Après la visite de Paul Biya…: Les populations de la région de l’Est aux abois

DOUALA - 07 AOUT 2012
© Ange-Gabriel Olinga B. | Le Messager

Courroucées, elles estiment que dans le chapelet des doléances présentées au chef de l’Etat lors de son récent passage à Lom-Pangar, le porte-parole des élites de l’Est n’a pas évoqué le découpage administratif tant souhaité par les fils et filles de la région du soleil levant

1.- Black out sur la création des unités administratives

Selon certaines personnalités influentes qui ont requis l’anonymat, le discours de Bernard Wongolo, porteur des doléances des filles et fils de l’Est, était comme « un verre à moitié vide ». Elles affirment qu’à l’heure « des grandes réalisations des projets structurants, l’occasion nous était donnée de demander tout ce que nous voulons au président Paul Biya.. » Pour ces personnalités visiblement irritées après la cérémonie de pose de la première pierre vendredi 3 août 2012 dernier à Lom Pangar, « l’Est devrait cesser de rimer avec le sous-développement. La création d’une université d’Etat, c’est bien ! Mais il est aussi temps de créer de nouvelles unités administratives, au vue des longues distances qui séparent les localités. Vous vous imaginez que pour rallier Bertoua, le chef-lieu de la région, nous avons souffert. Yokadouma-Bertoua c’est 279 km qu’on prend au moins 10 heures pour réaliser. Batouri-Bertoua, 90 km ; Moloundou-Bertoua 530 km ; Bertoua- Garoua-Boulaï 248 km ; ce qui est tout à fait anormal ! ».

Avec une superficie de 109.011 km2, la région du soleil levant est la plus vaste du Cameroun. Quand on y ajoute ses innombrables ressources naturelles telles que le bois, l’or, le fer, le diamant…, elle est classée parmi les plus riches. En dépit de ce potentiel, les populations dans leur grande majorité vivent dans une misère indescriptible. Pour remédier à la situation, le gouvernement camerounais s’est engagé dans un vaste programme de valorisation de ces ressources. Attendu donc, « un nouveau découpage administratif » au vu de la densité des activités économiques et aussi des populations.

C’est d’ailleurs un vœu formulé à cor et à cri par tous les fils de l’Est. Comme spécimens, le département du Haut-Nyong avec ses 14 unités administratives et une population estimée à 216.768 habitants est un cas unique dans le pays. Il est considéré comme une région à part entière. Un fait qui milite en faveur de son éclatement. Et l’on parle déjà en sourdine du département du Dja et Mpomo qui pourrait regrouper « Lomié, Mindourou, Messok et Ngoyla ». Dans la même lancée, les fils du département de la Boumba et Ngoko, 30.389 km2 pour 4 arrondissements et une population de 116.702, avaient sans ambiguïté réclamé la création d’une nouvelle région dénommée « Sud-Est ». Cette doléance, qui à coup sûr est connue des décideurs, pouvait trouver satisfaction si elle ne revêtait pas d’enjeux économiques et politiques. Tout à côté, le département de la Kadey qui tient son nom du fleuve Kadey, avec une superficie de 15.884 km2 avec pour chef-lieu Batouri, compte 7 arrondissements et une population estimée à 192.927 habitants. Enfin le Lom et Djerem, siège des institutions régionales avec ses 228.691 habitants pour une superficie de 26.345 km2.


2.- Conflit frontalier entre les régions de l’Est et du Sud

Au-delà du projet de construction du barrage hydroélectrique de Lom Pangar à l’Est, l’on oublie pas l’exploitation du fer de Mballam. En 2009, une controverse est née sur l’appartenance de ce site à la région de l’Est. Situé à 70 km de Ngoyla, Mballam est une terre de la région de l’Est comme le soutiennent avec conviction l’élite et les autorités administratives du coin. « Ngoyla, est une unité administrative depuis les années 60 et Mballam est un canton de cet arrondissement ». D’ailleurs, cette localité très enclavée a été reconnue comme l’un des fiefs de la rébellion animée par les leaders de l’Union des populations du Cameroun (Upc), sous la houlette du célèbre Wounly Massaga, pendant les années d’indépendance. Ce qui avait poussé le gouvernement à créer une base militaire à Djoum en 1973. Parce que, « du côté de l’Est, il n’y avait pas de route et les militaires sont venus de Djoum dans la région du Sud, qui disposait d’une piste pour rallier Mballam. », explique un chef traditionnel.
A défaut de créer la région du Sud-Est, tel que le souhaitent par les fils de l’Est, certains voient mal leur appartenance à la région du Sud. C’est d’ailleurs avec regret qu’elles apprécient certaines actions comme les initiatives du médecin chef de service de santé d'arrondissement de Djoum qui a souvent multiplié des descentes à Mballam malgré la présence d’un centre de santé. Ces populations, ont même dénoncé il y quatre ans, son engagement à vouloir réorganiser cette aire de santé dans le but de couvrir tous les villages de Mballam. Et pour marquer leur opposition face à ces agissements suspects, les forces vives de la localité avaient dénoncé ce fait auprès du ministre de la Santé publique, du Premier ministre et du président de la République. Un autre fait des plus frustrants, un directeur d’école publique de Mballam avait été affecté par la délégation régionale du sud.


3.- L’ancien gouverneur de l’Est comme un fusible

La somme de toutes ces frustrations a été le motif de la descente sur les lieux, sur instruction du chef de l’Etat, de Adolphe Lélé Lafrique alors gouverneur de la région de l’Est en juin 2008. Il était question de confirmer l’appartenance de Mballam à l’Est. Pour ce qui est des revendications, la région de l’Est avait présenté aux responsables de Cam Iron une panoplie de doléances qui vont des postes que doivent occuper les fils de l’Est à la construction des infrastructures sanitaires en passant par le versement de la redevance aux populations riveraines. Après avoir juré la main sur le cœur que toutes ces préoccupations seront prisent en compte, les responsables de Cam Iron d’après nos sources « n’ont jusqu’ici posé des actes significatifs dans ce sens. »
Là-bas, apprend-on pour ce qui est des indemnisations, des familles expropriées du site, la gestion des déchets toxiques, la gestion du flux migratoire avec en prime la recrudescence des maladies, rien n’est fait. Une attitude qui accentue le scepticisme des populations sur les espoirs d’amélioration de leurs conditions de vie par ce projet dont le coût est chiffré à près de 2,5 milliards de dollars Us, soit 1.250 milliards de FCfa. Rappelons à cet effet qu’il est prévu la construction d’une ligne de chemin de fer longue de 500 km, qui n’aura que 20 km à l’intérieur de la région de l’Est.




07/08/2012
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