Cameroun, Livre: Enoh Meyomesse, 1960, faits marquants

Cameroun, Livre: Enoh Meyomesse, 1960, faits marquants

 

Livre 1960 Enoh:Camer.beAvant propos. Quels ont été les premiers pas du Cameroun indépendant ? Telle est la matière de cet ouvrage que nous avons voulu quelque peu didactique. En effet, à l’observation, la majorité des Camerounais n’a pratiquement pas d’idées sur cette période,ne sait nullement comment les événements se sont déroulés. Il est ainsi assez frappant de constater que pour nombre de personnes interrogées, Ahmadou Ahidjo était devenu président de la République aussitôt l’indépendance proclamée, autrement dit, de manière quasi-automatique. Peu de gens savent qu’il ne l’était devenu que cinq mois plus tard, à savoir le 5 mai 1960, et que, entre temps, il était toujours demeuré Premier ministre du Cameroun, mais sans président de la République, bien mieux, il s’était attribué la fonction de Ministre des Affaires Etrangères, cumulativement avec celles qu’il exerçait déjà.

Si les gens ne savent guère grand chose des premiers pas du Cameroun indépendant, la raison en est très simple : il n’existe pratiquement pas de document, sous forme de livre, qui décrive cette période.
    
1960 : faits marquants au Cameroun désire, par conséquent, combler ce vide.

Nous nous sommes contenté de sélectionner des événements qui nous ont semblé importants à connaître, en nous efforçant de ne pas y ajouter de longs commentaires. Notre but aura été de restituer l’histoire dans son authenticité

1 Vendredi 1er janvier 1960: Proclamation de l’indépendance.

Conformément, 1/- à la résolution des Nations Unies du mois de mars 1959, 2/- à la résolution de l’Assemblée Législative du Cameroun, ALCAM, du 24 octobre 1958 préconisant la levée de la tutelle des Nations Unies le 1er janvier 1960, 3/- au rapport de la 4ème et dernière Mission de visite des Nations Unies de décembre 1958, le vendredi 31 décembre 1959 à 0 heures, le Cameroun est devenu indépendant.

Pendant toute la journée, les populations s’étaient préparées à l’événement. Des retraites au flambeau avaient été organisées un peu partout à travers le pays. Des bals avaient été prévus. Mais en même temps, les grandes villes sont ceinturées par des cordons de police, l’Upc ayant prévu un massacre sans précédant de Blancs si, le lendemain, le Cameroun n’est pas indépendant. La tension était ainsi très vive dans le pays. Mais, par bonheur, la nuit s’était bien passée, et le lendemain matin, tout le monde s’était déporté sur la place de l’hippodrome baptisée, du coup, « Place de l’indépendance ».

A 7 h 40, déjà, ce vendredi 1er janvier, le premier ambassadeur de France au Cameroun, Jean Bénard, avait présenté ses lettres de créances à Ahmadou Ahidjo. Après quoi, le Premier ministre camerounais (Ahmadou Ahidjo ne deviendra président de la République que le 5 mai 1960) s’était rendu au lieu des cérémonies qui devaient commencer à 9 h 30. A l’heure dite, alors que tous les invités étaient déjà présents, une chorale constituée de jeunes enfants, avait chanté l’hymne national. Tout le monde avait chaleureusement applaudi. 101 coups de canons avaient été tirés. Tout le monde avait de nouveau applaudi. Le secrétaire général des Nations Unies, Dag Hammarskjöld, avait pris la parole. Il avait levé officiellement la tutelle des Nations Unies sur le Cameroun.

«C’est un vrai privilège pour moi, comme Secrétaire général des Nations Unies, d’être présent au moment où le premier territoire sous tutelle s’affranchit des statuts de tutelle et s’apprête à joindre la famille toujours grandissante des nations indépendantes.

C’est aussi un très grand plaisir personnel que d’assister à ces cérémonies d’indépendance, au seuil de l’année à venir qui sera d’une importance singulière dans l’évolution politique et économique de ce grand pays du continent africain.

Dans moins d’une heure, le rideau va tomber sur un chapitre dans l’histoire du Cameroun avec lequel les Nations Unies avaient une étroite association pendant les quatorze dernière années, et peut-être je puis en faire mention, avec lequel les Nations Unies avaient des relations suivies pendant plus d’un quart de siècle, son but accompli, la responsabilité des Nations Unies est arrivée à sa fin, et le Cameroun s’assurera sa place comme membre de la communauté internationale du 20ème siècle (…) MM. Le Président, M. le Haut-commissaire, M. le Premier ministre, au nom des Nations Unies, je salue le nouvel Etat indépendant du Cameroun.. »

Tout le monde avait applaudi en poussant des youyous de joie. Ensuite, le représentant du gouvernement français, Louis Jacquinot :

«La France apporte, ce matin, au nouvel Etat camerounais, son parrainage et ses vœux. Elle le fait en sa qualité de puissance tutrice, consciente d’avoir rempli la tâche que les suprêmes instances internationales lui avaient confiée. Elle le fait pour rester fidèle à un passé de quarante années au cours desquelles le Cameroun lui fut associé et pour répondre à l’amitié que les populations de ce pays n’ont jamais cessé de lui manifester.
Aux heures plus douloureuses de notre histoire, ce sont constituées, ici même, les premières phalanges d’hommes libres dressés dans un magnifique élan contre la barbarie et la servitude.
 
Voici d’autres heures solennelles, le Cameroun naît à l’indépendance. Ce fut d’abord le vœu du peuple camerounais exprimé par son Assemblée législative et par son gouvernement, l’acceptation immédiate de la République française, le vote, enfin, de l’Assemblée générale des Nations Unies, entraînant la cessation, le 1er janvier 1960, de la tutelle que nous exercions en vertu des accords approuvés le 13 décembre 1946 par cette même Assemblée.
(…) L’accession de l’Etat du Cameroun auprès des nations souveraines est un événement mondial. Et cet événement n’est dû, ni à la révolte, ni à la réaction passionnelle. Il est le fruit du travail, de la détermination, et de l’aboutissement d’une évolution raisonnée et patiemment poursuivie (…)
Vous avez votre indépendance. Elle s’accomplit dans l’amitié et dans la confiance mutuelle. Ensemble, nous pouvons nous en féliciter. Elle se fortifiera, parce qu’elle repose sur une base de complète égalité et de réciprocité. Nos conseils, notre aide, si vous croyez devoir nous les demandés, vous seront accordés sans aucune exclusive dans le respect entier de votre souveraineté (...)

Jamais un Camerounais ne sera un étranger en France, pas d’avantage, j’en suis certain, un Français ne sera, au Cameroun, un étranger. Puissent nos destins longtemps se rencontrer pour la prospérité et le bonheur de nos deux patries et pour le bien de l’humanité ». 

Puis le représentant des Etats Unis d’Amérique, Henry Cabot Lodge, représentant permanent aux Nations Unies :

«C’est avec une vive émotion que je prends contact avec le sol camerounais. Mes compagnons et moi-même avons l’honneur d’être les représentants du peuple des Etats Unis d’Amérique, le Président Eisenhower, aux cérémonies marquant l’indépendance du Cameroun. Nous souhaitons au gouvernement et au peuple camerounais bonheur et prospérité … »
    
Enfin, Ahmadou Ahidjo, le Premier ministre camerounais.

« Camerounaises, Camerounais, mes chers compatriotes, le Cameroun est libre et indépendant (l’explosion de joie est générale et sans précédant au sein de la population qui suit le déroulement des cérémonies à la radio). Ces mots font vibrer en chacun de nous, une émotion que nous ne dissimulons pas, tant elle est grande, tant elle est naturelle, tant elle touche aux aspirations de tout ce qui porte le nom d’homme. Camerounais des villes, des villages et des campagnes, ce jour tant attendu, nous allons le vivre avec émotion… etc .. »

A la fin du discours, un impressionnant défilé de jeunes et de militaires en tenue de l’armée camerounaise (pour la première fois), commandé par un jeune capitaine du nom de Pierre Semengue, s’était déroulé à la place de l’hippodrome, et non plus devant l’actuel magasin « Score » comme jusqu’alors. L’émotion est au paroxysme parmi les Camerounais. Parmi les hôtes de marque à cette cérémonie historique et inoubliable, on distinguait, Madame Golda Meir, le Premier ministre israélien, Modibo Keita, le Président du Conseil (Premier ministre) du Soudan Français (Mali), Moktar Ould Dada, Président du Conseil de la Mauritanie, etc.

Pendant toute la journée, la joie avait été indescriptible dans tous les foyers, à travers tout le territoire national. Deux jours plus tard, tous les invités du Cameroun s’étaient déportés à Doua-la, où les cérémonies de l’indépendance étaient prévues pour le dimanche 3 janvier au matin. Un impressionnant défilé s’était déroulé au Boulevard du 27 août 1940. Des militants de l’Union des Populations du Cameroun, Upc, avaient défilé, des portraits de Ruben Um Nyobè en main et bien en vue.

A la légation du Cameroun à Paris, rue de Courcelles, une grande réception avait été organisée pour la circonstance. De nombreux Français et Camerounais y avaient été conviés. Les Camerounais résidents dans des villes de province en France, avaient également organisé des cérémonies, et y avaient conviés leurs amis tant Français qu’Africains.

Lundi 4 janvier 1960, Kouoh Moukoury, était nommé 1er ambassadeur du Cameroun à Paris. Il venait d’être préfet du Nyong et Sanaga.

Mardi le 5 janvier 1960, Xavier Torre, le dernier Haut-commissaire de la France au Cameroun, avait quitté Yaoundé. Le Cameroun avait cessé d’être un territoire sous tutelle des Nations Unies à l’administration confiée à la France. Une nouvelle ère commençait pour lui…
 
7- Dimanche 10 janvier 1960 : Attaque de la chefferie Bazou.

«  Dans la nuit de dimanche à lundi, dans le pays bamiléké, après avoir coupé les routes autour de la chefferie, afin d’empêcher l’intervention de l’armée, les terroristes ont incendié plusieurs cases ainsi les constructions abritant la mission catholique. Ils se sont ensuite rendus au palais du chef de Bazou, Daniel Kémajou, et ont tué cinq membres de sa famille, après avoir pillé le palais. Daniel Kemajou a pu s’échapper. »

8- Vendredi 15 janvier 1960 : Appel de M. Ngayewang pour une « Table ronde bamiléké ».

« Chers compatriotes, Alors que notre pays jouit de sa souveraineté nationale, nous nous entredéchirons sous le couvert d’un terrorisme dégradant, antinational. Nous menaçons nos frères, nous les égorgeons comme des moutons, nous pillons leurs cases et après quoi, nous les incendions.
Chez nous, plus d’écoles, plus d’hôpitaux, plus d’églises, plus de marchés, plus de cultures, plus de transports : en un mot, plus de vie sur une économie agonisante, toute le monde vit dans la terreur et la désolation.
 
Et dire que notre département était celui des hommes intelligents, puissants, sages, travailleurs, vivant dans la communion d’amour et de fraternité. Mais, qu’est-il arrivé subitement ? On n’en sait rien. Cette conjoncture pose de nombreux problèmes qui ne peuvent être résolus avec clarté et efficacité qu’autour d’une table ronde. C’est notre problème et nous ne pouvons l’affronter que d’un cœur commun avec la même volonté et le même courage, sur le discernement de l’intérêt supérieur de notre cher et beau pays afin que l’idéal commun soit poursuivi à travers les positions des uns et des autres (…) (10)

9- Vendredi 15 janvier 1960 :Le gouvernement français décide le maintien de troupes militaires au Cameroun.

« Le Comité de défense s’est réuni sous la présidence du général de Gaulle et a procédé notamment à l’examen de la situation actuelle au Cameroun où, durant la période transitoire qui suit l’indépendance de cet Etat, les troupes françaises doivent contribuer au maintien de l’ordre sous l’autorité du gouvernement came-rounais ». (11)

20- Jeudi 10 mars 1960 :Démission des députés français de l’ALCAM.

Le Cameroun ayant déjà obtenu son indépendance, il allait de soi qu’il n’y avait plus de raison que des Camerounais continuent à siéger dans les Assemblées en France, tout comme des Français dans des Assemblées au Cameroun. C’est ainsi que Jules Ninine, Guyard, Champeau, Lagarde, Mandon, Duval, de nationalité française ont démissionné du Parlement camerounais. De même, Sissoko Sekou Cheick, de nationalité malienne, a également démissionné du Parlement camerounais. Ahmadou Ahidjo en fera alors son chef de cabinet.  

32- Mercredi 15 juin 1960 : Charles Okala évite Ernest Ouandié et Osendé Afana à Addis-Abeba.

La Conférence des Etats indépendants d’Afrique tenue à Addis-Abeba, en Ethiopie, avait vu la participation d’une délégation de l’Upc en exil, composée d’Ernest Ouandié et de Castor Osendé Afana. Basés à Conakry, ils avaient effectué le déplacement en qualité de membres de la délégation guinéenne.

Ahmadou Ahidjo, pour sa part, y avait délégué, pour représenter le gouvernement camerounais, son Ministre des  Affaires Etrangères, Charles Okala. Ce dernier, dès l’ouverture de la conférence, en avait été élu vice-président. Le soir de l’ouverture de la conférence, les délégations du Maroc, de la Tunisie et de la Guinée Conakry, avaient offert une réception conjointe à laquelle Ernest Ouandié et Castor Osendé Afana avaient été conviés. Aussitôt que Charles Okala les avait aperçu dans la salle, qu’il avait, sans plus demander son reste, quitté la réception, à la plus grande déception de l’ensemble des invités, qui avaient vu, à travers cette rencontre, une possibilité d’amorce de dialogue entre le gouvernement camerounais et l’Upc en exil.

Prix : 8 euros
Contact : enoh.meyomesse@gmail.com

Livre 1960 Enoh:Camer.be

© Correspondance : Les éditionsdu Kamerun



12/05/2010
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