Côte-D'ivoire/ Réconciliation : Ouattara veut il relever le défi ?


Le 22 Novembre 2012, la CPI rend public un mandat d'arrêt contre Simone Gbagbo, l'ex première dame de côte d'ivoire. Cet acte vient remettre au devant de la scène l'épineuse question de la réconciliation dans ce pays encore profondément affecté par la crise post-électorale de 2010-2011. Alors que le FPI dénonce un « acharnement » et« mandat d'arrêt injuste », Le gouvernement tempère en disant se donner du temps pour la réflexion sur transfèrement ou non à la Haye.

Le 22 Novembre 2012, la CPI rend public un mandat d'arrêt contre Simone Gbagbo, l'ex première dame de côte d'ivoire. Cet acte vient remettre au devant de la scène l'épineuse question de la réconciliation dans ce pays encore profondément affecté par la crise post-électorale de 2010-2011. Alors que le FPI dénonce un « acharnement » et « mandat d'arrêt injuste », Le gouvernement tempère en disant se donner du temps pour la réflexion sur transfèrement ou non à la Haye.

lorsque Alassane Ouattara Le 21 mai 2011 prend officiellement la tête de la Côte d'ivoire à Yamoussoukro , il hérite d'un pays  défiguré par une décennie de crises politico-militaires, Une économie exsangue et un tissu social fortement miné par la corruption et la haine tribale. Un pays ruiné et au bord du Chaos selon ses propos.

Lors de son discours d'investiture, il a pris plusieurs engagements  vis-à-vis du peuple ivoirien dont les plus importants semblaient être : La relance de l'économie ; La création des emplois pour les jeunes ; l'instauration d'un Etat de droit et enfin la réconciliation des ivoiriens. Si les trois premiers peuvent paraitre lui être à portée de main vu son passé d'économiste chevronné et de grand argentier, habitué des couloirs des plus grandes organisations internationales, la réconciliation quant à elle fait appel à  d'autres aptitudes notamment : le pardon, la capacité à dominer et à faire dominer les rancœurs et la volonté de se tourner résolument vers l'avenir. Le président Ouattara dans ce discours disait :

« A tous les fils et  filles de ce pays, à tous ceux qui vivent sur notre sol, je veux lancer un message solennel à la réconciliation, au rassemblement et à l'espérance... » 

« ... Célébrons à travers la cérémonie d'aujourd'hui, non pas la victoire d'un camp sur l'autre, mais la fraternité retrouvée et l'amorce d'un nouveau départ... » 

«...Ce vaste chantier de la réconciliation sera l'occasion pour tous les Ivoiriens de faire définitivement le deuil de nos rancœurs, de panser nos plaies, d'expier les fautes individuelles et collectives et d'écrire une nouvelle page de notre histoire. »

Seulement, près de deux ans après ce discours plein d'humilité et de bon sens, le processus de réconciliation demeure au point mort. Le pays semble sclérosé, les différentes parties protagonistes de la crise qui a fracturé le pays semblent chacune plus radicale que jamais.

Si Mandela et Kagamé ont pu réconcilier leurs pays après de fortes secousses sociales, le souhait de tous les observateurs est de voir la côte d'ivoire cicatriser définitivement ses plaies et redevenir ce creuset de paix et d'intégration qu'elle n'aurait jamais du cesser d'être. Que manque t-il le plus au Chef de l'Etat pour rassembler et réconcilier les ivoiriens ? La volonté ou les moyens ?

Justice des  vainqueurs?

Dès la soirée du 11 Avril 2011 Le président Ouattara a tenu à rassurer les ivoiriens et la communauté internationale : « Tous ceux qui ont commis des exactions seront jugés ». Seulement à ce jour, seuls : Laurent Gbagbo (ancien Chef d'Etat) ; Sa femme Simone Ehivet  ont fait l'objet de mandats d'arrêts internationaux ; Seuls  le Général Dogbo Blé brunot et quatre autres officiers Pro-Gbagbo ont été condamnés. Seuls des cadres du FPI (parti de Gbagbo) restent encore en détention dans le nord du pays (sans jugement pour la plus part) ; Seuls des dirigeants du FPI se font arrêter pour la moindre incartade ; Seuls les meetings de l'opposition sont dispersés impunément pas des voyous (à la solde de qui ?) ; Seule la presse d'opposition est souvent censuré...Quid des autres ?

Le bilan officiel de la malheureuse  crise post-électorale ivoirienne fait état de 3000 morts. D'après  La commission nationale d'enquête, instituée par le Président Alassane Ouattara en personne le 20 juillet 2011 et dont le rapport final lui a été remis le 08 Aout 2012, toutes les parties ont commis des exactions graves, partant des pillages aux meurtres en passant par des  viols. D'où vient -il donc que près de 5 mois après la remise de ce rapport, la justice ivoirienne ne ce soit pas encore penchée sur un seul cas des partisans du Président Ouattara  épinglés dans ledit rapport?

Du 27 au 29 mars 2011 des tueries massives ont lieu à Duékoué à L'ouest de la côte -d'ivoire les organisations internationales comptes plusieurs centaines de morts qu'elles imputent unanimement pour la plus part aux FRCI aux dozos et autres supplétifs (forces Pro-Ouattara de l'époque). Ni une enquête profonde encore moins un procès n'ont à ce jour sanctionné ces douloureux évènements.

Des rapports de L'ONU et de plusieurs organisations internationales des Droits de l'Homme se suivent et se ressemblent. Ils dénoncent tous des violations massives des Droits de l'homme : Arrestations et détentions arbitraires, tortures, séquestrations, expropriations illégales, viols, meurtres...tout y passe. Des accusations suffisamment graves tout de même, mais pour lesquelles le gouvernement ne semble pas pressé d'ouvrir des enquêtes.

Sur le plan international, les choses ne semblent pas plus calmes pour les Pro-Gbagbo. Outre l'ancien sécurocrate Moise Lida Kouassi extradé du Togo en juin 2012, la justice ivoirienne semble avoir jeté son dévolu sur Justin Koné Katinan ancien porte parole de Laurent Gbagbo réfugié politique au Ghana depuis la chute de ce dernier. Des méthodes et des démarches qui interrogent plusieurs observateurs sur les intentions réelles du président de la république.

La politique Intérieure

En décembre 2011, le pays organise une élection législative. Alors que beaucoup d'observateurs voyaient en cette échéance une occasion pour le pays de commencer sa mue, les négociations avec l'opposition n'aboutissent pas le pouvoir trouvant les réclamations de l'opposition hors du contexte et démesurées. Résultat : l'assemblée nationale est monocolore et totalement acquise à la coalition au pouvoir. Les gouvernements qui s'en suivent respectent la même logique : monocolores. Pourtant à côté du FPI certes principal parti d'opposition, plusieurs autres formations tout autant Pro-Gbagbo se veulent moins « difficiles » et prêtes à travailler avec le gouvernement du président Ouattara pour une décrispation. Leurs appels restent apparemment inaudibles à ce jour.

Alors qu'une bonne frange d'ivoiriens attendait qu'après son passage à la primature, Guillaume Soro se fasse plus discret du fait de son implication dans les évènements qui ont secoué le pays, il est parachuté au perchoir de l'assemblée nationale devenant la deuxième personnalité du pays. Sera-t-il un jour jugé ?

Outre Guillaume Soro, plusieurs Comzones nommément cités comme auteurs ou co-auteurs des exactions en côte d'ivoire ont connu des promotions extraordinaires dans les dernières réorganisations de l'armée  notamment le commandant Fofié Kouakou de Korogho encore sous le coup des sanctions Onusiennes. Fait plus interpellant encore lors des dernières nominations dans la préfectorale, l'ont a vu la promotion de 3 anciens militaires souvent cités dans des dossiers de crimes au rang de préfets de régions.

La CDVR

La Commission Dialogue Vérité Réconciliation crée par décret présidentiel a pour but de servir de cadre  d'échange aux ivoiriens pour se confesser, se repentir, et se pardonner. Elle doit servir de pivot au programme de réconciliation nationale cher au président de la république et à toute la côte d'ivoire. Seulement, de plus en plus d'observateurs se posent des questions sur son efficacité. Déjà son président Charles Konan Banny, un cadre Proche de Ouattara, qui bien que de bonne foi ne fait pas l'unanimité dans les deux camps. Homme Politique acteur de la crise, il a été premier ministre de Gbagbo dans un gouvernement d'union nationale et a été limogé 2007 après l'accord de Ouagadougou.

La CDVR malgré les bonnes intentions ne semble être actuellement qu'une coquille vide. Très peu d'actions à son actif, très peu écoutée, et apparemment plus un instrument de propagande qu'un levier de la réconciliation. L'on se demande pourquoi le président l'a crée si s'étaient pour en user si peu ?

L'Ouest

Cette partie de la Côte-D'ivoire traditionnellement Pro-Gbagbo est celle qui aura payé le plus fort prix de la crise qui a secoué le pays. Elle a cristallisé les divisions entre communautés. La haine y a fait son lit. Une partie des populations de cette région a été forcé de quitter leurs plantations et propriétés avec l'arrivée des forces pro-Ouattara, Pour se retrouver dans des camps  de refugiés. Des plantations qui sont restées en proie aux pillages et à une expropriation organisée, conduite par des filières  attribuant les forêts aux travailleurs venus d'ailleurs par milliers. Que fait le gouvernement pour arrêter ce drame ? À qui profite le crime ?

Le président Alassane Ouattara s'est toujours défendu de faire appliquer une justice des vainqueurs dans son pays. Il dit être en construction d'un état de droit, et travaille avec acharnement à repositionner son pays tant sur le plan économique que diplomatique sur la scène internationale. Mais que vaudront tous ces efforts si ce beau et grand pays reste miné par les démons de la haine, et de la rancœur, à cause de l'impunité ? La côte d'ivoire restera un volcan en activité, une bombe en attente d'une étincelle pour exploser. Tous les ivoiriens ont le devoir historique de s'impliquer à la noble tache de la réconciliation, et le ton devrait être donné par le président de la république.

Par : Augustin Armel MINKA

 

 




11/12/2012
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