Affaire Thierry Atangana: L’Etat fait reprendre le procès

YAOUNDE - 19 JUILLET 2012
© Nadine Bella | La Météo

Le délibéré attendu hier a été étrangement rabattu. La cause renvoyée au 30 juillet pour «constitution d'une nouvelle collégialité des juges».

Hier mercredi 18 juillet, peu. avant 13h, l'esplanade de la Cour d'appel du Centre, Yaoundé centre administratif, grouille de monde. Un minibus du secrétariat d'Etat à la Défense (Sed) avec à son bord une demi-douzaine de gendarmes et Michel Thierry Atangana démarre, puis prend la direction du Sed. Tristesse, désolation et consternation se lisent sur les visages. Les avocats du Français d'origine camerounaise, regroupés en petits comités, devisent, l'air abattus. L'audience vient tout juste de s'achever. Une audience qui a duré moins de 10 minutes. Juste le temps pour le greffier d'appeler l'affaire à la barre, et à Mme Nnomo Zanga, présidente de la collégialité des juges de faire constater à l'assistance l'absence d'un des membres du collège et d'annoncer que le délibéré est rabattu. Le verdict de ce procès n'a donc pas été rendu comme prévu, la cause renvoyée au 30 juillet pour constitution d'une nouvelle collégialité des juges, car il faut remplacer Mme Etong qui a pris service au ministère de la Justice la veille.


Dilatoire.

«Nous venons d'assister à un incident d'une gravité à nulle autre pareille dans un Etat de droit», a indiqué Me Tchoungang, avocat de Michel Thierry Atangana. C'était dès l'entame du point de presse donné par les conseils du Franco-camerounais, quelques minutes après l'audience. L'ancien bâtonnier signifie à cet effet: «L'affaire avait été mise en délibéré, il y a 14 jours. La présidente de la collégialité des juges nous a donné rendez-vous ce matin à 10h (hier 18 juillet, ndlr) pour rendre le jugement, conformément au code de procédure pénale. Malheureusement, c'est un triste spectacle qui nous a été servi». Le juriste précise "Tout est donc à refaire. Avec la constitution d'un nouveau collège des juges, l'affaire va reprendre car, sur le plan technique et du droit, un magistrat ne peut délibérer d'une affaire qu'il ne connaît pas. Il ne peut pas se faire une conviction à partir des notes d'une autre personne. Il faut désormais s'attendre à tout, à la réouverture du dossier, à une nouvelle audition des différentes parties au procès».

Pour expliquer ce bouleversement, Me Tchoungang indique: «Nous avons approché le président du tribunal aux fins de comprendre ce qui se passe. Selon l'explication officielle du magistrat Schlick, Mme Etong a rejoint son poste sur instruction du Garde des Sceaux». Et de conclure: «Pourtant, au lendemain de sa nomination, nous nous sommes inquiétés et l'on nous a rassuré qu'elle sera présente jusqu'au moment où le dossier sera vidé. Comment donc comprendre qu'a 24 heures du verdict, celle-ci soit sommée de rejoindre son poste. Il faut de ce fait retenir que non seulement ii y a agression à l’indépendance du pouvoir judiciaire, mais également, il y a immixtion de l'exécutif dans cette affaire».


Acharnement.

Après 11 années d'instruction judiciaire, 52 jours d'enquête préliminaire, 3 ans de débats, l'affaire Michel Thierry Atangana pourra donc reprendre. Une affaire qui en sera à sa troisième collégialité des juges, la première conduite par Mme Justine Ako'o, la deuxième présidée par Mme Nnomo Zanga, et celle attendue dans les prochains jours. Pour Me Jacques Mbunny, un des avocats de Michel Thierry Atangana: «Cette affaire n'est pas banale, comment imaginer que la veille d'une décision de justice, on éclate la collégialité. C'est un déni de justice. Après avoir refusé le visa d'entrée au Cameroun à nos confrères français régulièrement constitués pour cette affaire, on refuse même déjà de rendre justice». Selon certaines indiscrétions qui s'échappent des milieux proches de la justice camerounaise, tout semble fait pour maintenir le Français d'origine camerounaise en prison.

Arrêté en 1997, M. T. Atangana avait été condamné à 15 ans de prison dans une affaire préci??ée. Une peine qu'il a déjà purgée. Mais depuis lors, il séjourne toujours dans une cellule infeste du secrétariat d'Etat à la Défense. Vive le rouleau compresseur! Et pan... Nous y reviendrons.


19/07/2012
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