Climat des affaires: les multinationales quittent de plus en plus le Cameroun

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Climat des affaires: les multinationales quittent de plus en plus le Cameroun
(journal du cameroun 19/01/2011)


En l’espace de 5 ans seulement, près de dix entreprises appartenant à de grands groupes internationaux ont plié bagage

Rumeur sur le départ de Pecten

Depuis quelques mois, une rumeur incessante annonce le départ imminent de Pecten du Cameroun. La rumeur qui gagne le terrain fait état de ce que l’entreprise américaine spécialisée dans l’exploration et la production pétrolière serait en train de chercher un preneur, afin de vendre ses actions et partir ainsi du Cameroun. Au siège de l’entreprise, à l’immeuble Commercial Bank-Cameroun (CBC), aucun responsable n’en fait cas cependant. Tout semble normal. En tout cas, si cette information arrivait à se confirmer, on sera à la 10e multinationale à quitter ainsi le pays de Paul Biya, et le 2e grand départ dans le secteur de l’exploration, après le départ de Total E&P.

La multinationale française ayant pignon sur rue en Afrique est la dernière en date à quitter le Cameroun, dans des conditions assez abracadabrantes. Cette entreprise française solidement implantée au Cameroun, et dans un segment aussi prisé, l’exploitation du pétrole, a annoncé en début du mois de décembre 2010 qu’elle se retirait de ce segment, en cédant ses parts à Perenco qui est pratiquement le benjamin dans ce secteur. Le géant pétrolier français détenait une participation de 75,8% dans la société camerounaise, aux cotés de la Société nationale des hydrocarbures (SNH) 20% et de la société Paris Orléans, appartenant au groupe Rothshild (4,2%). Ce départ ne cesse d’étonner plus d’un. Car, les uns et autres ne comprennent toujours pas pourquoi les entreprises d’un secteur aussi prisé et même élitiste peuvent quitter le pays. En tout cas, entre 2005 et 2010, près de dix multinationales ont quitté le Cameroun.

Shell la première multinationale à quitter le Cameroun

C’est Shell qui donne le ton, en fin novembre 200. La multinationale anglo-néerlandaise qui avait son siège sociale à l’immeuble siège des Brasseries du Cameroun, à Bali, annonce brutalement son départ du Cameroun. C’est consternation totale. Les raisons de ce départ ne sont pas divulguées. La maison mère dépêche au Cameroun Georges Brunton, le président du groupe dans les 14 pays d’Afrique centrale et ceux de l’Afrique de l’Ouest, pour conclure les accords avec le repreneur de ses investissements humains et matériels identifié quelques semaines plutôt. Il s’agit de Texaco Cameroun, un autre gros poids lourd dans le marché du pétrole.

Cette dernière hérite donc de tout le patrimoine de Shell au Cameroun. La page de Shell est ainsi tournée au Cameroun. Après Shell, un autre poids lourd, Mobil Cameroun, en l’occurrence annonce aussi son départ en octobre 2007t. La filiale du groupe américain Exxon Mobil est rachetée par Tamoil Africa holdings limited, un groupe libyen ayant pignon sur rue en Afrique. Pour des raisons stratégiques, le groupe libyen Tamoil Africa holdings limited, refuse d’exploiter son nouveau filon sous son ancien nom.

Tamoil Africa décide ainsi du changement de sa dénomination en celle de « Libya Oil ». Libya Oil Cameroon est adoptée comme dénomination sociale de la filiale camerounaise. Les départs s’enchainent par la suite. Texaco Cameroun qui, en 2005 a avalé Shell vend ses actions à un groupe nigérian appelé Corlay SA, qui utilise MRS comme nom commercial. La British american tobacco (BAT) ferme sa seule usine du pays, à Yaoundé. Dans le secteur de l’agro-industrie Barry Callebaut cède ses parts au groupe sud-africain Tiger Brand, spécialisé dans les produits de marque et la santé. PZ, un groupe anglo-grec connu au Cameroun à travers la marque SIPCA se retire au marché camerounais, après avoir cédé ses actions à un Camerounais, un certain Kandem.

Dans ce secteur, le dernier groupe à filer du Cameroun est le grand groupe anglo-hollandais Unilever qui est plus connu au Cameroun à travers les marques Calvé pour la mayonnaise, Signal pour les pates dentifrices, etc. Comme pour PZ, les parts dette grande multinationale sont achetées par un groupe d’employés locaux qui ont vite fait de changer de dénomination. Ainsi, Unilever est devenu Tropik Industrie. Dans le domaine bancaire, le célèbre groupe bancaire français, le Crédit agricole, repreneur du Crédit lyonnais a été racheté par le groupe marocain Attijariwafa Bank.

Dans le marché du tissu, un autre groupe important s’est implanté au Cameroun, avant de quitter quelques mois seulement après. Il s’agit de Vlisco qui est allé s’installer dans un autre pays africain. Ces départs ne sont pas le fait du hasard d’après nombre d’observateurs qui pensent que ces multinationales ne quittent par pour rien. Sans doute, elles voient des choses que nous ne voyons pas, réagit un dirigeant de banque. On dit qu’il y a beaucoup de pétrole à Bakassi, mais les grandes multinationales s’en vont pour laisser la place aux petits groupes dans la plupart régionaux ? Ce n’est pas suspect ça ?, argue-t-il. L’Afrique représente à peine 2% du commerce mondial. Le départ de ces groupes n’est pas un bon signe. Au niveau actuel de l’économie, on ne peut pas encore se passer de ces gens-là. On ne devrait pas se retrouver dans une situation de à la place de, mais en plus de, conclut le banquier.

Conséquences

C’est quasiment la même lecture que fait Robert Tangakou, spécialiste des questions bancaires et consultant international : Les multinationales sont des entreprises privées commerciales à but lucratif. Elles se déploient dans le monde en fonction de leurs intérêts notamment les perspectives de développement de leurs activités et rentabilité. Dès lors que ces perspectives ne semblent plus aussi favorables que leurs dirigeants le souhaitent, des stratégies sont mises en œuvre pour les transférer vers des pays plus à même de faire fructifier leurs capitaux, déroule l’expert.

D’après Tangakou, ces départs ont plusieurs conséquences néfastes. Ces départs constituent des fuites ou sorties de capitaux de nos pays avec pour corollaire les pertes d’activité, d’emplois, de revenus fiscaux, souligne-t-il, en relevant au passage quelques aspects positifs des départs. C’est le cas de la pression de la concurrence pratiquée par les entreprises locales notamment dans le domaine de la distribution des produits pétroliers avec des coûts de structure nettement plus bas.

Ce qui peut, d’après lui, constituer des opportunités pour les entrepreneurs nationaux qui ont des possibilités de création d’entreprises plus nombreuses. En tout cas, les différents observateurs interpellent les pouvoirs publics, afin qu’ils imaginent des incitations pouvant maintenir les investisseurs au pays.

Par Hervé Endong, camereco.com - 19/01/2011

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Source: Africatimes



20/01/2011
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