Cameroun:Me Simon Pierre Eteme Eteme "La garnison militaire n’est pas une prison"

Cameroun:Me Simon Pierre Eteme Eteme "La garnison militaire n’est pas une prison"

Maitre Eteme:Camer.beL’avocat au barreau du Cameroun et expert des droits de l’Homme rappelle la législation réglementant les prisons et les droits des prisonniers.(...)Comme l’a dit Valéry Giscard d'Estaing, "la prison c'est la privation de la liberté d'aller et de venir et rien d'autre», ce qui veut dire qu’a minima, le détenu conserve des droits intangibles, à l’instar du droit à la vie, du droit à l’intégrité physique et morale. Ces droits que je qualifie d’essentiels en induisent d’autres tels que l’interdiction de la torture, le droit à la santé.

Comment peut-on qualifier la prison dans un camp de gendarmerie qui est avant tout une garnison militaire?

De façon générale, le régime de l’incarcération est régi au plan juridique par deux principaux instruments, à savoir, le Code de procédure pénale en ses dispositions pertinentes des articles 551 et suivant et un décret du 27 mars 1992 portant régime pénitentiaire au Cameroun. Bien sûr, à ces textes de droit interne, il faut ajouter les engagements internationaux ratifiés par le Cameroun.

Aucun de ces instruments ne prévoit expressément la détention dans une garnison militaire qui n’est pas conçue pour accueillir le détenu dans le strict respect de ses droits fondamentaux. D’ailleurs, l’article 551 du Code de procédure pénale se veut plus que péremptoire et stipule que : "Toute personne détenue en vertu d’un mandat de justice est incarcérée dans une prison", la prison ayant par ailleurs en droit une connotation bien précise qu’on ne peut pas confondre avec une garnison militaire.

Que vous inspire le temps d'isolement qui est passé de 23 heures au début de la détention des prisonniers Michel Thierry Atangana et Titus Edzoa, à 13 heures, aujourd'hui?

L’isolement est la réponse pénitentiaire du régisseur de prison ou des autorités judiciaires, notamment le procureur de la République aux divers cas où la communication du détenu avec d’autres personnes crée des soucis de sécurité ou de discipline. L’intéressé est alors isolé pour une période ne pouvant excéder 10 jours renouvelable une fois lorsque la mesure émane du régisseur, étant observé que le procureur de la République a la latitude de prescrire une telle mesure à sa guise, à la seule condition d’en préciser la durée.

S’agissant de ces deux prisonniers, il faudrait d’une part vérifier si le principe de l’isolement est justifié par les motifs de sécurité et de discipline et, d’autre part, en le supposant justifié, s’assurer de ce que sa mise en œuvre reste bien conforme au cadre juridique que je viens de rappeler sommairement. Tout écart procéderait simplement de l’illégalité et donc de l’abus L’isolement abusif devient une forme de détention au secret que le Comité des droits de l’homme de l’Onu sanctionne, car contraire à l’article 9 du Pacte sur les droits civils et politiques au titre des droits des personnes détenues.

Les détenus ont-ils des droits ?

Comme l’a dit Valéry Giscard d'Estaing, "la prison c'est la privation de la liberté d'aller et de venir et rien d'autre», ce qui veut dire qu’a minima, le détenu conserve des droits intangibles, à l’instar du droit à la vie, du droit à l’intégrité physique et morale. Ces droits que je qualifie d’essentiels en induisent d’autres tels que l’interdiction de la torture, le droit à la santé. Même privée de sa liberté, la personne humaine conserve sa dignité d’homme et devrait d’ailleurs, ainsi que le martèle notre Constitution, "être traitée en toute circonstance avec humanité".

Cette exigence de traitement humain impose que le lieu de sa détention obéisse aux conditions du droit à un environnement sain; qu’il soit nourri car il a droit à l’alimentation; qu’il soit soigné en cas de maladie. A ces droits vitaux, on peut ajouter, outre le droit au réconfort de sa famille et, éventuellement celui de son avocat, des droits socioculturels tel le droit au culte et aux activités sportives et culturelles. Sauf confiscation judiciaire, il continue d’avoir droit aux biens et à la protection de ceux-ci.

© Source : Propos recueillis par Léger Ntiga (JADE)


23/08/2011
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