Cameroun : A la rencontre de Monsieur Célestin Kamanou Tawamba le PCA de l’Association des producteurs des pâtes alimentaires

Cameroun : A la rencontre de Monsieur Célestin Kamanou Tawamba le PCA de l’Association des producteurs des pâtes alimentaires

 

Celestin Tawamba:Camer.beMonsieur Célestin Kamanou Tawamba est une personnalité bien connue du paysage médiatique camerounais. Homme d’affaires au potentiel intarissable, il est la figure de proue de la nouvelle génération des hommes d’affaires qui font aujourd’hui la fierté du continent africain. En effet, cet ancien diplômé de HEC Paris allie courageusement réussite économique et intelligence managériale. Sa grande particularité est de savoir se distinguer dans la promotion des initiatives osées. A l’instar du projet CINPHARM qui lui a permis de s’engouffrer dans le très stratégique créneau de la fabrication des génériques dont la commercialisation ne tient plus que sur les formalités administratives. En marge de l’industrie pharmaceutique, il n’est pas moins le Président du Conseil d’Administration des sociétés LA PASTA SA et PANZANI, entreprises leaders dans la fabrication et la commercialisation des pâtes alimentaires dans la Zone CEMAC. C’est d’ailleurs en tant que Président de l’Association des producteurs de pâtes alimentaires qu’il jette un regard exercé sur ce secteur actuellement traversé par une tourmente occasionnée par les actions conjuguées d’une concurrence déloyale profitant du laxisme d’une administration tatillonne. Interview exclusive !
 
Monsieur Le Président, quel est l’état des lieux actuel dans la filière des pâtes alimentaires dans la zone CEMAC en général et au Cameroun en particulier ?

On ne le sait pas assez, la filière des pâtes alimentaires dans la zone CEMAC est assimilée à l'espace économique Camerounais, car le Cameroun est le seul pays de la zone CEMAC qui dispose des usines de fabrication des pâtes alimentaires. Le Cameroun dispose plus précisément de 5 entreprises (dont l'une vient de fermer ses portes pour faillite) dotées d'une capacité de production de 45 000 tonnes par an, susceptibles de ravitailler toute la zone CEMAC. Cela représente en clair près de 1000 emplois et 15 milliards d'investissements. Le Cameroun est ainsi le seul pays en Afrique centrale et de ouest qui détient autant d'usines. Il y a au Cameroun plus d’usines qu’en Cote d'ivoire, Sénégal et Bénin réunis.

Quels sont les problèmes majeurs rencontrés dans le déroulement de vos activités, et quelles sont les raisons justifiant cette situation ?

Le problème le plus important est naturellement celui de la rentabilité des outils de production qui sont sous-utilisés, notamment du fait de la concurrence déloyale des pâtes importées venant principalement de la Turquie. Nos outils de production sont utilisés à peine à 45% des capacités de production. Il y a donc une sous-activité mortelle pour les entreprises du secteur. Cela peut paraître curieux. En effet, le secteur des pâtes alimentaires est pourtant réglementé au Cameroun, car l'importation est soumise à l'obligation d'obtenir un certificat de conformité à la norme qui devrait être délivré actuellement par l'Agence des normes et de la qualité (ANOR). Or cet organe est le véritable fossoyeur de l'économie. Chose gravissime : elle ne dispose d'aucun outil lui permettant de s'assurer de la qualité des pâtes importées. Conséquence : elle se contente de délivrer à tout vent,  non pas des certificats de conformité mais des lettres de dérogation. Or ces lettres sont illégales. Mieux, elles sont monnayées depuis toujours dans ce service par les importateurs véreux. A ce jour l'importation des pâtes alimentaires représente près de 65% de parts de marché pour près de 70 références importées sur le marché. C'est inouï!!! C'est du jamais vu dans un secteur où il existe des usines de production.

Quelles sont les solutions apportées par les pouvoirs publics pour encadrer la viabilité des activités de ce secteur afin de la protéger contre ces intrusions externes ?

Comme je l'ai déjà indiqué, le secteur des pâtes alimentaires est  a priori réglementé, l'importation étant subordonnée dans les textes à l'obtention d'un certificat de conformité. Toutefois le secteur des pâtes alimentaires a été complètement dévoyé par les fonctionnaires corrompus et véreux, notamment ceux du Ministère de l'industrie, des mines et du développement technologique et de l'ANOR.
Par ailleurs il a été instauré depuis 2007, une valeur de références aux douanes pour l'importation des pâtes alimentaires. Celle ci devait être révisable tous les six mois. Seulement, depuis sa mise en place aucune révision n'a été faite malgré toutes les demandes incessantes provenant de l'Association des producteurs de pâtes alimentaires! A ce jour cette valeur de référence n'a plus aucun effet car le but était de rétablir le différentiel de compétitivité entre les produits importés et la production locale.
A l’évidence, il n'existe pratiquement plus de mesures efficaces permettant d'encadrer l'intrusion massive des pâtes alimentaires dans le marché. Bien au contraire,  c'est l'Etat, mieux c’est le Ministère de l'industrie, des mines et du développement technologique, notamment par le biais de son bras armé qu’est l'ANOR qui alimente désormais le marché en pâtes alimentaires et fragilise ainsi le tissu industriel.

N’y a-t-il pas un cadre de concertation entre les opérateurs de la filière et les pouvoirs publics pour trouver des points de convergence indispensables pour la survie de ce secteur ? Si oui, qu’est-ce qui fait donc problème ?

A travers de multiples correspondances, nous avons saisi plus d’une dizaine de fois tous les ministères concernés par les activités de cette filière et en charge de ces questions (Ministre des Finances, Ministère de l'industrie, des mines et du développement technologique, etc.). Le moins que je puisse affirmer, c’est qu’aucune suite n'a été donnée à nos multiples requêtes. En prime : même pas une seule réponse écrite, encore moins une entrevue !
A cette attitude pour le moins curieuse, il faut aussi ajouter le laxisme de la SGS qui ne contrôle rien du tout. De même que la douane qui laisse passer un certain nombre de cargaisons de pâtes alimentaires qui arrivent en contrebande dans des véhicules, réfrigérateurs, etc., toutes importées.

Selon des informations recueillies ici et là, l’ANOR (agence des normes et de la qualité) et le MINIMIDT (Ministère de l'industrie, des mines et du développement technologique) sont particulièrement pointés du doigt comme étant des facilitateurs du désordre. Quel est le sentiment des opérateurs de la filière à ce sujet ?

L'ANOR est le bras armé du MINIMIDT pour détruire le tissu industriel du Cameroun. C’est vraiment contradictoire d'avoir un organe qui, au lieu de travailler pour assurer la pérennité des entreprises locales, donne plutôt une prime aux importateurs, fossoyeurs de l'économie. Tous les opérateurs de la filière sont unanimes là-dessus !

Au regard de la porosité observée et tant décriée, les balbutiements des pouvoirs publics ne risquent-ils pas d’entraîner la cessation des activités par les entreprises de ce secteur ?

La situation est plus grave que vous ne pouvez l’imaginer. Surtout lorsqu’on se rend compte que l’ANOR et sa tutelle ne sont ni plus ni moins que les plus grands facilitateurs du désordre et de la confusion dans ce secteur. Ainsi, face aux coups de boutoir répétés du Ministère de l'industrie, des mines et du développement technologique et de l’ANOR, nous ne sommes pas loin du dépôt de bilan dans ce secteur, notamment si rien n'est fait de manière urgente. D'ailleurs l'une des 5 entreprises du secteur a déposé le bilan il ya quelques mois.

La situation est-elle résolument désespérée ? N’y-a-t-il pas des perspectives envisageables pour rectifier le tir et normaliser cette jungle économique ?

Dans tous les cas, les solutions à apporter ne sont pas étranges. Tout au moins, est-il indispensable et urgent de prendre, entre autres,  les mesures suivantes:
- Revaloriser la valeur de référence en douane
- Annuler la délivrance par l'ANOR des lettres de dérogation
- contingenter les volumes importés de pâtes alimentaires, compte tenu de la grande capacité de production des usines locales.

© Correspondance : Armelle Mbock



28/06/2010
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