Célestin Djamen , Vice Président du CCD:" Les juges n'ont pas remis en cause le fond des accusations portées contre ces dictateurs”

Le moment est venu pour que Paul Biya rende gorge.Pour célestin Djamen, la plainte que le Ccd dépose ce jour a toute les chances de connaïtre une issue favorable, parce que ce son des Camerounais qui ont un intérêt et la qualité à agir, c’est-à-dire pour mener une action judiciaire plus heureuse "  Je ne porte pas plainte contre Paul Biya, c'est l'association Ccd (Conseil des Camerounais de la Diaspora) dont je ne suis que le vice- Président qui porte plainte. "

 

 

Germinal : Qu'est ce qui vous pousse à porter plainte contre M. Paul Biya, président de la République du Cameroun devant le procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Paris? Est-ce seulement une manière de faire parler de vous au moment où vous vous apprêtez à regagner le Cameroun?


Célestin Djamen : Je ne porte pas plainte contre Paul Biya, c'est l'association Ccd (Conseil des Camerounais de la Diaspora) dont je ne suis que le vice- Président qui porte plainte. Je crois que cette précision est utile, car c'est le fruit d'une réflexion commune de Camerounais de la Diaspora. Cette diaspora entend contribuer à son niveau, à la " débiyatisation " du Cameroun. Dire par exemple que le système en place depuis presque trente ans est destructeur pour notre économie, pour notre société et finalement pour nos vies est presque une évidence et donc rester spectateur ou se taire, quelque que fût sa zone de résidence d'ailleurs, face à cette dégradation, ressemblerait pour nous à une conspiration du silence à laquelle le Ccd n'entendait pas s'associer bien évidemment. Vous comprenez donc que cela ne peut être une manière pour faire parler de moi. Ma modeste personne importe vraiment très peu dans ce combat difficile mais honorable contre la dégradation des moeurs politiques et contre la corruption endémique dans notre pays.

 

N'est-ce point un coup d'épée dans l'eau si on tient compte du sort réservé à la Plainte qui avait été déposée contre Sassou, Bongo et Obiang Nguema, par Transparency International et les autres?


C'est vrai que les Ong Transparency International France et Sherpa ont été déboutées de leur plainte en Août dernier contre tous ces dictateurs que vous venez de citer mais, arrêtons-nous si vous le voulez bien un instant sur le motif de rejet. Que nous dit la Cour d'appel de Paris? En effet, elle motive sa décision sur le fait que ces associations n'avaient pas qualité ni intérêt pour agir. Dès lors nous pouvons en tirer deux enseignements majeurs: d'une part, que la Cour d'appel reproche à ces associations Françaises et de droit Français de s'occuper de ce qui ne les regarde pas et d'autre part, il ressort de ce jugement que les juges n'ont pas remis en cause le fond des accusations portées contre ces dictateurs, ce qui est tout de même très rassurant voire même par certains aspects, très encourageant! Cela signifie tout simplement que nous, Conseil des Camerounais de la Diaspora, association basée à Paris, certes, mais animée par les Camerounais pour la Camerounais conserve toutes ses chances, ayant intérêt et qualité à agir, pour mener une action judiciaire plus heureuse. C'aurait été un coup d'épée dans l'eau si la motivation de la Cour d'Appel de Paris avait porté par exemple sur l'incompétente ou déclarait que l'acte d'accusation était irrecevable, ce qui est loin d'être le cas comme vous pouvez le constater.

Que répondez-vous à ceux qui estiment que les faits sur lesquels vous fondez votre plainte datent de plusieurs années et que vous n'êtes pas allé au-delà des éléments contenus dans le Rapport du Ccfd, sur les Biens mal acquis?

Je réponds que seul le juge du droit est en mesure de dire ce qui est ou n'est pas prescrit. Par ailleurs, seules les investigations à venir permettront de déterminer s'il y a prescription. Dans tous les cas le recel de détournement d'argent public ne peut en droit évidemment être prescrit. Sur le fait de ne pas être allé au-delà des éléments contenu dans le rapport Ccfd, je crois que vous vous trompez car nous signalons précisément que le Ccd a mené sa propre enquête, je vous renvoie si vous le voulez bien au paragraphe 3 de l'exposé des faits. Il est vrai cependant que nous ne savons pas depuis combien d'années ces biens détournés ont été acquis tant l'imagination de nos chers dictateurs est prolifique dans ce type d'affaires. Mais encore une fois, c'est au juge de décider s'il y a prescription ou pas. Vous savez, dans cette affaire des Biens mal acquis et sans jeu de mots, c'est une affaire du Bien contre le Mal. Le Conseil des Camerounais de la Diaspora (Ccd) que j'ai présidé à une certaine époque et dont je suis au moment où je vous réponds encore le vice-président, a toujours milité pour l'instauration d'un véritable État de droit et pour la démocratie au Cameroun.

 

Propos recueillis par

JEAN-BOSCO TALLA

 

Paul Biya sur les traces des Sassou, Obiang Nguema et feu Omar Bongo


S'appuyant sur le rapport des Biens mal acquis publié en juin 2009 par le Ccfd- Terre solidaire, des camerounais de la diaspora ont décidé de traduire Paul Biya devant la justice française. Si au début de l'année dernière Paul Biya avait échappé à un procès, comme ce ne fut pas les cas des présidents Omar Bongo du Gabon, aujourd'hui décédé, Denis Sassou Nguesso du Congo, Théodoro Obiang Nguema de la Guinée équatoriale, il n'est pas sûr que cette fois, il pourrait se soustraire à la justice.

 

Eu égard à la détermination du collectif qui a décidé de se plaindre. Bien plus, les plaignants affirment avoir tiré les leçons de l'échec du procès des pairs de Paul Biya. Faut-il le rappeler, la plainte contre ces trois chefs d'État, accusés de " recel de détournement des fonds publics, blanchiment, abus de biens sociaux, abus de confiance et complicité " n'a pas connu de suite judiciaire pour la simple raison que le tribunal avait estimé que Transparency International et Sherpa n'avaient subi aucun dommage suite à ces détournements fonds.

 

Ces Ong ont interjetté appels de la décision du tribunal. Pour l'avocat de Transparency International, Me William Bourdon, cette décision "a un sérieux parfum de pirouette". "Aujourd'hui c'est champagne pour l'association de malfaiteurs francoafricaine qui organise et tire profit du pillage des deniers publics africains".
Le même sort serait-il réservé à la plainte déposée contre le président camerounais ? L'avenir nous le dira. Ce qui est sûr, c'est que le monde a changé. Aucun citoyen, fut-il chef d'État en fonction ou non, n'est plus à l'abri des poursuites judiciaires.Avis donc à ces chefs d'État qui manipulent les constitutions pour s'accrocher au pouvoir dans l'espoir d'échapper à la justice des hommes et arguant de l'immunité présidentielle.

Jean Paul Sipadjo

Copyright © 2010 Germinal n°049, 02 février 2010



06/02/2010
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