Crise sociale au Cameroun: Le président de la CSTC met en garde le gouvernement

Amougou Zambo:Camer.beAu travers d’un entretien à bâtons rompus, Zambo Amougou Jean Marie, envoie certes un regard rétrospectif vers l’année 2012 écoulée, mais dans une analyse objective reste sur ses gardes devant le flux d’emplois décents potentiels dans l’entame des grands chantiers....

Monsieur le Président, pouvez-vous nous brosser un bilan de l’année écoulée ?

Nous avons été fidèles à notre raison d’être c’est-à-dire d’étude, de conquête et de défense des droits et intérêts des travailleurs, principalement dans le champ des métiers des grands travaux comme c’est le vocable consacré où malgré la mise à l’écart du syndicat dans l’élaboration des projets, le syndicat a fini par y être présent parce que dès qu’il y a mouvement de grève, comme « DIEU », le syndicat s’est trouvé présent. Nous avons réussi à ce jour à faire corriger plusieurs contrats d’employés des chantiers car au-delà du regroupement, l’expertise qu’apporte la CSTC a permis à bon nombre d’employeurs de comprendre qu’ils vaudraient mieux s’arrimer pour l’amélioration des conditions des travailleurs que de faire un bras de fer qui occasionnera des arrêts intempestifs de travaux suite aux mouvements d’humeur de leurs employés.

En parlant du chantier de Lom Pangar par exemple, quels ont été vos acquis ?

Nous avons pu relever 30% des contrats et la mise sur d’un département de ressources humaines qui n’existait pas. Actuellement à part le directeur des ressources humaines, un personnel additif y est affecté. Nous avons demandé le renforcement de l’encadrement des camerounais employés dans ce chantier. D’augmenter de façon significative les cadres camerounais du chantier. L’une des conséquences de ses réformes a été entre autre l’augmentation d’un montant de 5 000 Fcfa sur la ration mensuelle. Mais pour moi, la principale victoire sur ce chantier a été l’instauration du dialogue social sur nos revendications. Avec l’élaboration hâtive du projet pour financement, bon nombre de pan n’ont pas été explorés entre autres les problèmes de nutrition, de transport, de sécurité sociale, etc ; toutes choses existants déjà dans d’autres chantiers. Si ces charges n’avaient pas été prévues dans le budget des chinois qui ont été adjudicataire, nous avons proposé au gouvernement de donner soit un avenant soit de piocher dans nos ressources pour régler ce problème. Il n’est pas bien qu’un dumping social soit constaté alors que des uns s’engraissent sur le dos des travailleurs.

On a vu l’année dernière au PAD (Port Autonome de Douala) une grève qui a fait « débarquer » Dayas Mounoume par ailleurs Directeur général de cette structure au profit d’Emmanuel Etoundi Oyono actuel DG. Croyez-vous que les revendications des employés sont aujourd’hui réglées ?

Pour le PAD, je dirais que quand on se trompe de pas, il vaut mieux recommencer. L’ancien nouveau directeur général de part les conditions de rémunération dont il avait mis sur pied, avait fait en sorte que le personnel le prenne comme un messie. Je n’ose pas le qualifier en nombre de mois de salaire, mais pour cela, la rémunération qui était donné à ces travailleurs les mettait hors de portée de certaine manipulation. C’est ainsi dommage pour des gens sensés exécuter un programme gouvernemental, mais qui arrivent avec des leurres qui ne pouvaient conduire qu’à ce débarquement.

La CSTC cette année qui passe a « noyé » une grande grève à la SOSUCAM Mbandjock qui a fait quelques morts. Quels sont les acquis de cette grève aujourd’hui ?

L’intervention lors de celle-ci pour moi est la reconnaissance qu’il y a un Etat de droit qui existe. Dans ce litige, nous avons vu le bras de fer qui s’est effectué entre le chef de terre (sous-préfet) et un jeune administrateur du travail qui ne demandait qu’à faire son travail. Ce jeune dans sa démarche a tout fait pour appliquer le droit en matière de travail et il a même été félicité par courrier par l’ensemble du personnel de la SOSUCAM. Il faudrait que les autres administrateurs du travail sachent que le syndicat n’est pas là pour les critiquer mais pour donner un coup de main pour l’amélioration des conditions de travail des camerounais. C’est vrai qu’il y a eu mort d’hommes mais nous noterons que la négociation a prévalu jusqu’à la fin. Dans les coulisses, nous ne savons pas ce qui s’est dit entre les familles des victimes et l’administration de la SOSUCAM, mais qu’à cela ne tienne, nous nous réjouissons de ne voir sur la place publique les plaintes de celles-ci. Tous les délégués du personnel qui avaient été menacés de licenciement et d’emprisonnement sont en activité jusqu’aujourd’hui.
C’est l’occasion de dire que le syndicat est certes un mouvement de critique, mais d’entente et de solution comme un chien qui aboie sur quelqu’un qui a des intentions ; si elles sont mauvaises, se fera mordre et si elles sont bonnes permet d’avancer sans craintes. Pour la petite histoire au moment où la base arrivait à douter sur la capacité du syndicat à mener à terme les négociations, nous avons répondu à leurs attentes.
 
Quelles sont les perspectives de la CSTC pour 2013 ?

Pour le moment, c’est d’exploiter à fond le gisement d’emplois des grands chantiers dans le domaine du travail décent. C’est-à-dire faire en sorte que les travailleurs puissent effectivement bénéficier de leurs situations de travailleurs parce que le tout est de quitter le chômage pour retrouver un emploi, mais étant dans l’emploi il faudrait que les conditions soient égales. C’est la même chose pour les 25 000 recrutés dans la fonction publique que j’appelle de tout cœur à se regrouper dans un syndicat propre à eux avant de s’arrimer à une centrale syndicale. Donc se sont eux-mêmes qui devrait se regrouper pour porter leurs revendications sur la place publique.
Dans le contexte des 25 000, nous avons vu des reclassements qui ne tiennent sur aucun critère bafouant les barèmes préétablis par l’Etat. C’est ainsi qu’on voit des personnes qui méritent la 7e catégorie être à la 5e. Pour exemple, les CAP technique qui doivent être classé en 7e catégorie ne le sont pas. Du point de vue d’un contrat particulier signé par eux, nous pensons que l’Etat doit se ressaisir car quelque soit le cas même si cela mettra des années compte tenu du fait de la possession des dossiers de l’offre initiale, cette revalorisation forcement sera posée sur la table et il y aura des rappels sur salaire. Il faut donc que l’Etat se remette en cause et rectifie le tir quant il est encore temps.
Il y a aussi cet épineux problème d’assurance maladie car comme vous le savez le Chef de l’Etat a promis aux Camerounais lors de sa campagne d’instaurer une assurance maladie. Donc vivement qu’en 2013, elle soit mise en place avec dans ce package la réforme globale sur la sécurité sociale c'est-à-dire un re-paramétrage total qui nous met en phase avec ce que l’OIT (Organisation Internationale du Travail) appelle «les socles nationaux de protection sociale». Celle-ci vient d’être appliqué dans sa phase concrète avec dernièrement le décret réorganisant et revalorisant la profession des policiers.
Nous voulons un relèvement de l’âge de la retraite parce que nous demandons qu’il intervienne à 65 ans au lieu de 60 ans. Relever le taux de contribution pour les  pensions vieillesse et invalidité. Ce qui permettra à la CNPS de compenser le déficit actuel parce que les gens voient simplement le relèvement de l’âge de la retraite comme un frein de l’emploi jeune, non ! Cette tranche de 5 ans permet à la sécurité sociale de prélever encore plus de fond pour créer des emplois futurs.
Dans le domaine de l’agriculture, nous pensons que celle annoncée de seconde génération devrait véritablement mise en œuvre par une opération « douloureuse » si on peut dire ainsi. Pour exemple aujourd’hui, si vous donné à un jeune deux hectares titrés avec restriction de muter ce terrain en construction, le rendement agricole qui sortir en tenant compte du potentiel domanial camerounais permettra d’atteindre cet autosuffisance alimentaire tant souhaité de part la variation des cultures qui en sortiront. Nous ne devons pas toujours attendre des financements de l’extérieurs ou le moment où les pontes du régime s’accapareront toutes les terres pour comprendre qu’il est nécessaire de faire une vraie réforme agraire ! Il y a des zones d’habitations où un certains nombre de personnes se sont accaparés des terres mais au point de vue national cette terre appartient d’abord à l’Etat. Ce n’est pas parce que vous avez d’énormes moyens financiers que vous devez narguer la population car pour ceux qui ont gardé cette terre depuis des siècles qu’est ce qui en bénéficieront.

Aujourd’hui on ne voit pas trop la CSTC dans les secteurs comme la téléphonie et en général dans le secteur privé, alors même que dans sa dénomination primaire, elle devrait s’occuper du secteur informel. Es-ce un manque de sensibilisation ou de syndiqués ?

Je tiens d’abord à vous dire que nous avons été les premiers à défendre les callboxeurs qui avaient été menacés « d’extinction ». Pour votre gouverne, une structure syndicale est d’abord animée par les adeptes et non le président confédéral. Mais le président peut encadrer et relancer. Lorsqu’on voulait fermer les travailleurs du secteur de la bureautique et du callbox, nous avons mis sur pied un syndicat pour protéger leur droit. Certaines personnes ne se rendent pas compte que c’est un travail de longue haleine et que lorsqu’on vous retrouve dans des séances protocolaires c’est ça le syndicat. Pour ma part, le syndicat c’est discuter avec des gens, élaborer des stratégies pour mieux penser le travail, etc. Autant le secteur est porteur autant les individus semblent ne pas s’organiser. Vous avez souvent une chaîne qui comporte les grossistes et les détaillant, ceux des grossistes qui croient qu’ils peuvent faire seuls se trompent car chaque maillon de la chaîne est important. Imaginons-nous simplement une grève des porteurs, comment ces grossistes feront alors pour transborder leurs marchandises.

Y a-t-il eu brouille en début d’année avec le ministre du travail et de la sécurité sociale qui semblait valider une autre CSTC faction NTONE DIBOTI ?

Non. Tout simplement, il y a eu méconnaissance des textes qui régissent le syndicat. En aucun moment nous n’avons été mis de côté contrairement à ce que vous avez entendu. Nous avons été au four et au moulin à HEVECAM, où nous avons bu de la poussière pour lever cette grève des « seigneurs » de l’Hévéa ; mais en cela il faut comprendre que cette faction dont vous parlé n’est en aucun cas représentative et on tenté toute l’année d’induire le ministre en erreur. Le ministre avec le temps mis actuellement en poste s’est déjà rendu compte avec qui il doit travailler. Certes la représentativité doit se renforcer, c’est la raison pour laquelle nous essayons tant bien que mal de conquérir dès que possible les secteurs d’activités de notre portefeuille. Les derniers résultats par ailleurs des délégués du personnel au niveau national nous mettent en tête des syndicats avec plus de 50% de représentativité. Cette brouille passagère avec la tutelle  a tout de même porté un coup au syndicat parce que les idées émises par ceux-là qui n’en font pas partie n’allaient pas dans le sens de l’intérêt des travailleurs.
En 2011 à Genève, nous avons été délégué travailleurs lors de la conférence internationale de OIT ; cela veut dire ce que cela veut dire. En 2012 également, c’est moi qui ai voté en lieu et place de tous les travailleurs du Cameroun et je crois que l’enjeu était énorme. Je crois donc que ceux qui n’ont pas eu cette onction se sont mis tous ces derniers temps à écrire que nous sommes pro-gouvernementaux, pro-OIT ; finalement la CSTC est le meilleur caméléon c’est-à-dire que nous savons nous adapter pour mieux nous battre. De ce point de vue nous pouvons dire que nous sommes partenaire du gouvernement dans la recherche de meilleures conditions de vie des travailleurs.

Nous avons vu la mise à l’écart lors de la signature des conventions d’octroi des licences minières comme dans le cas de Mbalam. Où sont passés les syndicats ?

Je crois que vous n’avez pas la bonne information. Il y a des stratégies lorsque vous allez par exemple demander la main d’une femme, le plus important étant l’objectif final. Nous avons au Cameroun pas moins de 5 centrales syndicales représentées et je puis vous dire que la bataille est rude.
Nous avons la capacité de donner des points de vue sur les problèmes qui concerne le pays sans demander l’avis de la hiérarchie comme le font les fonctionnaires ; ce qui nous place en très bonne posture aujourd’hui par rapport à ceux-là qui devraient avoir une certaine discipline mais dans une optique constructive.

Quelle est la position de la CSTC par rapport au Budget Programme de l’Etat ?

Pour nous c’est le retour à l’ancienne méthode de plan quinquennaux qui a simplement changé de nom pour faire croire que le concept à changé. Comme je l’ai toujours dit : « lorsqu’on se trompe de pas de danse, on recule ». Nous avons des budgets programmes des sociétés qui sont montés sur cinq ans depuis toujours. C’est un plan d’action humaine et comme tout plan, il nécessite une planification ou projection. Pour mieux nous emprunté de l’argent, les bailleurs nous ont confiné dans le budget annuel qui n’a donné aucune solution. Il y a donc eu un problème entre un travail sur les moyens et un travail sur les projets. Avec ce nouveau budget programme, nous savons que nous allons éviter les sorties de champs c’est-à-dire que malgré le balbutiement des opérations, c’est l’objectif final qui est comptabilisé. Il sera difficile de modifier un programme au cours d’un cycle et si vous le modifier, il faudra avoir des arguments de taille. Nous approuvons cette nouvelle méthode.

Est-ce que la CSTC a des revendications par rapport à la gestion de l’Etat ?

Je poserais d’abord la question de savoir qui a plus revendiqué au Cameroun que nous ? Un rôle que les gens oublient c’est que le syndicat est là pour négocier et se concerter. Un syndicat n’est pas là pour casser ou se mettre le gouvernement à dos, or le public ne voit que les 1 fois sur 10 lorsqu’il y a revendication mais ne voit pas lorsque le syndicat réussi la négociation. Il n y a nullement de complicité entre le gouvernement et les syndicats mais le fait que nous soyons dans une même communauté de vie ne permet pas de faire croire qu’après une certaine « bataille », on se regardera en chien de faience.

© Camer.be : Y.E


21/01/2013
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