Audiences à ELECAM: L’opposition et la société civile participent à l’inertie

21 FEV. 2012
© Charles MONGUE-MOUYEME | Correspondance

Lorsqu’on écoute les camerounais dans des programmes interactifs en radio ou en télé, certains ont coutume de dire que nous n’avons pas d’opposition dans ce pays, qu’elle est amorphe, inexistante le plus clair du temps, et qu’elle joue même parfois le jeu du pouvoir en place.

Lorsqu’on écoute les camerounais dans des programmes interactifs en radio ou en télé, certains ont coutume de dire que nous n’avons pas d’opposition dans ce pays, qu’elle est amorphe, inexistante le plus clair du temps, et qu’elle joue même parfois le jeu du pouvoir en place. Eh bien, avec le ballet que nous voyons à ELECAM ces jours-ci, tout porte à croire que l’opposition et une certaine « société civile » font le maximum pour conforter les tenants de cette opinion.

En effet, il est difficile de comprendre l’objet des audiences organisées par ELECAM ces derniers jours, après l’annonce de l’option finalement prise de procéder à la refonte des listes électorales dans la perspective du double scrutin législatif et municipal attendu en 2012. Il faut relever que les dirigeants d’ELECAM n’avaient eu de cesse, face à cette exigence formulée par l’opposition, de marteler que la révision des listes électorales répondait parfaitement au souci de sécurisation du fichier électoral, puisqu’il suffisait juste de supprimer les doublons et les décédés, ce qui était pratiquement achevé. L’argument du délai était également avancé pour rejeter l’idée de la refonte, ceux qui l’utilisaient (ELECAM, et certains « experts ») estimant que cela ne pouvait pas être réalisé avant plusieurs années, malgré l’exemple du Nigéria voisin qu’on leur opposait. Subitement, parce que le Chef de l’Etat en a décidé ainsi, la très indépendante ELECAM opte pour la refonte, qui est devenue réalisable dans un délai maximal de 3 mois.

Au moment où on s’attend à ce qu’ELECAM se mette immédiatement au travail pour bien préparer et effectuer cette opération de refonte des listes électorales, on assiste plutôt à des larges consultations comme on aime à les qualifier dans notre pays. Le prétexte affiché serait de recueillir les avis des forces vives de la nation pour mener à bien cette refonte. Ainsi, depuis quelques jours, on voit des personnalités de la république descendre de leurs grosses cylindrées (à quelques rares exceptions), bien sur leur 31, aller s’asseoir dans une belle salle en face des membres d’ELECAM. S’il ne s’était agi que des pontes du régime et leurs affidés, on aurait dit qu’ils sont dans leur logique de politique-spectacle, de réunions-séminaires-colloques-ateliers interminables, bref d’inertie. Mais notre surprise est grande de voir l’opposition dite radicale, celle qui avait été accusée de fomenter le chaos après les résultats de la dernière élection présidentielle, se prêter à un tel jeu.

Est-ce le plaisir de se voir au journal télévisé de la CRTV qui leur est si souvent refusé qui motive ces leaders de l’opposition à se soumettre à ce rituel qui a plusieurs fois montré son inefficacité au Cameroun ? Serait-ce plutôt la joie d’être reconnu comme personnalité qui compte dans le pays que conférerait une convocation venant de le « haute hiérarchie » de la république ? En tout cas, il est difficile de comprendre et d’expliquer la docilité et même la complicité de l’opposition et de la « société civile » qui lui est assimilée face à cette autre expression de l’inertie que constituent ces audiences à ELECAM. A-t-on besoin de partir de Douala, de Bamenda, de Garoua, de Bafoussam, etc. (donc d’engager des frais importants parfois) pour juste venir dire aux responsables d’ELECAM qu’on est satisfait de l’option de refonte des listes, mais qu’on souhaite qu’il y ait aussi la biométrie et l’implication des partis d’opposition dans ce processus ? N’était-ce pas le contenu partiel d’un mémorandum du SDF adressé au Président de la République ? Quelle sublime idée attend-on de ces audiences, qui conférerait la perfection à cette refonte des listes électorales au Cameroun ?

Rien, il ne sortira rien des rencontres qui se tiennent ces jours-ci à ELECAM, en dehors des lieux communs mille fois répétés par les uns et les autres. Ce qu’on aura réussi à faire, c’est grignoter encore un temps précieux qu’on aurait consacré à penser et installer le dispositif technique, et occasionner une inutile hémorragie financière alors qu’on aura besoin de beaucoup d’argent dans cette opération. Avec la complicité de l’opposition. Malheureusement.



Charles MONGUE-MOUYEME
chmongue@yahoo.fr



22/02/2012
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