Comment les fonctionnaires arrachent les terrains de l’Etat

 

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Les frais d’indemnisation des espaces à libérer pour la réalisation de projets d’infrastructures importants décuplent l’imagination cupide de certains hauts fonctionnaires.

 

Les mécanismes de détournement des biens publics ou d’accaparement des terres de l’Etat ont pris les formes les plus variées. Chaque jour plus inspirés que la veille, les serviteurs de l’Etat qui profitent de leurs positions ou fonctions débordent d’imagination. Tous les moyens sont bons pour s’enrichir. L’expropriation pour cause d’utilité publique avec l’incorporation subséquente des terres libérées au domaine privé de l’Etat se passent ainsi rarement suivant les règles prescrites. Véritable cas d’école, un lot de 23 hectares sur un domaine déclaré d’utilité publique pour abriter le nouveau centre administratif de la capitale, non loin de la présidence de la République à Yaoundé fait des gorges chaudes.

 

Les familles concernées qui estiment que l’acte officiel de déclaration d’utilité publique est devenu caduc n’ont pas déguerpi. Et redoutent à présent des manoeuvres ayant pour finalité la « revente partage » de ces terrains entre pontes du régime. Une autorité administrative haut placée dans la capitale et un officier supérieur de l’armée marine sont ainsi soupçonnés d’avoir acquis, au bénéfice de ces manoeuvres décriées par les riverains, des superficies de terrain importantes sur site.

 

Liste des personnes à indemniser

Dans certains cas, l’accaparement des terrains par tous les moyens ne vise aucunement un objectif de mise en oeuvre de la parcelle. Ce qui peut paraître paradoxale. En fait, ce qui est convoité c’est tout bonnement les frais d’indemnisation des espaces à libérer pour la réalisation de projets d’infrastructures importants financés à coût de milliards FCfa. Illustration récente à Lobo dans le département de la Lékié, non loin de la capitale. Ici, la pomme de discorde c’est le décret N°2015/1318/PM du 15 juin 2015, portant indemnisation des personnes victimes de destruction de biens dans le cadre du projet de construction de l’autoroute Yaoundé-Douala, entre Pk 10 et Pk 20 dans l’arrondissement de Lobo, département de la Lékié, région du Centre. Le texte du Pm ne recense que 372 personnes à indemniser à hauteur de 300 millions FCfa environ, en décalage total de plus de 800 sinistrés recensés pour des dommages évalués à plus de 1,3 milliard Fcfa par une commission constituée de fonctionnaires, d’autorités politiques et administratives locales, qui avait procédé au recensement des personnes à indemniser ainsi que de leurs biens.

 

Chose curieuse, des ayants-droit, que personne ne connait dans la localité, se retrouvent dans les listes. Un élu s’en offusquera, « ce décret ne reflète en rien le procès verbal que j’ai signé. Je vais remettre aux gens que le chef de l’Etat a envoyé ici, la liste des personnes à indemniser, tel que nous les avons recensées sur le terrain ainsi que les montants à percevoir par chacun.» Qui sont les ayant-droits que personne ne reconnaît dans la localité ? Qui les a frauduleusement incrustés dans les listes des personnes à indemniser ? Mystère.  

 

 

Indemnisations indues

Les indemnisations pour expropriations dans le cadre de la construction du port en eau profonde de Kribi avaient dû être brutalement interrompues. A cause de plusieurs irrégularités relevées. Notamment, des contestations enragées de la liste des personnes à indemniser. Des populations locales se sont ainsi étonnées des grosses sommes allouées à certains « voisins » dont ils n’avaient jamais entendu parler. Les éclats de voix, suivis de vives protestations parties des villages, sont parvenues à la présidence de la République, remettant en cause la liste des personnes à indemniser et surtout, le flou dans le recensement des bénéficiaires.

 

Au titre des sommes d’argent que la Commission nationale anti corruption (Conac) fait rentrer dans les caisses du trésor public, Garga Haman Adji, membre de ladite commission révèlera, dans une interview exclusive au Jour, que 14 milliards FCfa ont ainsi été retournés dans les caisses publiques suite « au contrôle des indemnisations indues de certaines « expropriations » pour cause d’utilité publique dans le cadre de la construction du port en eau profonde de Kribi. » Occasion pour ce leader de l’opposition de fustiger des parasites revêtus du manteau de serviteur de l’Etat : « l’Etat ne travaillera que pour enrichir quelques malpropres, ces hommes de peu de vertu qui n’ont ni le sens de l’Etat, ni celui de l’amélioration du niveau de vie de tous et de chacun. »

 

© Le Jour : Claude Tadjon


01/09/2015
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