Détentions arbitraires dans les cellules : une pratique courante

Cellule Prison Dla:Camer.beDe nombreux citoyens sont parfois détenus illégalement dans les cellules des commissariats et des brigades de gendarmerie, sans aucun mandat signé du procureur de la république, et parfois, à l’insu du principal responsable du service.Les commissariats  de police et les brigades de gendarmerie, sont très souvent des lieux où l’on peut  observer les meilleurs exemples de violations des droits et des libertés.

Et pourtant, le législateur a mis en place, tout un arsenal juridique, à travers le Nouveau code de procédure pénale pour la protection des droits des citoyens et des libertés. Malheureusement, certains agents de police et de gendarmerie, posent chaque jour, des actes qui vont à l’encontre de la loi, et s’arrogent le pouvoir d’incarcérer les citoyens, parfois sans motif valable. Une situation que déplore Me Antoine Pangué : « Ce sont les officiers de police judiciaire qui sont compétents pour ordonner des mesures de garde à vue. Il est vrai que sur le terrain, nous constatons que certains hommes en tenue (des policiers, des gendarmes), qui n’ont pas la qualité d’officier de police judiciaire, s’octroient le droit, la compétence pour ordonner des gardes à vue. Il s’agit dans ces cas, de gardes à vue abusives, parce que, n’est pas officier de police judicaire tout homme en tenue ». Ce qui en est à l’origine, c’est la corruption qui gangrène notre pays. En effet, dans les commissariats de police  et les brigades de gendarmerie, c’est celui qui possède de l’argent  qui a le droit. Il peut ainsi jeter en cellule  qui il veut, et quand il veut. Cette situation, de nombreux Camerounais en ont déjà été victimes, et lorsqu’ils en parlent,  on a comme l’impression  que notre pays est encore loin d’être un Etat de droit dont on nous parle chaque jour dans les discours politiques.

De nombreux exemples sont là pour le confirmer.  Nous avons  encore en mémoire, le  scandaleux enlèvement, le 24 janvier 2011,  du  Père François –Marie Gnami Kasco  dans  son presbytère par deux gendarmes, puis, conduit à Yaoundé.  De même,   pour une histoire de résidus de  bois dont la valeur marchande n’atteignait pas 20.000 Fcfa,   Pierre T, un jeune homme  habitant le quartier Ndogpassi II  à Douala,  a passé trois jours dans une cellule du Commissariat du  14e arrondissement de Douala. Le plaignant avait soudoyé un inspecteur de police pour la besogne, à l’insu du commissaire !

Dans ce contexte, c’est l’argent qui fait le droit. Force n’est plus au droit, mais à l’argent, car celui qui  en possède peut se permettre toutes les exactions. Avec une certaine réserve, mentionnons tout de même  que ces abus  sont le plus souvent perpétrés par des agents de l’ordre, non pas au nom de la loi, mais à leur nom propre, dès lors qu’ils ont été  corrompus. C’est donc pour cela que dans nos quartiers, pour  une affaire banale qui  nécessite un simple dialogue, un citoyen peut se retrouver dans une cellule,  sans aucune convocation, ni un mandat signé du Procureur de la République. Le citoyen Jacques Désiré Talla, un aviculteur de Bafoussam en sait quelque chose, lui qui a passé huit jours dans une cellule du commissariat central de la même ville, sans aucun mandat !

A regarder de près, on constate que beaucoup parmi les agents des forces de l’ordre, ne lisent presque pas le Nouveau code de procédure pénale. Même quand ils le lisent, ils l’appliquent non pas dans le sens de  la protection des libertés, mais dans le but de maintenir le pays dans un environnement de non droit. En rappel, le Nouveau code de procédure pénale dans sa section IV, traitant de la garde  à vue, donne des précisions irrévocables :
Article 118  (1) : la garde –à-vue est une mesure de police en vertu de laquelle une personne est, dans le cas d’une enquête préliminaire, en vue de la manifestation de la vérité, retenue dans un local de police judiciaire pour une durée  limitée, sous la responsabilité d’un officier de police à la disposition de qui il doit rester.
(2) : Toute personne ayant une résidence connue, ne peut, sauf cas de crime ou de délit flagrant, et s’il existe  contre elle des indices graves et concordants, faire l’objet d’une mesure de garde-à-vue.
(3) : En dehors des cas prévus aux paragraphes (1) et (2), toute mesure de garde-à-vue doit être expressément autorisée par le Procureur  de la République.

© L'Effort Camerounais : Sylvestre Ndoumou


16/11/2012
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