Commémoration : La mémoire d'Ernest Ouandie divise les «Upc»


Cameroun - Commémoration : La mémoire d'Ernest Ouandie divise les «Upc»L’Upc dite ‘des fidèles’ et le Manidem y mettent un point d’honneur. Les autres factions penchent sur la célébration d’une semaine des martyrs de l’Upc. Dans les faits, de nombreuses semaines consacrées aux martyrs du parti historique sont célébrées chaque année au Cameroun.

La reconnaissance de son engagement et de son action au sein de l’union des populations du Cameroun (Upc) indépendantiste fait l’unanimité chez les militants du parti révolutionnaire. La date de commémoration de sa mort, elle, prête à polémique. Pourtant, ce 15 janvier 2013, les Camerounais se souvenaient «d’Emile» (nom de code) de l’Upéciste Ernest Ouandie, fusillé sur la place publique dans la ville de Bafoussam. C’était le 15 janvier 1971. A cette occasion, certaines factions de l’Upc saluent l’œuvre de l’ancien vice-président de l’Union des populations du Cameroun et président du comité révolutionnaire.

Au sein de l’Upc dites ‘des fidèles’, l’on annonce une «réunion publique» dans la ville de Douala et des activités organisées dans les différentes régions du pays. Secrétaire national à la presse et à la communication de cette tendance qui se réclame de la posture originelle des pères fondateurs, Hilaire Ham Ekoue explique que la commémoration «particulière» de ce héros de l’indépendance n’occulte pas la semaine des martyrs organisée par la même tendance au mois de mai de chaque année. «En souvenir des évènements de mai 1955». Un hommage aux nombreux morts enregistrés lors  des émeutes de Douala sous la conduite de l’Upc alors dirigée par Um Nyobè.

Commémoration tenue dans les rangs du Mouvement africain pour la nouvelle indépendance et la démocratie (Manidem). Le parti dirigé par Abanda Kpama salue la mémoire du chantre de la libre citoyenneté et combattant acharné de l’esclavagisme. En se saisissant de cette posture tenue par Ernest Ouandie en 1962, dans le maquis, le Manidem entend faire le parallèle avec les dénonciations faites à l’encontre du «gouvernement criminel» d’Ahmadou Ahidjo. «Hier comme aujourd’hui, le sang des Kamerunais coule en raison de la mauvaise politique du gouvernement. La guerre de la France et de ses complices anti-indépendantistes a cédé la place à l’insécurité, qui a causé la mort d’une dizaine de jeunes filles en deux mois dans la seule ville de Yaoundé», dénonce Abanda Kpama qui fait allusion aux tensions sociopolitiques qui font l’actualité depuis quelques temps au Cameroun.

Dans la faction dirigée par Adolphe Papy Doumbè, l’on relativise quelque peu la commémoration de la mort d’Ernest Ouandie à la date du 15 janvier. Si l’on reconnaît à ce militant et cadre de la première heure une étoffe de héros national, Adolphe Papy Doumbè pense que «sa mémoire, comme celle de tous les autres héros est célébrée lors de la semaine des martyrs que nous organisons  chaque année.» Une commémoration qui, contrairement  au chronogramme admis par l’Upc dite ‘des fidèles’, est arrêtée au mois de septembre. A cet effet, Adolphe Papy Doumbè insiste sur le fait que «nous ne pouvons pas faire une commémoration spéciale pour chacun des martyrs. Ça fait désordre.»

L’Homme. Qui est Ernest Ouandie ?

Son nom tient une place de choix dans l’évocation des figures emblématiques de la lutte pour l’indépendance du Cameroun. L’histoire retient qu’Ernest Ouandie est mort le 15 janvier 1971. Dans l’imagerie populaire, la thèse de la reddition de ce combattant de la première heure a fait flores. En fait, la mort de ce militant engagé de l’Union des populations du Cameroun (Upc) intervient à la suite d’un deal négocié entre l’évêque de Nkongsamba, monseigneur Dongmo et le président de la République de l’époque, Ahmadou Ahidjo.

Ernest OundiéDes sources concordantes expliquent qu’il s’agissait pour le prélat, avec qui Ernest Ouandie était en contact, de l’aider à s’exiler hors du Cameroun. Or, se croyant momentanément en sécurité, Ernest Ouandie quitte sa cachette afin de rejoindre son contact (Monseigneur Dongmo). Une erreur qu’il paie cher. En fait, au moment, où le « combattant » engage son aventure, il ignore que son contact est hors du Cameroun « en déplacement à Rome ». En lieu et place de la finalisation du deal qui devait se dérouler en présence du président Ahidjo, Ernest Ouandie est interpellé dans la ville de Mbanga par les éléments de la sûreté nationale. « Une fois entre leurs mains, ils en profiteront pour lui régler son compte. » Pourquoi est-il sorti sans le signal convenu avec sa source ? Des sources historiques indiquent que Ernest Ouandie souffrait d’une blessure à la jambe qui nécessitait des soins urgents. Pour sûr, Ernest Ouandie est jugé à Yaoundé puis fusillé le 15 janvier 1971 à Bafoussam.

Des sources historiques précisent que la condamnation de « l’arrogant » Ernest Ouandie a été scellée par Ahmadou Ahidjo en personne, dès l’annonce de son arrestation. Dès raisons de présenter l’Upciste, à l’époque des faits, comme l’auteur d’une tentative de coup d’Etat ? Dongmo ironisera en disant qu’il s’agissait probablement « d’un coup d’Etat qui devait être mené par des anges ».  Du reste, Ernest Ouandie est né dans l’arrondissement de Bana, dans la région de l’Ouest en 1914. Il succède à Félix Roland Moumié au poste de président de l’Upc. Lui-même mort empoissonné en Suisse par un agent des services spéciaux français. Devenu héros national à la faveur de la loi du 16 janvier 1991, voté par l’Assemblée nationale, Ernest Ouandie appartient à la classe des héros nationaux camerounais.

L’engagement politique du jeune Ouandie puise souvent ses origines dans la déportation de son père aux travaux forcés à Djimbong, dans le département du Haut-Nkam. Conduit dans les plantations coloniales de café, le géniteur du futur héros verra son calvaire s’achever deux ans plus tard (1927-1929). Une exclusion due au fait de son état de santé déclinant. Enseignant de profession, Ernest Ouandie qui commence sa carrière dans la ville d’Edéa connaîtra de nombreuses affectations disciplinaires. Militant de l’Union des syndicats confédérés du Cameroun (Uscc) puis de l’Union des populations du Cameroun, Ernest Ouandie en devient dirigeant de base jusqu'à son élection au poste de vice-président de cette formation politique, chargé de l’organisation en 1952. Un poste qu’il cumule avec celui de directeur de « La voix du Cameroun », le journal de l’Upc. Nul ne sait si ses voyages en Chine et en Urss sont à l’origine de son retour à Douala. A l’instigation du Haut commissaire Roland Pré, nombre de dirigeants et militants de l’Upc seront affectés à des postes dans la région du Littoral et la ville de Douala en particulier.

© Le Messager : Joseph OLINGA


16/01/2013
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