Cameroun : Exploitation forestière, sous scolarisation et prostitution à la mode

Cameroun : Exploitation forestière, sous scolarisation et prostitution à la mode

 

Cameroun : Exploitation forestière, sous scolarisation et prostitution à la modeLes sociétés forestières ont toujours privilégié le recrutement d’une main-d’œuvre non qualifiée, dans le but de diminuer leurs charges salariales. En effet, la jeunesse locale en âge scolaire constitue leur cible privilégiée.

Ces jeunes travaillent très souvent dans des conditions qui ne respectent aucunement la législation du travail au Cameroun. Un autre chef traditionnel se plaint : «Ils viennent ici et proposent à nos enfants du travail avec des salaires dérisoires et ils ne font pas la promotion de l’éducation. Quand ils s’en vont, nos jeunes sont abandonnés à eux-mêmes et se livrent à la consommation de l’alcool, à la prostitution et à la drogue».

Dimako, ville située à une trentaine de kilomètres de Bertoua, sur l’axe Bertoua-Yaoundé, est le prototype de la situation décriée par cette autorité traditionnelle. Du temps de sa gloire, la Société forestière et industrielle de Dimako (SFID) avait massivement recruté les jeunes au point de vider les salles de classe des établissements scolaires de la localité. Cette opération avait compromis l’éducation de ces jeunes et de surcroît leur avenir.

A terme, c’est une bonne génération qui n’a pas pu mener à bien son éducation et se retrouve aujourd’hui désoeuvrée et sans repères, constituant un handicap sérieux pour le développement de cet arrondissement. Et pourtant, nous sommes dans la ville qui a vu naître et grandir Chantal Biya, la première dame de ce pays et qui vient de célébrer il y a quelques jours encore la nomination d’Oswald Baboké au poste de conseiller technique au Cabinet civil de la présidence de la République. Par ailleurs, le maire de la localité, Mongui Sossomba Janvier, est président de l’association des communes forestières du Cameroun.

S’il est vrai que l’exploitation forestière génère des emplois et favorise l’émergence du petit commerce, il n’en demeure pas moins vrai que cette activité entraîne la prostitution, l’alcoolisme et la consommation des drogues. C’est une évidence que les localités de Mindourou, Lokomo, Kika, Salapoumbé, Yokadouma, Mbang, Lomié et autres sont des sanctuaires de ces deux fléaux. Une récente enquête menée par notre confrère «Le Facteur» a montré que près de 85% des jeunes filles qui pratiquent la prostitution sont originaires de ces localités et ont abandonné leurs études très tôt pour se livrer à cette activité. Interrogée, Anne, une habitante de Mindourou, explique que : «Lorsque les ouvriers touchent leurs salaires, ils se livrent à nous et nous paient à boire. Nous suivons aussi les gens comme les chauffeurs de grumiers qui, en attendant leur chargement, ont besoin de nous pour perdre le temps et chasser le stress».

Un tour dès 18 heures aux alentours du parc à camions de Manjou, une banlieue de Bertoua sur la route du Nord, et permet d’apprécier la réalité. C’est le moment où les motos taximen font le plus de recettes, eux qui surchargent les jeunes filles qu’ils viennent «livrer» aux conducteurs de ces gros camions. A ce rythme, on comprend aisément pourquoi le taux de séroprévalence est élevé dans ces localités. Même les multiples campagnes de sensibilisation entreprises dans ces endroits par certaines Ong et associations n’ont pas aidé à faire comprendre le danger qu’ils courent à ces hommes et femmes qui n’ont pas toujours le temps de s’acheter un préservatif. En dépit des maux qui gangrènent ces milieux, les exploitants forestiers négligent toute mesure de protection des populations environnantes et sont plutôt préoccupés par le pillage des forêts et l’accumulation des capitaux, sans se soucier des vies humaines.

© africa-info : Bernard Bangda



29/06/2010
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