CAMEROUN : LES RAISONS DE NOUS MOBILISER

CAMEROUN : LES RAISONS DE NOUS MOBILISER

CAMEROUN : LES RAISONS DE NOUS MOBILISERLe mot politique dans notre société fait peur en raison probablement de la mystification dont il fait l’objet au regard de sa pratique et de l’exercice de son pouvoir dans notre environnement. La vérité est que notre société et particulièrement notre jeunesse «craint» cette notion. On a pu s’en convaincre à la lecture des réactions qu’a suscitées notre premier courrier. Aussi, nous semble-t-il important de préciser l’intérêt de parler politique à une jeunesse camerounaise préoccupée par la quête du minimum vital. C’est pourquoi nous avons souhaité clarifier le sens donné au mot politique dans le cadre de cette initiative ainsi que ses objectifs, pour en faciliter la compréhension générale.

Plusieurs définitions peuvent être données au mot politique, selon qu’il est au féminin, au masculin ou même selon qu’il est considéré comme un adjectif ou un nom. L’émancipation politique de la jeunesse dont nous parlons ici, est un processus visant à affranchir notre jeunesse du préjugé selon lequel la politique est l’affaire des autres et de lui donner la possibilité de s’informer, de prendre ses responsabilités en favorisant l’analyse, le débat et l’expression. Aussi parlons-nous de "faire la politique" entendu comme exprimer ses opinions sur le pouvoir et son exercice, participer à la vie sociale et politique de la cité en tant que citoyen, jouissant des droits et remplissant les devoirs associés à cette qualité. En clair nous ne parlons pas ici de méthodes et stratégies de conquête du pouvoir politique qui sont du ressort des partis politiques, mais plutôt de l’importance de l’expérimentation du débat contradictoire, du dialogue constructif entre le présent et le passé pour envisager le futur.

Mais pourquoi parler «politique» à une jeunesse qui a faim d’emplois ?
Comme nous l’avions précisé dans le précédent courrier (Cf. Avant-propos), cette initiative ne s’oppose à aucune autre de quelque envergure ou de quelque bord politique qu’ils soient. Elle vient au contraire s’ajouter à une gamme variée de projets, de plaidoyers et de démarches pour envisager la sortie de l’impasse politique et du bout du tunnel économique et social dans lesquels se trouve malheureusement englué notre pays. Précisons que pour qu’il y ait des emplois, il faudrait au préalable une politique qui les promeuve, et cette politique c’est le pouvoir politique  (l’Etat et son gouvernement) qui est chargé de la penser et de la mettre en œuvre de même que les citoyens ont le devoir de l’apprécier.

Si on doit apprécier à sa juste valeur les efforts consentis par le gouvernement, les entreprises privées et la société civile pour soulager la misère de notre peuple, on ne saurait sur cette seule raison, refuser de penser autrement l’avenir. Puisque nous savons de manière presqu’unanime que c’est la mal gouvernance qui elle-même trahit une formulation biaisée des programmes économiques et l’absence de contraintes (sanctions) qui sont la cause principale de ce «marasme», alors pourquoi ne serait-il pas temps d’initier ce mouvement de citoyenneté politique, pour justement entrainer notre jeunesse à penser des programmes mieux structurés, à opposer sa volonté contre les promesses non tenues et à revendiquer des sanctions ?

Si nous voulons accepter nos différences tribales et les confiner à une saine manifestation de nos tribalités et non en tribalisme politique, si nous refusons de nous nourrir d’une corruption qui nous fait valser au rythme du «moon walk» en nous donnant l’impression que nous avançons alors qu’en réalité nous régressons de plusieurs pas, si nous souhaitons à l’avenir avoir de meilleures écoles d’agriculture pour former l’essentiel de ceux qui vont porter notre croissance et assurer ainsi la réduction du chômage de manière pérenne et efficiente, si on veut se donner les moyens d’oxygéner la démocratie en y participant individuellement ou collectivement, si enfin nous voulons redéfinir l’amour de notre pays non plus en fonction de nos faiblesses mais de l’intérêt supérieur de l’Etat, il convient de donner du sens à l’éducation au politique.

Mais cela dans notre contexte ne peut procéder que d’une démarche évolutive et participative, une construction qui interpelle les associations, les syndicats, les partis politiques, mais aussi l’Ecole. Parce que nous ne pouvons pas et n’avons heureusement pas la prétention de nous substituer à ces organisations, notre initiative qui est ouverte à l’ensemble de ceux qui veulent agir ensemble autrement, dans un débat contradictoire, ambitionne de servir de levier à cette prise de conscience collective d’une jeunesse qui veut préparer autrement son avenir, celui du Cameroun. S’intéresser à la politique et y participer est une façon pour chacun de se sentir responsable avec les autres du destin collectif.

Il est malheureusement aisé de constater que dans nos partis politiques, il y a peu d’espace pour la formation ; les programmes politiques très souvent sont ficelés pour porter la candidature d’un tel ou tel autre membre à un poste électif, et les jeunes des partis s’abandonnent à la dévotion et se limitent à la figuration. Pourtant ce sont ces jeunes qui n’ont pas expérimenté le débat contradictoire  qui n’ont pas eu la possibilité de proposer des solutions, qui ignorent quelques fois leurs devoirs citoyens vacillant entre la manipulation et la démagogie, qui seront appelés à exercer le pouvoir politique. Les mêmes maux produisant les mêmes effets, nous allons nous retrouver dans 20 ans si rien n’est fait, dans les situations similaires sinon pires que celles que nous décrions aujourd’hui, en restant incapables d’apporter des solutions efficaces.

S’il nous semble évident et nécessaire de vivre d’abord le présent et donc de s’occuper des questions ponctuelles, face au désintéressement croissant des gens pour la chose publique, il est urgent de nous remobiliser sur les questions les plus importantes pour notre avenir. C’est pourquoi nous pensons opportun de lancer cette initiative en cette année élective en proposant à la jeunesse de prendre une part active à cette élection, et poser ainsi les jalons de son émancipation politique. Nous devons commencer à nous préparer aujourd’hui pour que demain par exemple, au nom «de la conscience universelle» que nous pouvons nous aussi invoquer aux côtés de nos autres frères africains, nous ne puissions plus tolérer ce crime odieux contre notre jeunesse qu’est l’endettement de nos Etats dans les conditions où elle se fait aujourd’hui. 

Saint Augustin disait si opportunément, «Dieu qui t’a créé sans toi, ne te sauvera pas sans toi.»
Dans un courrier à venir, nous vous proposerons la feuille de route pour présenter la démarche envisagée pour lancer cette dynamique à laquelle nous vous invitons à participer massivement.

Pour le Collectif de réflexion,
 Alexandre Arsène BELL

© Correspondance de : Alexandre Arsène BELL


23/03/2011
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