Adrien Djomo:Camer.beLors de son procès en 1964, Nelson Mandela a clôturé  sa déclaration en disant: « J'ai combattu contre la domination blanche et j'ai combattu contre la domination noire. J'ai chéri l'idéal d'une société libre et démocratique dans laquelle toutes les personnes vivent ensemble en harmonie et avec des chances égales. C'est un idéal pour lequel j'espère vivre et voir se réaliser. Mais, Mon Seigneur, si nécessaire soit-il, c'est un idéal pour lequel je suis prêt à mourir ». À mon avis, pour une meilleure société, cette déclaration est la plus mémorable que chacun dans ce monde a besoin d'intégrer dans sa vie quotidienne indépendamment de sa couleur, de sa race, de sa religion, de ses origines ou de sa position sociale.

Nelson Mandela est décédé le 5 Décembre 2013. Sans précédent, près de 91 chefs d’État et leaders les plus influents ont assisté à son enterrement qui a mobilisé la planète entière. Cela prouve l'influence que sa contribution pour la liberté en Afrique du Sud et la dignité humaine en général a été reconnue par les gens à travers le monde. Sa longue marche vers la liberté l’a conduit à de nombreuses actions militantes avec l'ANC, à 27 ans de prison, et par la suite à la présidence de la République d'Afrique du Sud. Comme ce Nègre qui a inspiré sa génération et les générations à venir est désormais remis aux aïeux, les Africains et le monde entier, nous devons tous nous interroger sur la nouvelle orientation à suivre pour une société meilleure. Que devons-nous faire pour que la lutte de Nelson Mandela, de ses amis qui ont sacrifié leur vie en prison, pour que la lutte de beaucoup d'autres qui sont morts pour la liberté, pour une société digne et harmonieuse, et pour que les souffrances qu'ils ont endurées, puissent devenir le fondement d'une vie meilleure? Quel héritage lui et sa génération ont-ils laissé à l'Afrique du Sud, à l'Afrique et au reste du monde? Tout au long de cet article, je vais décrire la société hypocrite dans laquelle nous vivons encore aujourd'hui et démontrer que plus que jamais, nous devons suivre le chemin de Rolihlahla Mandela et de ses amis.

Afrique du Sud

L’Afrique du Sud est l'un des pays considéré parmi les ancêtres de l'humanité dans lequel ont été trouvés des fossiles humains les plus anciens. Au 19ème siècle, le pays a souffert de différentes guerres comme la guerre Xhosa - Zulu - Afrikaners, la première et la deuxième guerre des Boers (1880-1881 et 1899-1902) pour le contrôle des ressources naturelles, notamment l’or, le diamant, etc. Depuis le 19ème siècle, l'Afrique du Sud a été sous la domination des colons européens minoritaires : les Boers (Hollandais, Flamands, Allemands et Français) et les Britanniques qui ont envahi le pays. En 1948, le Parti National a été élu au pouvoir. Cette élection a inauguré l'ère de la discrimination légale entre Blancs et Noirs connue sous le nom d'Apartheid. La minorité blanche qui représente moins de 20 % de la population avait tous les privilèges, y compris le pouvoir exécutif et la majorité noire (environ 80 %) était laissé dans la pauvreté, le manque d'éducation et le manque de respect, entre autres dépravation. Cette situation inacceptable a motivé la lutte que Rolihlahla Mandela et ses amis comme Walter Sisulu, Govan Mbeki, Raymond Mhlaba, Oliver Tambo, etc., qui se sont levés au sein de l'ANC. Le parti ANC a utilisé différentes stratégies de protestation non-violentes telles que la désobéissance civile, les manifestations publiques et plus tard a changé de tactique pour le sabotage des intérêts publics quand ils ont réalisé que les campagnes non-violentes n'étaient pas assez efficaces. Il en est résulté le procès de Rivonia (1962-1964) où Nelson Mandela avec 10 de ses amis (Nelson Mandela, Walter Sisulu, Denis Goldberg, Govan Mbeki, Ahmed Kathrada, Lionel «Rusty» Bernstein (acquitté ), Raymond Mhlaba, James Kantor (acquitté ), Elias Motsoaledi, Andrew Mlangeni) furent arrêtés et condamnés à la prison à vie. Au cours de leur emprisonnement, la lutte contre le régime de l'Apartheid est  restée très active. Des personnalités dans le pays telles que Winnie Mandela, Steve Beko et à l'extérieur du pays, comme Oliver Tambo, et beaucoup d'autres ont maintenu les campagnes de protestation contre l'Apartheid. Au cours de ce moment particulier de l'histoire de l'Afrique du Sud, des millions de personnes ont perdu leur vie directement ou indirectement à cause de ce système pervers. Malgré la libération de Nelson Mandela et la gestion du pays par la majorité noire depuis 1994, les Negros en Afrique du Sud souffrent encore de la dépression psychologique que Frantz Fanon a décrit dans son livre « Peau noire, masques blancs », associant " Noirs à infériorité ou subordination". L’Afrique du Sud est encore aujourd'hui parmi les premiers pays dans le monde des revenus inégalement répartis, où les Noirs sont parmi les plus pauvres, les moins instruits, les plus vulnérables au VIH et aux maladies infectieuses. Si Rolihlahla Mandela et tous ceux qui sont morts dans la lutte contre ce système inhumain avaient raison - et je pense avec ce que j'ai vu lors de ses funérailles à travers le monde qu'ils avaient raison, - alors les Blancs doivent présenter des excuses pour ce qui est arrivé, pour ce qu’ils ont fait et soutenir la communauté noire à surmonter la dépression psychologique qu’ils endurent. La grande disparité économique doit être réduite entre les races pour un avenir meilleur, pour l'harmonie, la dignité et l'égalité des chances pour tous.

Afrique

Malgré le fait que l'Afrique soit considérée par la plupart des paléoanthropologues comme étant le plus vieux continent de la terre d’où provient l’espèce humaine environ 150 000 à 100 000 ans, le reste du continent a suivi la même voie que l'Afrique du Sud. Les frères africains qui ont émigré il y a environ 50 000 années le continent soit à travers Bab-el-Mandeb sur la mer Rouge, le détroit de Gibraltar au Maroc, ou le canal de Suez en Egypte sont retournés en Afrique et ont pratiqué l'esclavage pour peupler et développer le nouveau monde. Les traites Arabe et Atlantique ont déporté environ 30 millions de personnes entre le 7e et le 20e siècle hors de l'Afrique. A la fin du 19e siècle, les puissances impériales européennes engagées dans une bousculade territoriale importante ont occupé la majeure partie du continent. C’est pour consolider ce pouvoir que le roi Léopold II de Belgique a convoqué la Conférence de Berlin (1884 - 1885) au cours de laquelle les pays africains ont été divisés en l'absence des peuples africains. Après la Seconde Guerre mondiale, la puissance européenne s’est affaiblie et les mouvements d'indépendance en Afrique ont poussé la plupart des pays à une autre forme de dépendance appelée in-dépendance, sauf en Afrique du Sud qui est resté sous la gouvernance du régime de l'Apartheid. En plus du long esclavage qui a traumatisé l'Afrique, dépeuplé le continent de ses valeureux soldats, le mouvement de in-dépendance a mis au pouvoir des dirigeants qui ont agi principalement comme gouverneurs ou préfets représentant principalement l'intérêt des pays européens contre les peuples africains. Cela a abouti à la pauvreté dans la grande majorité du continent et à une émigration volontaire des Africains du continent vers l'Europe et d’autres parties du monde. Malgré la croissance économique qui a atteint une moyenne de 5 % ces dernières années, l'Afrique souffre encore des systèmes vulnérables qui ont résulté de l'in-dépendance pour servir les nations européennes créant des guerres entre frères comme on en a vu ces dernières années en Côte-d'Ivoire, en Libye, dans les deux Congo, en Angola, en RCA, etc. Le défi de l'Afrique, des Nègres et des personnes de couleur à travers le monde est de faire bon usage de l'héritage de Nelson Mandela pour guérir du traumatisme psychologique que l'Afrique et les Noirs continuent de souffrir à l’intérieur et à l’extérieur de l'Afrique. Cela me semble nécessaire de développer la confiance en soi et le respect pour le développement et la croissance de la population noire et du continent.

Héritage pour les descendants d’Afrique

Steve Biko disait en son temps "Noir c’est beau". Les Noirs à travers le monde souffrent encore de discrimination consciente ou inconsciente, de racisme, de complexe d’infériorité, etc., comme conséquence de ce qui a été décrit ci-dessus. Cependant, les personnes descendant d’Afrique ont besoin de développer un esprit de combattant, de gagneur. Ils ont besoin de s'appuyer sur la force de l'espoir que Rolihlahla et ses amis ont maintenu au cours de leur long séjour en prison. Si Mandela a été en mesure de faire la longue marche vers la liberté, au point d’en devenir le premier président noir en Afrique du Sud, si un citoyen d'origine africaine - Barack Obama - est président du pays le plus puissant au monde, entre autres grandes réalisations du peuple noir, cela signifie aussi que le rêve de Martin Luther King Junior peut entièrement se réaliser pour toi et pour chacun d’entre nous. Oui Afrique, oui negro, oui homme de couleur, vous pouvez le faire! Vous, Negro, vous n'êtes pas des "damnés de la terre", vous êtes aussi des êtres humains et certains de vos frères ont prouvé que l'avenir peut aussi être de votre côté. Vous devez croire en vous-même et avoir confiance en vos vrais frères afin que vous puissiez travailler main dans la main. Ce ne sera pas facile non plus, - car il n'en a pas été aussi pour eux, - cependant, nous devons continuer à travailler dur car, l'Afrique est le continent le plus prometteur. L’Afrique du Sud a montré le signe avec l’organisation réussie de la dernière Coupe du monde de football.

La croissance économique de ces dernières années en Afrique est un autre signe d'un avenir meilleur si nous croyons tous en nos possibilités et travaillons dur pour cela. Le monde entier doit faire preuve de plus de respect pour les peuples noirs, mère de l'humanité. Il est temps de développer la coopération positive avec l'Afrique, parce que les Africains et les descendants d’Afrique sont plus que jamais déterminés à changer le cours des choses. Les Préfets ou Gouverneurs que nous avons encore aujourd'hui à la tête des Etats en Afrique doivent comprendre que leur temps est révolu et que le temps du changement est venu. Ils doivent utiliser le chemin de Rolihlahla et aider le mouvement du peuple noir d'aller dans le sens positif. Ils doivent se mouvoir ou alors le mouvement doit les emporter!

Héritage pour les Blancs et le reste du monde

La mobilisation générale observée lors des  funérailles de Rolihlahla prouve que le temps est venu d’enseigner à nos enfants que la «théorie de polygénie " qui était le fondement de la discrimination raciale, de la classification ou de la supériorité raciale était une fausse théorie. Le racisme scientifique a été développé pendant de nombreux siècles par d'éminents scientifiques comme Carl Linnaeus, Georges Cuvier, John Hunter, Christoph Meiners, Voltaire, Kant, Lord Kames, G.W.F Hegel, Arthur Schopenhauer, Charles Blanc, Samuel George Morton, etc. pour soutenir cette théorie de polygénie égocentrique qui a été utilisée pour aliéner les autres races comme étant des « races inférieures». Aujourd'hui la science dans différents disciplines a utilisé l'ADN, les fossiles, l'analyse du cerveau, etc. pour montrer que le "monogénisme" est l'explication la plus probable de l'origine humaine. Si la science explique aujourd'hui que l'homme s'est séparé il y a environ 150 000 à 100 000 ans des primates en Afrique et que la pigmentation et l'exposition à des conditions climatiques différentes sont l'explication la plus probable des différences de couleur entre les races, les Blancs doivent présenter des excuses pour leurs fautes / erreurs aux personnes noires et de couleur. Comme tous les êtres humains ont la même origine, cela signifie que nous sommes tous des frères avec des intérêts différents et devons donc nous respecter mutuellement pour un monde meilleur, dans lequel tout le monde vit en harmonie, dans la dignité, et avec les mêmes chances. Personne ne doit tolérer une telle erreur ou chemin de nouveau à l'avenir; Nous devons tous suivre la sagesse de Rolihlahla "Réconciliation, respect mutuel, dignité et égalité de chance pour tous".

© Correspondance : Adrien Djomo,Université Queen, Kingston, Canada


16/02/2014
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