Cameroun : HARO SUR LA CHASSE DE NOS LIONS, PLACE A LA RECONSTRUCTION DE LEUR CAGE

Cameroun : HARO SUR LA CHASSE DE NOS LIONS, PLACE A LA RECONSTRUCTION DE LEUR CAGE

 

Macaire Lemdja:Camer.beLe Cameroun, après l’élimination de ses Lions de la première coupe du Monde organisée en terre Africaine, au pays de Madiba, Nelson Mandela, symbole vivant de la réconciliation des habitants de son pays dont une partie a souffert de la discrimination raciale d’une autre partie, se sent humilié dans sa chair au point où certains de ses enfants se lancent dans la chasse aux autres pour trouver, disent-ils, les responsables de ce fiasco.L’Afrique du Sud, le pays de l’arc-en-ciel, du concept de l’ubuntu selon lequel « Le sentiment profond que nous ne sommes humains qu’à travers l’humanité des autres ; que s’il nous est donné d’accomplir quelque chose en ce monde, le mérite en reviendra à parts égales au travail et à l’efficacité d’autrui » comme le rappelle Nelson Mandela dans la préface  des « Chemins de Nelson Mandela », livre que lui a consacré l’écrivain Richard STENGEL, ne doit-il pas nous inspirer dans la reconstruction de la cage de nos Lions afin qu’ils soient, à l’avenir plus « indomptables » que jamais.

Sans occulter les tares qui ont entaché le parcours de nos Lions dans cette compétition, n’est-il plus utile dès aujourd’hui de proposer des solutions qui amélioreront leurs prestations futures ? J’en citerai quelques unes qui sortent du champ de prédilection des 20 millions d’entraîneurs (Choix tactique, des joueurs etc.) que comptent notre pays tout en proposant modestement des pistes de solutions pour rester constructif.

Une organisation approximative voir inexistante.

Les mêmes causes provoquent les mêmes effets. Il est illusoire de croire à la prédominance éternelle de nos Lions sur l’échiquier footballistique continental, son émergence et la consolidation durable de sa place dans la planisphère footballistique. Notre prestation en demi-teinte à la CAN en 2008 au Ghana, en dépit de notre place de finaliste, n’aura été aucunement instructive pour nos dirigeants et les joueurs.  La suite, nous la connaissons, échec à la CAN 2010 en Angola, élimination au premier tour de la coupe du Monde 2010 en Afrique du Sud sans avoir glané le moindre point. S’imaginer qu’à la simple vue de nos Lions, les autres équipes trembleraient comme jadis, a été notre seconde erreur ces dernières années. Au rythme où nous évoluons, sans être condescendant et méprisant à l’égard des autres nations, Sao Tomé et Principe finira par nous battre comme c’est le cas pour le Gabon, le Tchad, la RCA sans oublier la Guinée Equatoriale aujourd’hui. C’est d’ailleurs un phénomène similaire que l’on observe avec les tricolores en France.

Lors du Mondial 1974 en Allemagne, les Léopards de l’ex Zaïre (RDC) prenaient un retentissant et humiliant 0-9 devant l’ex-Yougoslavie.
La plupart des autres pays africains y compris le Cameroun aurait pris la même déculottée à l’époque voir pire. Le Cameroun fut le premier pays Africain à se distinguer face au football des grandes nations lors de la Coupe du Monde militaire qui suivit. Roger MILLA, Théophile ABEGA, Arantès MBIDA, Dagobert MOUNGAM incorporés pour la circonstance dans les rangs de l’équipe de nos FAC (Forces Armées Camerounaises ; appellation de l’époque) et bien d’autres doivent s’en souvenir.

Notre participation ultérieure en quart de finale de la Coupe du Monde en 1990 consacra définitivement l’émergence d’un football africain dénué de tout complexe d’infériorité.

Ce fut néanmoins  l’arbre qui cachait la forêt. En six participations en phase finale, beaucoup de Camerounais ne retiennent que cette épisode, loin d’être le fruit d’un travail cohérent, en oubliant, comme le rappelle si bien aujourd’hui Antoine BELL, les cinq autres participations négatives dont la dernière la plus médiocre.

Le Cameroun fit alors des émules en Afrique et ailleurs notamment en Asie (Japon, Corée du Sud, Corée du Nord, Chine, Indonésie) et au Moyen Orient.
Pourquoi les nations africaines et de l’Asie notamment autrefois « petites » en football ne suivraient-elles pas le chemin du Cameroun pour se hisser au firmament? Surtout qu’elles ont compris qu’en s’organisant et en travaillant dans la durée tout en profitant de l’expérience d’un monde footballistique globalisé, elles réussiront à supplanter les autres qui continuent à vivre sur leurs lauriers défraîchis.
Toute chose que nous applaudissons d’ailleurs des deux mains mais avec néanmoins cette réserve qui nous chagrine. Nos Lions, parallèlement à cette évolution, régressent à l’image de notre pays.

Tout est dans l’improvisation, l’impréparation, le manque d’anticipation dans le renouvellement de l’équipe, le clientélisme, la corruption bref la mauvaise gouvernance dans sa forme la plus primaire.
Gouverner dit-on c’est anticiper, prévoir, décider, assumer, corriger et sanctionner si besoin. Cela est vrai en politique, en économie mais aussi dans la gestion d’une discipline sportive.

La Fédération camerounaise de football comme les autres fédérations a-t-elle un calendrier pour les équipes nationales?
Un projet sportif pour nos équipes nationales de football à exécuter selon un échéancier clair et précis ?
Un budget prévisionnel qui tienne compte des différentes échéances annuelles auxquelles doivent participer ces équipes ? Sinon le Ministère de tutelle l’intègre-t-il dans ses projections budgétaires ou faut-il attendre encore un décaissement express du Ministère des finances sur « Haute instruction de la hiérarchie » avec tout ce que cela comporte comme lourdeur et flagornerie?
Dispose t-elle d’avance  d’une grille ou barème de primes ou fonctionne t-elle à la petite semaine ? Toute chose qui permettrait d’éviter des négociations de marchands de tapis la veille des compétitions et éventuellement des couacs préjudiciables au moral des « troupes ».
Et quand ces couacs arrivent à l’intérieur ou à l’extérieur, pourquoi les joueurs doivent-ils répondre ? N’est-ce pas de la responsabilité d’un directeur de la communication qui fait défaut aujourd’hui à notre équipe nationale ?

Autant elle publie chaque année un calendrier de matchs pour les championnats nationaux, autant elle connaît les différents RDV de nos différentes équipes nationales.

En conséquence elle a le devoir de planifier et annoncer à l’avance les périodes de stages de regroupement conformément aux règlements de la FIFA que le staff technique, les joueurs doivent respecter, de prévoir les lieux de ces regroupements avec réservation des sites de préférence dans le centre cofinancé par la FIFA dans les environs de Yaoundé et dont nous espérons l’achèvement rapide avec l’allocation des 5 millions d’euros au Cameroun pour sa participation au Mondial, d’anticiper sur les délais de convocation des joueurs avec des dates limite, d’envoyer à temps les dites convocations aux joueurs et à leurs clubs avec les titres de transport afférant.

Autrement dit prendre en compte tous les paramètres d’une bonne gestion de projet. Le travail récurrent de préparation de nos Lions est donc pénalisé par une absence de planification et de programmation que l’on retrouve d’ailleurs dans d’autres domaines de la vie de notre pays, économique notamment. Les outils logiciels pour le faire ne manquent pas sur le marché. Seule la volonté a déserté les couloirs de notre fédération de football.

Pourquoi les joueurs arrivent-ils, de manière récurrente, chacun à son tour? La tanière des Lions est-elle devenue la cour du roi Peto?

Il est inadmissible que « tout le monde se dit patron, tout le monde se dit grand » dans cette équipe, comme le chante NDEDI  EYANGO dans un de ses tubes. Le leadership ou le responsable ne s’incline pas devant les forces de l’argent.
Pourquoi a-t-on laissé la générosité, appréciable par ailleurs, d’un joueur remplacer les obligations de la fédération, de l’Etat, à travers ses promesses de prime aux autres joueurs ?

J’entends déjà d’ici les clameurs de ceux qui objecteront en disant « Que peuvent faire nos officiels face aux joueurs disposant de salaires colossaux? ».

A ceux-là je répondrai par avance que dans leurs clubs respectifs la situation est la même et que la discipline y règne. Le problème est certainement ailleurs. Peut-être voir surement dans ce qui nous anime lorsque l’on travaille pour notre pays. Servir ou se servir?

L’atmosphère délétère autour et dans l’équipe.

On ne peut pointer chaque année le doigt sur les mêmes plaies comme l’ont fait l’ambassadeur itinérant Roger MILLA et les autres récemment dans les médias sans y apporter une médication définitive.
Pourquoi l’équipe nationale draine-t-elle autant de monde (délégation officielle ou officieuse) lorsqu’elle se déplace?
Pourquoi les joueurs professionnels pour la plupart, disciplinés dans leurs clubs respectifs le deviennent moins en équipe nationale? Est-ce seulement une question d’argent?

Si c’est le cas, peuvent-ils oublier que les prestations en équipe nationale notamment dans une compétition comme la Coupe du Monde boostent leur carrière tout en garnissant leur portefeuille? Les exemples des frères BIYICK, de NJANKA BEAKA et des autres sont là pour le confirmer.

A l’image des autres secteurs de la vie de notre pays, cette indiscipline n’est que logique. Elle découle de l’absence d’institutions fortes et d’hommes forts qui les animent c’est-à-dire ayant un sens aigu du devoir et un amour immodéré pour leur pays.  Lorsque la politique rentre dans les prétoires, la justice en sort dit-on, il en est de même lorsqu’elle navigue dans les eaux footballistiques.
Pareillement quand la discipline déserte les casernes, l’efficacité de la grande muette s’en ressent.  La cohérence, la cohésion d’une équipe sans la discipline ne peut qu’en souffrir.

Un entraineur connu d’une équipe célèbre, Pep GUARDIOLA pour ne pas le citer, ne s’est-il pas récemment séparé de joueurs talentueux dont il estimait la présence nuisible à la cohésion du club?

MOURINHO ne tient-il pas en bride tous ses joueurs y compris les stars avec le succès que l’on connait ?

Chaque équipe dispose en principe d’un règlement intérieur. Si c’est le cas au sein des Lions, il faut peut-être le durcir et l’appliquer afin que le clanisme et le « bizutage » permanent des nouveaux par un groupe d’anciens ne soient une règle mais plutôt une exception. Il est préférable d’avoir une équipe composée de joueurs moins talentueux qui s’entendent bien qu’une constellation de vedettes aux égos prononcés qui s’entredéchirent.
Paul LE GUEN connu pour sa forte personnalité qu’il a étrennée au PSG et dont l’arrivée répondait entre autre à cette exigence de remise en ordre et de discipline dans la tanière de nos Lions, a-t-il simplement, après l’euphorie de la qualification pour le Mondial, seul objectif prévu peut-être à la signature de son contrat, pris les couleurs locales, le pli que l’on reproche aux entraîneurs locaux?
Si tel était le cas, au montant de son salaire, la mayonnaise fut cher payée pour le goût obtenu. Autant recruter un entraîneur local pourrait-on se dire.

Le choix d’un entraineur sélectionneur

La sempiternelle question du choix d’un entraineur local n’est qu’une arlésienne. Focaliser son attention sur la nationalité du titulaire du poste, comme semblent le faire certains de mes compatriotes aujourd’hui, ne répondra pas aux défis auxquels sont confrontés nos Lions si les prés requis susvisés ici n’auront pas été remplis.
Nous avons eu  dans le passé des entraîneurs locaux, de Raymond FOBETE à NYONGHA en passant par Jean Paul AKONO avec des résultats contrastés.  Si ce dernier a emmené nos Lions à la victoire olympique, n’est-ce pas en raison d’une bonne préparation, une excellente cohésion dans le groupe, l’amour du maillot qui animait chacun des joueurs de l’équipe, une discipline sans faille qu’y régnait, un milieu, imperméable à l’immixtion du politique, qui entourait nos Lions.
Mais après cette médaille olympique pourquoi, avec le même entraîneur, les Lions n’ont-ils plus été que l’ombre d’eux-mêmes ? Le retrait définitif de l’équipe de Laureen ETAME MAYER fut pourtant le signe avant coureur ou prémonitoire de la dislocation future de ce groupe.  Les acteurs du monde du ballon camerounais n’ont pas voulu, pu ou su s’emparer véritablement du problème.

Le peuple Camerounais et nos dirigeants ont vite oublié les longues chevauchées de FOE, signe de détermination et d’amour de son pays, et à qui  je voudrai rendre ici un vibrant hommage.

C’est l’exemple que devront emprunter nos futurs Lions après signature d’une charte de bon comportement à élaborer par les différents acteurs de la chaîne footballistique camerounaise : Fédération, Ministère du Sport, joueurs, arbitres, journalistiques sportifs.
Autant l’équipe de l’Angleterre est entraînée par un étranger autant la nôtre peut l’être. Peu importe sa nationalité, sa peau, sa religion, compte tenu de la globalisation, ce qui compte c’est l’efficacité. Celle-ci dépendra de l’application des mesures que nous préconisons ici.
Suivant une feuille de route précise, les entraîneurs qui se porteront candidats aux postes, devront désormais y répondre par une offre détaillée de leurs services et non par leurs états de services.

Une sélection inopérante des joueurs

Alors que dire du faux débat sur les jeunes et les vieux, débat qui désacralise l’expérience cumulée des uns et encense la juvénilité des autres. Nous avons l’art, nous Camerounais de divertir et perdre notre temps sur des faux sujets. C’est à l’image du débat qui opposa les tenants de la «  nouvelle génération » qui voulaient prendre les rênes du pouvoir, dans les années 80 au Cameroun, à la vieille garde de l’époque.

A qui l’histoire donne-t-elle raison aujourd’hui dans ce ridicule conflit de générations?

Pour reprendre l’idée de l’ambassadeur itinérant, ne faut-il pas amalgamer dans la même équipe les jeunes et les vieux.

Le vin ne se bonifie-t-il pas en vieillissant lorsqu’il est de surcroît surveillé par les jeunes vignerons?
Le Cameroun a-t-il subitement perdu la mémoire au point d’oublier l’épopée de nos Lions lors de la Coupe du Monde en Italie, en 1990?

Il est temps que les différents acteurs de la chaîne footballistique camerounaise servent leur pays et non leurs égos, gloires, poches bref leurs intérêts personnels.

Qu’ils se rassurent ! La gloire retrouvée des Lions, par des victoires, rejaillira obligatoirement et de manière individuelle sur chacun d’eux mais pas avant. Pourquoi s’étriper pour un gâteau ou un « gombo » qui n’est pas encore mitonné? Le partage ne peut se faire qu’après avoir obtenu le sésame.
Rien n’est perdu si l’on prend dès maintenant les taureaux par les cornes en posant les jalons d’une organisation rationnelle et en appliquant des règles strictes à tous les niveaux.

Nous les avons encensé hier, peut-être trop même, cessons dès aujourd’hui de les diaboliser, de tirer sur l’ambulance pour reconstruire leur cage. Haro sur la chasse aux Lions, bref à la chasse aux sorcières. Ce fiasco n’est pas seulement la faute des hommes. C’est celle d’un système qu’il faut désormais reformer profondément. Une rupture s’impose plus que jamais. Rien ne sera plus comme avant pour nos Lions après cette coupe du monde.

Le football étant devenu l’opium de notre peuple que dis-je, le crack de ce peuple,  en ces temps de misère, gare à ceux qui fausseront les calculs politiciens de certains. En ces temps de tumulte annoncés, le sol risque de se dérober sous leurs pieds. Les opérations de chaises musicales pourraient à nouveau se reproduire et faire valser les titulaires de certains postes.

Lou kot ooo

© Correspondance : Adrien Macaire LEMDJA



28/06/2010
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