Candidatures : Pourquoi les ministres redoutent le suffrage universel


Cameroun - Candidatures : Pourquoi les ministres redoutent le suffrage universelSous le Renouveau, peu de membres du gouvernement vont aux élections.

Issa Tchiroma Bakary joue gros le 30 septembre prochain ! Le ministre de la Communication (mincom) conduit les listes du Front pour le salut national du Cameroun (Fsnc), aux municipales dans la commune de garoua 1er et aux législatives dans la Bénoué-Ouest. en face, il y aura deux principaux adversaires. Pour ce qui est des législatives, Oumoul Koultchoumi épouse ahidjo mohamadou Badjika, qui est à la tête de la liste de l’Undp, où l’on retrouve saïdou maidadi, et ali mamouda (député sortant) du Rdpc. «Le ministre Tchiroma compte sur la décote du Rdpc dans la Bénoué après l’embastillement de Iya Mohammed, Marafa Hamidou Yaya et Haman Adama. Ces derniers constituaient les grands financiers locaux de la campagne du Rdpc.

Occupant une position de rente au sein du gouvernement, le ministre dispose des ressources pour aller au combat. Quant à l’Undp, il compte à nouveau capitaliser sur le sentimentalisme ethno-religieux ambiant», indique un connaisseur des rapports de force politiques dans la Bénoué. «Issa Tchiroma est tête de listes aux municipales et législatives pour se donner une bonne marge de victoire. Il n’est pas exclu qu’une fois élu, il cède la place à son suppléant ou son adjoint, pour garder sa place au sein du gouvernement», explique, pour sa part, un proche du mincom.

Dans un gouvernement d’une soixantaine de membres, le mincom passe, de par sa double candidature, pour un héros. en effet, aucun autre ministre en fonction ne sollicitera les suffrages des électeurs le 30 septembre. Le risque semble évident pour Issa Tchiroma. Ce «politicien de métier» a certes été député de la nation de 1992 à 1997, mais on ne saurait perdre de vue que des leaders des partis de la majorité présidentielle ont connu des fortunes diverses après avoir postulé un mandat électif.

Candidat aux législatives de 2007 dans le mayo-Kani sud, la liste de Dakolé DaIssala (président du mouvement démocratique pour la défense de la République) perd d’un souffle devant celle du candidat du Rdpc, 46,67% contre 51,33%. avant cet échec, le président national du mdr s’était payé une boutade : «Chaque ministre doit aller aux élections. D’ailleurs, si le Mdr obtient la majorité à l’Assemblée nationale, il fera voter une loi dans ce sens». Une ambition qui ne sera pas assouvie. en dépit du souhait qu’il émet en public, de rester au gouvernement, celui qui est alors ministre des Transports est limogé le 7 septembre 2007.

D’aucuns lient ce limogeage à sa contreperformance électorale. D’autres, plus nombreux, y voient plutôt une sanction en rapport avec la gestion du crash de Kenya airways à mbanga Pongo.

Njankouo Lamère

Le président de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (Undp), maigari Bello Bouba, est également déjà allé aux élections, notamment aux législatives de 2002. après avoir arboré l’écharpe de député une mandature plus tôt, celui  qui est alors ministre d’etat en charge du Développement industriel et commercial mord la poussière face au Rdpc. il aura beau crier à la «farce électorale», mais des observateurs verront derrière ce revers une conséquence de la plate-forme signée avec le parti au pouvoir en 1997.

Contrairement à Dakolé Daïssala, Bello Bouba ne perdra pas son strapontin au sein du gouvernement. mais le natif de Bashéo a tiré les leçons de cette expérience. Depuis lors, il n’a plus été candidat à une élection locale ou nationale. Dans les rangs du Rdpc, rares sont les ministres en  fonction qui empruntent le chemin du suffrage universel. Le cas de Daniel njankouo Lamère est ainsi singulier. Le 22 juillet 2007, l’alors ministre  délégué auprès du ministre de l'economie et des Finances chargé de la relance économique conduit une liste aux municipales à Foumban face à celle du  président de l’Union démocratique du Cameroun (Udc), adamou ndam njoya.

mal lui en prend. Comme le sultan des Bamoun, ibrahim mbombo njoya, en 1996, le ministre est vaincu par le champion de l’Udc.  analysant la crainte des ministres, militants du parti au pouvoir, à postuler aux élections, le politologue mathias eric Owona nguini déclare : «la règle dans le système gouvernant, c’est que seul le président de la République doit bénéficier de la légitimité populaire. Ses lieutenants, notamment les ministres, se posent en délégués du président.

Ce sont des serviteurs patrimoniaux. Les ministres qui vont aux élections sans l’autorisation du président national risque un désaveu, une mise à l’écart. Ce n’est nécessairement pas la même chose pour les ministres issus des partis alliés au Rdpc. Ils bénéficient d’une certaine tolérance. En effet, pour se donner un affichage de coalition pluraliste, le régime peut continuer à les mobiliser, indépendamment de leurs résultats électoraux».

© Mutations : Georges Alain Boyomo


29/07/2013
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