Déploiement : Comment Tabi Manga et Bekolo Ebe sont tombés

Entre fautes de gestion, mises en débet des responsables des universités de Douala et Yaoundé II, mouvements d’humeur estudiantins, et revendications des personnels enseignants et d’appui, une partie de l’université était devenue explosive, au point où, le chef de l’Etat a cru devoir siffler la fin de la récréation pour certains d’entre eux le 29 juin dernier. Ambiance dans les campus après les nominations d’Oumarou Bouba, Maurice Aurélien Sosso, Dieudonné Oyono et Nalova Lyonga Pauline Egbe.

 

Campus de l’université Yaoundé II à Soa le 29 juin 2012. La police a investi le campus aux premières heures de la matinée. Cet important déploiement sécuritaire vise à contrer les velléités de déstabilisation du rectorat, initiée par un mouvement estudiantin spontané, dénommé «sauvons l’université», dont les seuls desseins sont adossés sur le départ du recteur Jean Tabi Manga. C’est ainsi que pour rentrer dans l’enceinte du temple du savoir de Soa, chaque étudiant doit montrer patte blanche. Les membres du collectif qui a pour porte-parole Denis Atangana, et dont les revendications portent également sur la démission des doyens Georges Kobou et Emmanuel Victor Bokalli, ont entrepris de marcher dans le campus ce vendredi. Mais leurs ambitions sont anéanties par cette importante présence policière. Ces derniers interpellent Denis Atangana devant le campus alors qu’il vient honorer son évènement. Il est conduit au groupement mobile d’intervention de la police (Gmi) à Nkolfoulou. 

Alors qu’ils souhaitaient rencontrer le recteur de l’Université de Yaoundé II à Soa, pour en savoir plus sur les motifs de l’enlèvement de Denis Atangana et le lieu de son incarcération, Hervé Nzouabet, Président du conseil exécutif de l’Association de défense des intérêts des étudiants du Cameroun (Addec), Njonkou Souleyman, secrétaire aux Logements, et Barthélemy Ndemanga, un membre de cette association, sont arrêtés par les éléments du Commissariat de Sécurité Publique de Soa. Du coup, la marche est mise en veilleuse et plus rien ne bouge. Pendant ce temps, dans le campus, le recteur parade dans les allées et les amphis. Pour lui, la situation est sous contrôle.  Il fait une visite improvisée de l’établissement et promet des améliorations dans plusieurs domaines à certains étudiants rencontrés sur la route de son périple. C’est chemin faisant, aux environs de 13h, qu’un décret du chef de l’Etat accède aux revendications de Denis Atangana et de ses amis du collectif «sauvons l’université» : Jean Tabi Manga est viré de ses fonctions de recteur de l’université de Yaoundé II en remplacement d’Oumarou Bouba. 

A Yaoundé II, le collectif dirigé par Denis Atangana avait fondé ses revendications sur les résultats du Conseil de discipline budgétaire et financière (Cdbf) qui avait épinglé Jean Tabi Manga dans son rapport. Aussi avaient-ils, «trouvé inconcevable de se faire encadrer et former en droit, en sciences politiques en  économie, et, pire, en gestion, (les gestionnaires du Cameroun de demain) par des supposés intellectuels qui sont incapables de gérer le budget d'une petite Université comme Yaoundé II». Dans leur lettre ouverte à l’ex-recteur, ils écrivaient : «Nous avons constaté que ces enseignants, (…) pourtant conscients, allaient à l'encontre de la politique des grandes réalisations du président de la République.» le Cdbf, dans son dernier rapport avait décelé des fautes de gestion dans la manière du recteur de conduire les affaires à l’Université ; aussi avait-il mis en débet Jean Tabi Manga pour la somme de 64 millions de Fcfa.  

A Douala, Bruno Bekolo Ebe, est en plein conseil d’administration. Epinglé lui aussi par le Conseil de discipline budgétaire et financière, il sera surpris par le décret du chef de l’Etat alors qu’il débat avec les administrateurs de cette institution sur bien des dossiers. «Je remercie le chef de l’Etat pour la confiance qu’il a placée en moi parce que j’ai dirigé l’université pendant 14 ans et je reste disposé à servir l’université comme enseignant et chercheur», déclare au sortir de ce conclave écourté par la bourrasque présidentielle. Au sein de ce campus, il n’aura pas eu un bail tranquille. Entre les revendications foncières des dernières semaines et les scandales financiers, Bruno Bekolo Ebe a soufflé le chaud et le froid. Pour le remplacer, le chef de l’Etat a choisi Dieudonné Oyono, enseignant de relations internationales et actuel coordonateur du programme national de bonne gouvernance.

L’université de Buéa était devenue le terrain privilégié des revendications estudiantines. Quand ces derniers ne mettaient pas le feu au campus ou dans la ville pour faire entendre leurs voix, ce sont les enseignants et les personnels d’appui, qui montaient au créneau pour exiger de meilleures conditions de travail. Vincent Titanji qui a eu à faire face en sept ans à pas moins d’une dizaine de mouvements de grèves tant du personnel enseignant, non enseignant que des étudiants est limogé par le même décret du 29 juin 2012. Nalova Lyonga Pauline Egbe, jusqu’alors deputy chancelor de cette université, prend les commandes.

Pour beaucoup, les cop’s ont eu le scalp des recteurs Tabi Manga et Bekolo Ebe, suite aux fautes de gestion décelés dans leur manière de gérer. Le mouvement estudiantin «sauvons l’université», précurseur des malheurs des uns, voit encore ses membres interpellés au commissariat de sécurité publique de la ville de Soa. Le commissaire Akono indique pour sa part que ces étudiants ont été interpellés sur ordre du délégué général à la Sûreté nationale. Aussi ne peut-il pas se prononcer sur la relaxe de Denis Atangana et de ses amis de l’Addec. «Ça ne se gère pas à mon niveau ; il faut appeler le délégué général à la Sûreté nationale pour savoir ce qui leur est reproché. Je sais que je les ai entendus pour le reste, c’est le délégué qui doit me donner l’ordre de les libérer», tranche le commissaire.

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02/07/2012
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