Côte d’Ivoire : Les Ivoiriens entre deux coups d’Etat

Côte d’Ivoire : Les Ivoiriens entre deux coups d’Etat

Côte d’Ivoire : Les Ivoiriens entre deux coups d’EtatAu coup d’Etat électoral de Laurent Koudou Gbagbo, Allassane Dramane Ouattara oppose un coup d’Etat militaire. Les rebelles ouattaristes maculent ainsi la victoire internationale d’Allassane du sang des Ivoiriens. La prise d’Abidjan, même si elle survenait aujourd’hui, serait le début d’une nouvelle guerre. Au regard des résultats de la mission internationale d’enquête et de médiation commise par l’Union Africaine, on est bien obligé d’admettre que l’installation de Laurent Gbagbo sur le fauteuil présidentiel est le fruit d’un hold-up du Conseil constitutionnel ivoirien.

Dans de nombreux pays où cela s’est passé ainsi, les candidats déclarés perdants par les institutions de droit se sont généralement retirés ou ont alors accepté des solutions de compromis. Mais en Côte d’Ivoire, l’opposant Allassane Drame Ouattara veut “ récupérer ” contre vents et marrées “ sa place volée ” par le régime Gbagbo.

L’ancien Premier ministre d’Houphouët Boigny dont les résultats provisoires de la Commission électorale indépendante donnaient gagnant à l’issue du scrutin du 28 novembre a ainsi armé des rebelles qui tiennent des positions fortes dans le nord du pays depuis le coup d’Etat d’octobre 2002. Depuis lundi de la semaine dernière, les rebelles ouattaristes que France 24 considère désormais comme “ l’armée républicaine de Côte d’Ivoire ” ont attaqué simultanément sur trois fronts et occupé des villes du nord, du centre, et de l’est. Ils sont désormais à Abidjan, le cœur du pays, où ils se battent pour déloger Laurent Gbagbo de la résidence présidentielle.
 
Carnage rebelle

Selon Rfi, les rebelles de Ouattara n’ont presque pas trouvé résistance des Forces armées nationales de Côte d’Ivoire (Fanci) sur la route d’Abidjan. Dans la capitale économique où les forces de l’Onuci contrôlent l’aéroport, paralysant de fait toute action aérienne des Fanci, les rebelles ouattaristes ont d’abord pris d’assaut la Radio télévision ivoirienne. Mais ceux qui pensaient que Gbagbo  tomberait avant le week-end se sont trompés. La Rti a été libérée par une faction des Fanci, tout comme la résidence présidentielle reste imprenable. Dans un message diffusé en mi-semaine, le candidat Ouattara a appelé les Fanci à rejoindre les rebelles ; certains se sont d’ailleurs rangés à leurs côtés. Mais il reste un carré de fidèles qui continuent de soutenir le président Gbagbo.

La vie est au ralenti à Abidjan. Les habitants se terrent chez eux de peur d’être touchés par des balles perdues. Les Nations unies qui encouragent pourtant l’accession de Ouattara au pouvoir dénoncent une boucherie humaine exécutée par les rebelles. Ces derniers connaissent bien manier les armes mais n’ont pas véritablement conscience des enjeux de l’agenda politique : comment gouverner des gens que l’on massacre ? Un charnier de 800 morts vient d’être découvert. C’est vraisemblablement l’œuvre des rebelles qui tentent de faire porter la casquette aux Fanci. Tous les pronostics convergent vers une expulsion rapide de Laurent Gagbo du palais et l’installation du candidat Ouattara en ses lieu et place.

 
Institutions entre parenthèses

La prise de pouvoir par les armes risque de poser un problème juridique. Elle met les institutions ivoiriennes entre parenthèses : la constitution ne prévoit pas ce mode de dévolution du pouvoir, la Cour constitutionnelle a proclamé un autre président, le Conseil a reçu son serment et l’a investi, etc. Si l’histoire retient finalement que Ouattara a accédé au pouvoir par coup d’Etat, il faudra alors s’attendre à une gestion d’exception si les choses doivent se passer “ normalement ”. L’accession de Ouattara à la magistrature suprême par les armes marquera le début d’une nouvelle guerre, car de nombreux Ivoiriens n’accepteraient pas, malgré les fautes de Gbagbo, que les institutions de leur pays soient ainsi anéanties. Par ailleurs, certains gbagbistes qui courent le risque d’être pincés par la justice internationale, sont prêts à se battre jusqu’à la dernière goutte de sang, ou alors à gagner le maquis et à prendre les armes s’ils sont évincés.

La Côted’Ivoire n’est pas le seul pays africain où un candidat est spolié de sa victoire. C. Dalein Diallo, le candidat malheureux à la présidentielle guinéenne, affirmait à l’issue du scrutin qui a donné Alpha Condé vainqueur qu’il avait les arguments pour montrer qu’il y avait eu fraude ; mais il a préféré se retirer pour éviter un nouveau cycle de violence au peuple guinéen. Au Kenya et au Zimbabwé, Railla Odinga et Morgan Tshwangirai ont beau contester le hold-up de Kibaki et de Mugabé, ils n’ont jamais pris les armes contre le pouvoir établi par les institutions, même si celles-ci avaient agi contre la volonté populaire.  Décidément, Ouattara s’était bien préparé pour accéder à la présidence ivoirienne, par les urnes comme par les armes. C’est un candidat exceptionnel qui ne recule pas devant le sang.

© Le Messager : Ibrahim FALL


04/04/2011
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