Cameroun : L’échec du régime Biya n’est plus à démontrer tant au niveau interne que sur le plan international

Cameroun : L’échec du régime Biya n’est plus à démontrer tant au niveau interne que sur le plan international

Cameroun : L’échec du régime Biya n’est plus à démontrer tant au niveau interne que sur le plan internationalC’est un immense plaisir de me retrouver parmi vous aujourd’hui
Avant d’entrer dans le vif du sujet, permettez-moi de remercier les organisateurs de cette convention ainsi que l’ensemble des participants à cet événement. Je profite de cette occasion pour saluer nos compatriotes qui se battent quotidiennement sur le terrain et qui nous ont honoré de leur présence parmi nous. Permettez-moi enfin de rendre hommage à nos illustres aînés qui se sont battus pour l’émergence d’un Cameroun moderne souvent au prix de leur vie et qui ont à peine été évoqués lors de la célébration du cinquantenaire de l’indépendance.

Je voudrais partager avec vous aujourd’hui une conviction profonde : nous avons un grand pays qui a vocation au leadership en Afrique. Le Cameroun doit être devant et non derrière, il doit être l’une des principales locomotives de l’Afrique du Centre et de l’Ouest en s’appuyant sur ses immenses ressources humaines et naturelles, son bilinguisme, sa position stratégique, la proximité du Nigeria et la restauration des valeurs de progrès. Pour assurer le bien-être de ses citoyens et retrouver son rayonnement, notre pays doit avant tout résoudre son problème de leadership.

Pourquoi la prochaine échéance est-elle importante ?

L’échec du régime Biya n’est plus à démontrer tant au niveau interne que sur le plan international

Sur l’échiquier international, la voix du Cameroun est devenue muette depuis trois décennies. Notre pays a cessé d’être actif au niveau de la sous-région, de l’Union Africaine et du reste du monde au point de devenir inexistant dans les arènes internationales. Lorsque les investisseurs internationaux pensent investir en Afrique, notre pays n’est point mentionné et les sommes d’argent que vous envoyez à vos familles à travers Western Union sont supérieurs à l’argent que les étrangers investissent chaque année au Cameroun.

Au niveau interne, le règne du régime de Biya s’est soldé par la montée de la pauvreté de masse dans les villes et campagnes camerounaises à travers le chômage massif dans toutes les couches de la population, et le faible niveau d’accès aux services de base tels que la santé, l’éducation, le logement, l’eau, l’électricité et les routes. Au moment où le Rwanda vient d’instaurer une assurance médicale universelle pour les plus pauvres, nos compatriotes meurent quotidiennement de maladies éradiquées ailleurs parce qu’ils ne peuvent pas trouver 2000 Fcfa pour se soigner. Alors que la population du Cameroun a augmenté de manière substantielle au cours des trente dernières années, la croissance économique était négative. Par conséquent, plus de 90 % de nos compatriotes travaillent aujourd’hui dans le secteur informel et pour sortir de la misère, nos jeunes trouvent de plus en plus refuge à l’étranger.

Enfin, la crise la plus grave que traverse le Cameroun est une crise morale à travers l’émergence d’une société anomique marquée par la perte de l’esprit citoyen, la résignation ainsi que la prévalence de l’imposture, de l’incompétence, de l’ethnocentrisme et de la violence structurelle comme modes de gouvernement. A cet égard, permettez-moi simplement de partager avec vous mon indignation la plus profonde face à notre silence complice lorsque quelques éléments des forces de l’ordre sont apparus sur des images vidéo en train de molester des étudiants aux mains nues. Ces images ont ranimé dans ma tête les dérives et la privatisation de l’Etat vers la fin du règne de Mobutu avec la soldatesque que représentait la fameuse « garde présidentielle ». Elles ont ravivé dans mon esprit l’héritage nauséabond de l’ère qui s’achève au Cameroun. Sauf à renier notre devoir le plus fondamental-celui de protéger la vie et la dignité humaine, nous ne saurions construire une société où les parents restent indifférents à la violence systémique contre leurs enfants, où les habitants d’un quartier se croient protégés par une silencieuse complicité lorsque le rouleau compresseur se met en marche contre leurs voisins. Compte tenu de notre communauté de destin, nous devons retrouver une capacité d’indignation, une « ligne  rouge » que les gouvernements ne sauraient impunément franchir et un minimum de valeurs communes pour lesquelles nous sommes prêts à sacrifier notre bien-être individuel et notre vie. C’est ce prix que nombre de grandes nations aujourd’hui admirées ont payé.

L’objectif de 2011 est de mettre fin à cette triste parenthèse dans l’histoire du Cameroun.

Nous arrivons à la fin d’un cycle, celui de la deuxième République inaugurée en 1982. c’est une parenthèse historique qu’il convient de reformer dans les meilleurs délais pour retrouver le chemin du développement et de la réconciliation. Seul un changement de régime peut sortir notre pays de trois décennies de léthargie. Comme en 1958 ou en 1982, ceux qui gagneront les élections en 2011 dirigeront le Cameroun pour plusieurs décennies car une génération arrive en fin de parcours. Dès lors les enjeux sont clairs. Est ce que les Camerounais souhaitent que les trente prochaines années soient le prolongement des trois décennies qu’ils viennent de passer sous le régime Biya ? Compte tenu de l’échec de Biya qui a été imposé aux Camerounais par son prédécesseur, est ce que les Camerounais souhaitent que la succession de Biya se passe sans leur participation au choix de leur futur leader ?

Il est impératif de s’organiser dès aujourd’hui pour éviter un scénario à la Gabonaise. Compte tenu des rapports de forces sur le terrain, le parti-Etat RDPC dispose de tous les moyens pour organiser « une succession sur mesure » et confisquer le pouvoir en cas de vacances du pouvoir. Car au-delà du monopole de fait des moyens financiers et de coercition de l’Etat, l’Etat-RDPC a verrouillé le processus électoral (ELECAM, listes électorales et calendrier). Sur cette base, il pourrait être tenté d’annoncer la vacance du pouvoir après avoir finalisé les mécanismes de la succession.

A mon avis, trois raisons majeures expliquent les multiples échecs de l’opposition face au régime Biya. En premier, l’opposition camerounaise n’a pas de message mobilisateur capable de galvaniser la population pour le changement. En clair, les gens ne sont pas prêts à se sacrifier s’ils ne sont pas convaincus que leurs conditions de vie seront meilleures que celles prévalant sous le régime Biya. Cette déficience est liée à l’organisation de nos partis qui oublient souvent que la prochaine élection commence à se préparer dès la fin de la précédente et qu’ils ne sauraient gagner une campagne en trois mois contre un parti-Etat. Ensuite l’opposition camerounaise se présente en rangs dispersés contre une machine rodée dans la fraude électorale dans un mode de scrutin anachronique à un tour qui ne saurait être accepté dans la plupart des pays africains. La troisième raison de l’echec réside dans l’incapacité des forces politiques et sociales à inverser le rapport de forces interne à travers une mobilisation de masse susceptible de faire comprendre au gouvernement et à la communauté internationale que le non-respect du vote des Camerounais pourrait aboutir à une instabilité prolongée et préjudiciables à tous. L’expérience de nombreux pays africains montre que les risques d’instabilité politique affectent l’exploitation des ressources économiques, le régime en place n’a qu’une alternance : s’ouvrir au changement précipitamment.

Comment assurer la victoire ?

Avant d’aborder le cas spécifique de notre pays, permettez-moi de mentionner deux pays dont l’expérience dans la quête du pouvoir m’aséduit récemment. Je veux parler du Benin et du Sénégal dont les deux ingrédients sont la préparation d’une plateforme commune de l’opposition et la désignation d’un candidat unique pour affronter le parti au pouvoir.

En ce qui concerne le Cameroun, je suggère que nos actions s’orientent vers les axes suivants :

- Mise en place d’un cadre de concertation permanent regroupant les forces vives de l’intérieur (opposition, société civile) et la diaspora pour préparer la plateforme, les modalités et le calendrier pour le changement ;

- Préparation d’un programme d’alternance pour gagner les cœurs et les esprits des Camerounais et les mobiliser pour le changement ;

- Campagnes de mobilisation sur le terrain pour assurer les inscriptions sur les listes électorales ;

- Transmission au gouvernement d’un cahier des charges sur les conditions minimum pour l’organisation d’élections transparentes (listes électorales, ELECAM, etc) et lancement d’une campagne nationale et internationale au moins un an avant les élections sur les risques d’implosion liés à la fraude électorale.

- Mobilisation de la diaspora pour soutenir les actions sur le terrain et assurer le lobbying à l’extérieur (tirer les leçons de la campagne d’Obama contre la machine institutionnelle de Madame Clinton) ;

- Préparation d’un cahier des charges pour la gestion de la transition en cas de vacances précipitée du pouvoir.

Je vous remercie

© Correspondance de Via Le Messager : Eugene Nyambal


23/08/2010
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