AFRIQUE,LIMITATION DES MANDATS ET NON-RETROACTIVITE: après Compaoré et Wade, à qui le tour ?

AFRIQUE,LIMITATION DES MANDATS ET NON-RETROACTIVITE: après Compaoré et Wade, à qui le tour ?

Wade Compaore:Camer.beLe Conseil constitutionnel sénégalais a donné quitus à 14 candidatures pour briguer la magistrature suprême le 26 février prochain. Bien évidemment, le grand sachem du Parti démocratique sénégalais (PDS), Abdoulaye Wade, fait partie des favoris de la prochaine présidentielle. Ont également été autorisés à aller à la conquête du fauteuil présidentiel, Macky Sall, Idrissa Seck et Cheikh Tidiane Gadio, ex-dignitaires du pouvoir reconvertis dans l’opposition dont les candidatures étaient contestées par le camp présidentiel. Le Conseil a au moins fait l’effort, cette fois-ci, de justifier certaines de ses décisions en les motivant, comme le lui avait demandé une certaine opinion nationale comme internationale.

Il a cependant refusé de lever le mystère sur la nature de l’irrégularité par lui évoquée sur des signatures ayant soutenu la candidature de Youssou N’Dour. Le chanteur a, par conséquent, crié à la trahison et à la manœuvre politicienne. La haute juridiction a, en outre, jugé le recours du PDS non fondé, estimant que la violation de la législation fiscale alléguée contre les trois opposants, n’était pas établie. Elle a surtout été beaucoup plus prolixe sur les raisons de sa décision de confirmer la régularité de la candidature du président sénégalais. Invoquant le principe juridique de la non-rétroactivité qui veut que toute disposition juridique ne soit valable que pour la période suivant sa prise, le collège de cinq magistrats a jugé irrecevables les nombreux recours introduits contre la candidature très controversée.

Tout comme leurs collègues burkinabè l’ont fait en validant la candidature du président Blaise Compaoré en 2010, alors que des démarches avaient été entreprises pour s’y opposer. Ainsi donc, la jurisprudence du Faso a fait école au pays de la Téranga. Le chef de l’Etat sénégalais avait d’ailleurs cité le cas burkinabè dans sa tentative de justification du bien-fondé de sa candidature. Il s’est donc inspiré de l’exemple burkinabè, sûr qu’il est que les juges constitutionnels sont sous coupe réglée. En copiant son homologue burkinabè qu’il n’hésite même pas à citer comme exemple à imiter, Wade contribue à allonger la liste des tripatouilleurs de Constitution.

Et la stratégie semble si savamment élaborée que l’opposition et la société civile n’y voient souvent que du feu. Faisant souvent preuve d’un manque de vigilance étonnant, celles-ci finissent toujours par se faire prendre dans ce piège à cons que le pouvoir en place leur tend. Tout commence généralement par un projet de révision de la loi fondamentale, toujours initié par son bénéficiaire, en l’occurrence le chef de l’Etat, mais que le camp d’en face n’a jamais réussi à faire décapoter. Il se retrouve alors dans une délicate situation où il est presque contraint de se battre contre des moulins à vent en tentant en vain d’empêcher la validation d’une candidature du reste non interdite par la version en vigueur de la Constitution.

Seule une vigilance à toute épreuve peut éviter à l’opposition politique de s’en contenter par des raisonnements basés sur les aspects moraux ou éthiques de la démocratie, qui ne font généralement pas le poids devant des arguments en béton reposant sur la lettre et l’esprit de la loi. A sa décharge cependant, les voies de modification constitutionnelle, qu’elles passent par les citoyens, le chef de l’Etat ou l’Assemblée, ont toujours été sciemment balisées pour le régime en place. Généralement majoritaire au Parlement et maîtrisant toutes les étapes du vote référendaire, le parti au pouvoir finit toujours par se tailler la part du lion à une étape ou à une autre.

L’enfant de Kébémer a donc beau jeu de prendre le mauvais exemple sur son frère et ami de Ziniaré dont la recette a déjà fait ses preuves. Il est même à craindre que ces deux pionniers en la matière ne s’érigent en promoteurs de cette honteuse pratique qui consiste, à la fin d’un mandat censé être le dernier, à modifier la Constitution pour pouvoir rempiler en se prévalant de la non-rétroactivité. Les deux chantres burkinabè et sénégalais pourront en tout cas être sûrs que leur chapelle ne manquera pas de fidèles, tant les signes de boulimie du pouvoir sont nombreux sur le continent noir. Même certains présidents élus à la faveur d’une alternance démocratique commencent à étonner par le zèle qu’ils mettent à réprimer toute contestation. Une promptitude et une facilité à casser de l’opposant, qui ne manquent pas d’inquiéter quant à leur capacité à tenir leur promesse de ne pas passer outre les dispositions constitutionnelles actuelles.

Opposant historique et de longue date et de la première heure de son pays, Gorgui avait promis avec la force de persuasion qu’on lui connaît, de ne pas briguer plus de deux fois les suffrages de ses concitoyens. Le constat est pourtant très amer de nos jours, le brillant juriste et politicien hors pair étant devenu méconnaissable. Prêt à toutes les manœuvres et les combines les plus dégradantes pour rester à la tête de l’Etat. A qui donc le tour après Compaoré et Wade, serait-on tenté de se demander ?

© Source : Le Pays


31/01/2012
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