Cameroun: La responsabilité des intellectuels camerounais dans le bilan terne des cinquante ans d’indépendance

Cameroun: La responsabilité des intellectuels camerounais dans le bilan terne des cinquante ans d’indépendance

Universite Buea:Camer.beS’il est une intelligentsia passée maître dans l’art de rendre les autres responsables de la situation peu reluisante de son pays,c’est bien l’intelligentsia camerounaise. Plus qu’ailleurs, la rengaine sur le colonialisme est de mise, toutes les fois où l’on aborde la question du mal développement, voire carrément du non développementau Cameroun.Un mot, rapidement,sur les malversations financières de l’équipe dirigeante – sans toutefois égratigner le président de la République – et mille sur le « rôle néfaste » de l’occident, plus précisément l’ex-puissance coloniale qu’est la France. Ce faisant, l’intelligentsia camerounaise s’innocente totalement, refuse de reconnaître sa part de responsabilité dans le développement zéro que vit le Cameroun depuis 1960.

Ses thèmes sont connus.

PAS DE DEVELOPPEMENT SANS MONNAIE NATIONALE

En tête des thèmes dont elle raffole, se trouve la fameuse question de l’impossible développement du Cameroun tant que celui-ci ne se dotera pas de sa propre monnaie. C’est un intellectuel du nom de Tchouindjang Pouemi, enseignant à l’Université de Yaoundé, qui, dans son ouvrage « Monnaie, servitude et liberté », paru à la fin des années soixante-dix, est venu systématiser cette idée, et, dans le même temps, l’a popularisée. Aujourd’hui, en conséquence, les intellectuels camerounaisqui se veulent « progressistes », voire« révolutionnaires », n’ont plus que cette rengaine à la bouche. Chose étrange, la plupart des défenseurs de cette thèsene sont simplement pas au courant de la réalité des accords (dans le plus grand nombre de cas ils ne les ont même pas lus) que le gouvernement camerounais a signés, au mois de novembre 1960, sur la monnaie, et plus particulièrement lesarticles 25 et 33 de ces accords qui stipulent que : « Art. 25 : La qualité d’Etat indépendant et souverain acquise par le Cameroun lui confère le droit de créer une monnaie nationale et un Institut d’Emission qui lui soit propre ». « Art. 33 : La République du Cameroun et la République française reconnaissent le droit de mettre fin, pour ce qui les concerne, au régime monétaire visé aux articles 25 à 30 du présent accord, si ce régime paraissait à l’une ou à l’autre devenir contraire à la sauvegarde de ses intérêts légitimes. En ce cas, les deux parties conviennent qu’elles entameraient des négociations au sein de la commission franco-camerounaise afin de déterminer d’une part  le délai préparatoire à la réforme, d’autre part, les modalités de celle-ci (…) et notamment les relations de la nouvelle monnaie avec le franc français… »

Traduction, d’une part c’est bien le gouvernement camerounais qui a signé ces accords de son propre gré, d’autre part, il a le loisir de les dénoncer à tout moment, même aujourd’hui.

Mais, malgré cela, un grand nombre de « révolutionnaires » camerounais refusent, systématiquement, de poser le problème du retrait de la zone franc au gouvernement actuel du Cameroun, c’est-à-dire celui de Paul Biya.

Ils accusent plutôt la France d’exploiter le Cameroun à travers le franc cfa. La dénonciation de ces accords ne mettrait- elle pas fin à cette « exploitation » ? Comment accuser le gouvernement français sur ce point, mais pas le gouvernement camerounais ? L’un n’exploite- t-il pas, finalement, avec  le consentement de l’autre ? Le gouvernement camerounais n’est-il pas complice de cette « exploitation » ? Mais, nul ne pose le problème en ces termes, car le faire reviendrait à s’attaquer à Paul Biya…ô sacrilège !

LA PENSEE PRECEDE L’ACTION

On ne le dira jamais assez, la pensée précède l’action. Jusqu’à ce jour, soit cinquante longues années après la proclamation de l’indépendance, les intellectuelscamerounais n’ont toujours pas été capables de théoriser le développement du Cameroun, de le penser,de l’imaginer, de le concevoir. Ils se retrouvent, tout bonnement, ballottés,comme feuilles au vent, par les théories des autres. Hier, c’était la planificationde l’économie qui était la solution miracle à appliquer. Ce qui avait été pensé par les Européens et les « experts » de la Banque Mondiale, du Fonds Européen de Développement, etc.

Alors, ils s’étaient mis à chanter à gorges déployées les vertus des plans quinquennaux. Puis, un beau matin, les« experts » ont décrété que la planificationde l’économie n’était pas de nature à développer le Cameroun, autrement dit, tout le contraire de ce qu’ils avaient fait croire des décennies durant. Il fallait plutôt privatiser l’économie. Les agrégés camerounais se sont mis aussitôt à vanter, avec le même talent, les vertus des privatisations et de l’économie libérale. Personne n’a ouvert la bouche pour critiquer quoi que ce soit. Ils se sont même mis à écrire des livres entiers pour dire combien, grâce aux privatisations, l’économie camerounaise allait « enfin » pouvoir « décoller ».

Dix années plus tard, zéro développement, zéro décollage, rien du tout. Sous d’autres cieux, on aurait vu des réflexions inonder les rayons de librairies pour chercher des solutions. AuCameroun, rien de cela. Bien plus grave, les agrégés camerounais sont plutôt en quête de promotions politiques,tout simplement, dans ce régime qui a conduit le pays dans lefossé. Ils imaginent toutes sortes d’arguties pour plaire au président de la République, dans l’espoir incertain d’une promotion dans l’administration publique, voire une entrée au gouvernement.

C’est ainsi qu’ils ont créé de véritables serpents de mer du genre« G11 », « Brutus », etc, le tout ayant pour dénominateur commun, « ceux qui entourent Paul Biya sont des incompétents», traduction, « il gagnerait à faire appel à nous ». Ils se lancent dans l’alchimie qui consiste à dissocier les vertus de Dieu le Père de celles de ses anges.Ils proclament haut et fort que « Dieu est bon, mais ses anges sont mauvais ». Aberration. Si Dieu est bon, ses anges ne peuvent être que bons, et si ses anges sont mauvais, c’est que lui, également, est mauvais ?

© Source : La Cité N° 99 Février - Mars 2010


27/03/2010
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