Cameroun - Epervier : Opération de charme ou arme de destruction

Cameroun - Epervier : Opération de charme ou arme de destruction

Cameroun - Epervier : Opération de charme ou arme de destructionQuatre ans après le lancement de sa phase répressive, la justice en est toujours aux procédures pour Abah Abah et Olanguena Awono.

«Je suis ici pour rien. J'ai dit à la Cour suprême de manière solennelle que je ne dois rien à personne. Je n'ai commis aucun acte illégal. Tout le reste n'est qu'affabulation». Cinq années plus tard, Urbain Olanguena Awono tient encore le même langage. «La conviction de mon innocence au plan spirituel et psychologique c'est important.

Cette vérité est un substrat primordial qui est le socle de mon quotidien», poursuit l'ancien ministre de la Santé publique (Minsanté). Hier, 1er avril, il a entamé sa cinquième année de détention provisoire à la prison centrale de Kondengui à Yaoundé où, l'ancien ministre de l'Economie et des Finances (Minefi), Polycarpe Abah Abah, et lui sont venus gonfler les rangs des nombreuses personnes en attente de jugement.

Leur statut social n'aura pas pour autant empêché le système qu'ils ont longuement servi,de les broyer au rythme de traitements dégradant depuis leur interpellation, le 31 mars 2008 à leur domicile respectif à Yaoundé. En l'espace de quelques heures, la vie de ces anciens hauts commis de l'Etat a basculé. Gardés à vue dans les locaux de la direction de la police judiciaire à Yaoundé, ils sont mis en examen puis écroués quelques jours plus tard à la prison centrale de Yaoundé pour détournement de deniers publics.

Lâchés dans la jungle de Kondengui sans aucune protection particulière parmi des braqueurs et des tueurs, s'en sont suivis sept mois d'isolement total pour ces deux présumés détourneurs. Et lorsqu'il regarde dans le rétroviseur, c'est un Urbain Olanguena Awono meurtri qui voit «quatre années d'humiliation, quatre années de torture, quatre années d'atteinte à votre honneur, à votre dignité... » Et l'homme de s'interroger : «quand est-ce que tout cela va-t-il s'arrêter?»

Un discours pas très éloigné de celui de Polycarpe Abah Abah. Pour l'ancien Minefi en effet, il y a eu «beaucoup d'excès» dans ce qui aura conduit à sa déchéance ; «beaucoup d'acharnement et de stigmatisation, de manipulation et de désinformation, de mensonge et de duplicité dans un climat de haine sans précédent. Voilà ce dont ma famille et moi-même sommes victimes depuis un peu plus de quatre ans de la part d'un individu (désormais bien connu) et de ses affidés contre lesquels nous ne gardons cependant ni haine, ni rancune, ni désir de vengeance. Des individus à qui nous avons pardonné».

Après cette déclaration faite au reporter, Polycarpe Abah Abah observe une minute de silence. Son regard est lourd. L'ancien Minefi revit comme si s'était hier, le film de son arrestation au petit matin de la journée du 31 mars 2008, à son domicile de Yaoundé à Odza. «Après mon engagement, mon dévouement, ma loyauté vis-à-vis des institutions de la République et ma modeste contribution au développement du Cameroun, j'éprouve tout simplement beaucoup de peine», déclare-t-il, la mine défaite. Et Urbain Olanguena Awono de poursuivre dans sa série de questionnement : «Après avoir servi loyalement le pays pendant plus d'un quart de siècle, est-ce que c'est ce que nous méritons?»

Passées l'humiliation, puis l'incrédulité, place désormais au combat judiciaire, pour ces figures de prou de l'opération de lutte contre la corruption baptisée en son temps, «Epervier». Eux qui ont été rejoints des mois plus tard, voir des années après, par d'autres congénères à l'instar de l'ancien Secrétaire général de la présidence de la République, Jean-Marie Atangana Mebara (1er août 2008) ; l'ancien ministre de l'Education de base, Haman Adama Halimatou (06 janvier 2010) ou encore, Yves-Michel Fotso, ancien administrateur directeur général de la désormais Camairco...

© journallactu.com : Bertille Missi Bikoun


03/04/2012
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