Bamenda: Ce que Biya et Fru Ndi se sont dits

Bamenda - 13 DEC. 2010
© Michel Ferdinand, à Bamenda | Mutations

Pour la première fois depuis 20 ans, le chef de l’Etat et le leader de l’opposition ont eu une rencontre en marge du cinquantenaire des Armées. Au menu des discussions, Elecam, les élections et le Scnc.

L’entrée secondaire de la résidence présidentielle, située au quartier Up Station à Bamenda, est assez encombrée. Des véhicules de toutes marques s’y sont garés, très tôt dans la matinée du 10 décembre 2010. Au troisième jour de la visite du chef de l’Etat, Paul Biya, liée à la célébration du Cinquantenaire des armées, le décor indique que des audiences avortées quelques jours auparavant, auront bel et bien lieu.

8h30. Les membres de la délégation du Social Democratic Front (Sdf), conduits par leur président national, Ni John Fru Ndi, y débarquent comme tous les autres. Il faut montrer patte blanche pour y avoir accès, en présentant un badge délivré à cet effet. Puisque des éléments de la sécurité présidentielle veillent au grain. Les journalistes et autres cameramen sont soumis au même exercice. Il n’y a pas de discrimination. John Fru Ndi et sa suite doivent attendre, assis, à quelques mètres de la salle d’audience, où ils sont rejoints par d’autres audienciers dont le gouverneur de la région du Nord-Ouest.

Les audiences proprement dites commencent à 11h30. Les personnalités à recevoir sont assez importantes.

Après le passage des chefs traditionnels du Nord-Ouest et de la majorité présidentielle, l’ordre se précise. Peu avant le retrait de l’archevêque de Bamenda, Mgr Cornelius Fontem Esua, le protocole d’Etat invite les membres de la délégation du Sdf, à se rapprocher de la salle où se tiennent les audiences. Soit quatorze personnes. John Fru Ndi est en tête. Dans les rangs, on reconnaît Elisabeth Tamajong (secrétaire général du Sdf), Joseph Mbah Ndam (un des vice-présidents à l’Assemblée nationale), Joseph Banadzem (président du groupe parlementaire Sdf), Francis Sama (avocat du Sdf), Mathias Ofon (membre de la commission communication), Benjamin Fru Ndi (fils du Chairman) etc. Une délégation constituée des membres du Sdf résidant dans le Nord-Ouest.

Il est 13h05. Le Chairman du Sdf peut alors se bomber le torse pour donner l’impression d’ ‘’affronter’’ Paul Biya d’égal à égal. Il arbore un costume sombre et un chapeau traditionnel de couleur noire. La scène se vit en direct. Fru Ndi et les autres prennent place sur des chaises en plastique, au hall de la salle d’audience. Ils sont face à face, avec quelques membres du gouvernement, à savoir Philémon Yang, Amadou Ali, Jean Nkuete, Martin Belinga Eboutou, Paul Atanga Nji. Ces derniers sont assis sur des sièges confortables. Le climat devient un peu lourd. Quelques-uns font l’effort de ne pas regarder Fru Ndi et compagnie dans les yeux.

La décrispation survient, lorsque le directeur du Cabinet civil à la présidence de la République, Martin Belinga Eboutou, va vers John Fru Ndi pour le saluer. Il est suivi par le Garde des Sceaux, Amadou Ali. Puis, le geste du ministre délégué à la présidence de la République chargé de la Défense (Mindef), Alain Edgar Mebe Ngo’o, en rajoute à la décrispation. Surtout quand le Mindef conduit John Fru Ndi vers le Premier ministre et ceux qui ont gardé leur position, pour des échanges de civilités. L’ambiance est détendue.


Contenu des échanges

A 13h33, les battants de la grande salle s’ouvrent devant John Fru Ndi, qui peut finalement être reçu par le chef de l’Etat. Le président de la République se lève de son long canapé pour recevoir son invité au centre d’un tapis rouge. La première poignée de main est chaleureuse. Paul Biya accueille son hôte avec quelques mots dans la langue de Shakespeare : «Monsieur le Chairman, comment vous allez ? Je suis heureux de vous voir après un long moment», lance Paul Biya. Le président de la République et Fru Ndi se dirigent vers un pan du salon, où chacun s’installe sur son siège. Ils sont tout de même proches, l’un de l’autre, non loin d’un interprète. Le secrétaire général du Comité central du Rdpc, René Emmanuel Sadi les y rejoint, à un moment donné.

Les hommes de médias sont tenus de sortir pour laisser la scène à ces leaders. Dans l’intervalle, la suite de Fru Ndi attend à la véranda. Les commentaires vont bon train. Les plus curieux veulent en savoir un peu plus sur le contenu des échanges. Dans l’attente, un responsable chargé de servir des verres de jus au reste de la délégation du Chairman heurte son pied et déverse tout le contenu de son plateau. Rien de grave. Le tapis rouge a juste été trempé.

A 14h30, la presse regagne la salle dans laquelle Paul Biya et Fru Ndi achève leur entretien. On peut apercevoir un Paul Biya tout attentif, qui a même fini par s’emporter, en riant aux éclats, après une intervention du Chairman du Sdf. Avant de se séparer, Paul Biya serre la main aux autres membres de la délégation du Sdf, qui ont retrouvé la grande salle d’audience. Et Fru Ndi en profite pour lui remettre un aide-mémoire, lequel résume la quintessence de leur entrevue. L’entretien a duré 35 minutes. Ce n’est qu’après, que le gouverneur et les sept préfets de la région du Nord-Ouest ont été reçus par Paul Biya, pour clôturer cette série d’audience.

Personne dans les milieux du Sdf, n’était assez sûr de l’effectivité de cette audience, surtout que le 8 décembre 2010, la première annoncée entre Paul Biya et Fru Ndi a avorté.  Le motif étant que le chef de l’Etat se reposait à la suite d’un défilé militaire qu’il a présidé à la Commercial Avenue. Ce jour-là, John Fru Ndi devait être accompagné d’Oshi Joshua (2ème vice-président au Sdf) et Augustin Mbami (trésorier au Sdf) pour rencontrer Paul Biya.  Un premier rendez-vous manqué.

Michel Ferdinand, à Bamenda



13/12/2010
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