Affaire Wikileaks: Le vice-président du New York Times s’explique à l’Esstic

DOUALA - 10 DEC. 2012
© Nadège Christelle BOWA | Le Messager

Profitant de son séjour au Cameroun dans le cadre de la 2e édition du Taigo, David Mc Craw était l’invité de l’Esstic où il a entretenu les étudiants sur l’affaire Wikileaks qui a entre autres mis à nu le travail des diplomates sur le terrain.

On n’a pas vu le temps passer dans la salle de conférence dédiée à Hervé Bourges, à l’Ecole Supérieure des Sciences et Techniques de l'Information et de la Communication (Esstic), ce vendredi 7 décembre 2012. Tant le sujet abordé par le conférencier David McCraw est captivant : l’affaire Wikileaks. La nature du conférencier l’est davantage, car en sa qualité de vice président du groupe qui édite le New York Times et avocat général du groupe, il a été au cœur de la prise de décision de publier ces câbles diplomatiques en dépit de leur caractère « confidentiel ». Peu importe alors les motivations de leur informateur, Julian Assange et le soldat américain Bradley Manning: « je crois que le journaliste ne doit pas s’intéresser aux motivations d’un informateur mais plutôt à l’information que ce dernier apporte, information qu’il analyse de manière critique pour savoir si celle-ci a une valeur », répond à ce sujet David Mc Craw à une question d’étudiant.

Invité à la 2e édition des trophées Taigo qui récompensent entre autres le journalisme d’investigation promu par l’Igc, David Mc Craw a dans son agenda édifie les étudiants en journalisme et autres filières de la communication sur les dangers de l’usage incontrôlé des nouvelles technologies de l’information, tel que le précise Alice Nga Minkala, directrice adjoint en charge des études dans son propos introductif. En juin 2010, David Mc Craw raconte qu’il souffre d’une rage de dent lorsqu’il est appelé d’urgence au siège du New York Times. Lequel journal va recevoir dans un instant des documents « confidentiels » de Julian Assange, promoteur du site Wikileaks. Le journal a besoin de son conseil juridique dans la mesure où, aux Etats-Unis, il y a une loi qui interdit la publication des informations confidentielles même si celles-ci ne s’appliquent en réalité qu’aux fonctionnaires, les journalistes n’étant pas concernés. Mais le journal au regard de la nature des informations ne veut pas être le premier journal à être sanctionné pour une telle faute d’autant plus que si la loi n’interdit pas la publication des informations de cette nature, le gouvernement se réserve le droit de poursuivre les médias qui s’y prêtent.


Dilemme

Les responsables du New York Times sont face à un dilemme. D’un côté, la menace d’une sanction qu’on veut éviter, et de l’autre, le devoir d’informer le public. Se fondant sur des précédentes affaires notamment la publication des informations secrètes relatives à la guerre du Vietnam en 1971, la plainte de l’Etat qui s’en est suivie et la décision de la Cour suprême qui refuse d’entériner cette poursuite judiciaire, David Mc Craw rassure, ces informations peuvent être publiées. Cependant, des préalables sont nécessaires. Notamment, la critique des sources en donnant au gouvernement la possibilité de commenter, de donner son opinion sur les questions abordées dans les documents. Cette critique permet en outre, d’éliminer de la publication, des informations pouvant affecter la sécurité de l’Etat. Ce qui leur vaudrait à coup sûr une condamnation.

Egalement pour plus d’impact, le New York Times (Nyt) décide de partager ses informations avec d’autres journaux dans le monde. La collaboration avec le gouvernement américain ne plaît pas à Julian Assange et refroidit sa relation avec le Nyt. Tant et si bien que sur le Nyt ne recevra pas la troisième vague des documents livrés à la presse par Julian Assange. N’eût-été la solidarité du « The Guardian », le Nyt serait passé à côté de cette publication.

Deux ans plus tard, l’avocat général du Nyt ne voit pas en quoi l’affaire Wikileaks a endommagé les relations entre les Etats-Unis et les autres pays. Au contraire, « elles ont même été consolidées ». Même si cette affaire reconnaît-il « a compliqué le travail des diplomates sur le terrain ». Si l’avocat général condamne la fermeture du site Wikileaks, on ne perçoit pas dans ses propos, le soutien apporté à cet informateur qui aujourd’hui connaît des procès qui bien qu’ayant trait aux mœurs, sont qualifiés de politiques. De même, le soldat à l’origine de cette affaire est poursuivi au niveau du tribunal militaire. Sa détention provisoire ne se passerait pas sans heurt car il serait victime de traitements inhumains. La directrice adjoint de conclure face à ses étudiants qu’il s’agit là d’une belle démonstration de l’usage responsable de l’information. Pour elle, « quand on est un journaliste responsable, on ne dit pas tout, on n’écrit pas tout ».


11/12/2012
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