avaient permis d’échapper in extremis à l’insurrection conduite par Kabila père. Mobutu Sésé Séko s’en ira en exil... au Maroc, faute de mieux. Abandonné à lui-même dans une quasi-indifférence, sans le moindre sou pour ses soins de santé, le dictateur déchu rendra l’âme quelque temps après. Il sera enterré dans son pays d’exil, sans tambours ni trompettes. Triste fin.

 

La troisième option

L’appel conçu et écrit par le journal INTEGRATION pour le Président Biya. Un discours en guise de réponse aux appels à candidature.

 

Mes chers compatriotes,

 

C’est aujourd’hui pour moi, et beaucoup plus que par le passé sans doute, un moment important de m’adresser à vous à cette occasion qui, de mémoire de nos concitoyens, ne rentre pas dans notre tradition républicaine du 11 février et du 31 décembre.

Mes chers compatriotes,

 

Cela fait plus de trente trois ans que je préside aux destinées de notre cher et grand pays. Pendant toutes ces années, tous ensembles, nous avons mené la longue et grande œuvre de construction nationale promise dans la préservation de la sécurité publique et la sauvegarde de la concorde nationale. Ces idéaux qui nous sont chers et qui constituent aussi le socle de notre vivre ensemble ont été doublement célébrés récemment lors des cinquantenaires de l’indépendance et de la réunification.

 

Depuis plus de trente-trois ans, je me suis attelé à réformer en profondeur notre pays, pour lui doter d’institutions fortes et viables. Sur le plan politique, notre engagement à la démocratisation de l’espace public permet, aujourd’hui, l’expression d’une pluralité d’opinions dont le résultat est la cohabitation pacifique d’une multitude de partis évoluant en toute liberté. Les institutions de la République garantissent à ces formations politiques une participation régulière et pérenne aux différents scrutins organisés conformément à notre calendrier électoral et dont la libre expression et la transparence ne sont plus un secret pour personne. Notre démocratie et la stabilité de nos institutions ont plusieurs fois valu à notre pays les encouragements de la communauté internationale et l’inspiration de nombreux pays.

 

Sur le plan économique, après la douloureuse récession des années quatre-vingt-dix, notre pays s’est bien relevé grâce à la capacité de résilience que tous nos partenaires amis saluent en notre peuple. Aux efforts produits par nos concitoyens, aux sacrifices multiples consentis, le Cameroun a réussi à juguler la crise et à reprendre son inexorable marche vers le progrès.

 

Sous mon impulsion, le Gouvernement, tirant tous les enseignements du Document Stratégique pour la Réduction de la Pauvreté, a élaboré et mis en œuvre le Document Stratégique pour la Croissance et l’Emploi. Ce document est notre référentiel, car il démontre bien que toutes nos priorités sont centrées sur la création des richesses et s’appuient sur les créations d’emplois pour assurer une bonne redistribution des fruits de la croissance.

 

Mes chers compatriotes,

 

En dépit de tous les tumultes qui ont jalonné ces trente-trois années d’exercice de pouvoir, rien n’a pu altérer notre détermination à faire de ce pays, un grand pays riche et prospère. Le programme économique du Gouvernement et même le Plan d’urgence triennal s’inscrivent pleinement dans ces orientations de progrès que j’ai toujours voulues pour notre pays.

 

Dans cette mouvance, nous avons lancé dans les régions du pays où les conditions s’y prêtaient, de nombreux projets dits structurants. De la politique des Grandes Ambitions à celle des Grandes Réalisations, tous nos efforts ces dernières années ont été portés sur l’amélioration de l’offre énergétique, la modernisation de notre agriculture, le développement des infrastructures de communication et de télécommunications. La réalisation de ces grands ouvrages donnera à notre économie la texture nécessaire pour inscrire pleinement notre pays dans l’émergence tant souhaitée. Ce n’est pas le moment de sombrer dans l’immobilisme, encore quelques efforts et nous y serons.

 

Mes chers compatriotes,

 

Je vais maintenant aborder avec vous un autre aspect hautement important de la vie de la nation. Notre cher et beau pays s’approche à grands pas d’une échéance décisive: l’élection présidentielle. Le bilan hautement positif que je viens d’évoquer me donne le crédit nécessaire pour solliciter, une fois de plus, le suffrage de notre peuple.

 

Dans cette perspective, j’entends bien l’appel du Nord dont les populations dans leur solidarité agissante ont décidé de regarder dans la même direction pour contribuer à l’œuvre de construction d’un Cameroun uni, moderne et démocratique. Je saisis cette occasion pour réitérer toute ma sympathie aux militants, victimes de l’accident survenu sur l’axe routier Tcholliré- Garoua alors qu’ils se rendaient à un meeting politique ;

 

J’entends également l’appel du Centre dont les élites  portent au pinacle l’aspiration de leurs populations à m’engager de nouveau à les représenter à cette consultation électorale;

J’entends aussi l’appel du Nord- ouest par lequel certains militants ont ouvertement appelé à une anticipation du scrutin présidentiel ;

 

J’entends tout autant l’appel de l’Ouest dont l’invitation à me présenter à cette importante échéance n’a pas manqué de mettre en avant l’intérêt de s’arrimer aux textes du parti par l’organisation d’un Congrès qui validerait le candidat du parti;

 

Je perçois bien tous ces appels qui viennent de différentes régions, de diverses ethnies, de différents corps socioprofessionnels de notre pays. Loin d’être une complainte collective, ces appels du peuple sonnent et résonnent avec insistance. Nul ne saurait demeurer sourd à de tels cris, à une telle mobilisation, à l’expression d’une volonté aussi soutenue de voir ma modeste personne faire de nouveau acte de candidature à la magistrature suprême.

 

Mes chers compatriotes,

 

En 2018, j’aurai passé trente-six années à la tête de notre cher et grand pays. Trente-six années de charge passionnante et exaltante. Trente-six années au cours desquelles j’ai servi pleinement mon peuple, protégé notre constitution, préservé l’unité nationale et sauvegardé l’intégrité de notre pays. Nous sommes sur la bonne voie, et aucune circonstance ne peut, au regard des projets en cours, nous détourner du chemin de cette émergence qui nous tend les bras. Je connais mieux que personne la formidable énergie qui est celle de ce peuple résolu à assumer son propre destin, à résister aux habiles sirènes de la division.

 

Mes chers compatriotes,

 

C’est conscient de ces atouts reconnus à la nation forte et indivisible qui est la nôtre que je Renonce à anticiper la prochaine élection présidentielle. J’ai déjà eu à le dire : la présidentielle de 2018 est certaine, mais encore lointaine. Et je vous engage une fois de plus à faire chaque chose en son temps. Terminons sereinement ce mandat des Grandes Réalisations. Et le moment venu, j’aviserai sur mon avenir politique. En attendant, continuons à travailler durement, pour préserver par la stabilité politique de notre pays les acquis de mes trente-six années de magistrature suprême. D’ores et déjà, je m’engage résolument auprès de notre peuple à favoriser davantage l’émergence d’une compétition saine entre les candidats des différentes formations politiques dans la perspective des futurs scrutins.

 

 
Je puis vous assurer que je ne ménagerai aucun effort pour accompagner les institutions de la République, les partis politiques et l’ensemble du peuple Camerounais dans ce processus qui nous conduira en 2018, année électorale par excellence pour notre pays.

Vive le Cameroun !

 

Texte conçu, écrit et proposé à S.E. Paul Biya par la rédaction du journal INTEGRATION



23/03/2016
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